Âme-soeur de sa Majesté [Tome1] _ Le Lycaon et l'agneau

CHAPITRE 44

Des courants aériens faisaient virevolter la magnifique chevelure brune de Nina. Depuis son départ précipité, elle n'avait pas pris de pause, de peur de se faire rattraper. 

Guidée par son instinct, elle savait qu'elle se trouvait dans une zone au niveau de l'équateur grâce aux arbres, aux plantes, et à l'ambiance humide de la forêt Amazonienne.

La lueur de la Lune éclairait les ailes noires de Nina. Cet astre à la fois sombre et lumineux, apportait du réconfort à notre héroïne. Tandis qu'elle admirait un immense arbre au loin, ses pensées divaguèrent vers un monde inconnu.

Puis, sans crier gare, une larme traça un fin sillon sur sa joue gauche. Sous ses traits pales, notre jeune hybride avait le cœur brisé. Elle savait que son ɛnaïd était sous emprise. Mais elle ne savait pas de quoi. Et aujourd'hui, il était trop dangereux pour elle d'y retourner dans cet état de faiblesse.

Elle se savait forte et courageuse. Mais avec la présence de ses bébés à naître, elle préférait ne courir aucun risque. Elle avait déjà perdu son âme-sœur, et sa meute. Elle ne souhaita donc pas non plus perdre ses enfants.

« Déesse ! Qu'avons-nous fait pour que la Destinée soit si cruelle ! » cria-t-elle de désespoir.

Nul réponse ne vint. Seule une fraîche brise de soir d'été caressa sa douce chevelure au reflet miel. Une vive douleur s'empara du corps de Nina, et elle dû se tenir le ventre, face à cette contraction soudaine.

Elle hurla de douleur et coupa son souffle quand elle sentit un coup de pied vif de l'un de ses bébés. Fermant les yeux, elle plaqua sa main droite sur le sol mousseux de la forêt et mordit ses lèvres quand une deuxième contraction plus intense arriva.

Ouvrant les yeux soudainement, les pupilles dorés Nina vinrent poser leur regard sur le sol. Elle y vit une immense flaque d'eau.

Signe qu'elle venait de perdre les eaux...

« Pas maintenant » se dit-elle.

Une nouvelle contraction la fit couiner d'agonie. Son accouchement ne devait avoir lieu que dans quatre semaines. Mais les évènements récents ont dû accélérer les choses.

« Vous avez vraiment choisi votre moment mes choux... » dit-elle le souffle coupé.

Prenant appuis contre le tronc d'arbre qui lui servait de dossier il y a quelques secondes, Nina se releva doucement, pour ne pas brusquer son corps assujettit par la douleur.

« Allons-nous trouver un meilleur endroit. Je ne crois pas que venir au monde en plein milieu soit une bonne idée hum ? » dit-elle en s'adressant à ses bébés.

Marchant pas à pas, Nina alternait inspiration et expiration, comme le lui avait conseillé sa gynécologue.

« Il me semble qu'il y avait une petite cabane non loin d'ici. Si ma vue ne m'a pas fait défaut, elle devait être à quelques minutes au Nord d'ici »

Motivée par cette petite lueur d'espoir, notre future maman s'avança précautionneusement dans les bois sombres de la forêt.

En gérant sa douleur, son souffle et sa marche, Nina se posa de nombreuses questions. Pourquoi elle ? Quels enjeux étaient si importants pour que sa vie soit aussi... chaotique ?

Elle n'en avait aucune idée, mais Nina ne comptait pas perdre espoir. Car se plonger dans les ténèbres, c'est se perdre soi-même. Et ça, elle ne pourrait jamais se le permettre. Pour elle-même. Pour Taylor. Et surtout pour ses futurs petits.

Après un temps qui lui sembla interminable, Nina parvint enfin à atteindre son objectif : la cabane. Ses sens ne l'avait pas trompé. Il y avait bien une cabane en bois, au fin fond de cette forêt sombre et peu hospitalière.

Seulement Nina ne chercha pas à savoir le pourquoi du comment cette cabane c'était retrouvée là. Aujourd'hui cet habitat, plus que vétuste, allait sauver la vie de ses bébés et de la sienne. Et c'était bien plus qu'il n'en fallait pour qu'elle entame ses derniers pas afin de se réfugier à l'intérieur.

Poussant légèrement la porte en bois, elle entendit le grincement caractéristique de ce panneau mobile en bois de Terminalia.

Elle entra ensuite dans la cabane, et constata que celle-ci était inhabitée depuis un certain temps. À chaque pas qu'elle entreprenait, elle toussota face à la remontée de poussière qui lui vint au visage.

Seulement, elle tomba violement sur ses genoux lorsqu'une contraction, plus intense que celle vécu précédemment, la foudroya. Nina cria de surprise et se tint le ventre. Elle réprima un sanglot et se déplaça à quatre pattes vers ce qui lui sembla être une baignoire.

À la force de ses bras, elle se mit à genoux, et agrippa ses doigts sur le rebord en acrylique blanc. Sentant une masse faire son chemin vers son bas-ventre, Nina fit pousser ses griffes démoniaques et arracha d'un coup sec, le tissu de son pantalon.

Tout ce qui comptait était que ses enfants viennent au monde dans les meilleurs conditions possibles. Et malgré les circonstances, Nina ne comptait pas déroger à cette règle. Quand une nouvelle contraction se pointa, elle ne hurla pas.

Plus décidée que jamais, Nina ne le laissa pas envahir par la peur. Pas maintenant. Elle devait rester combattive et forte pour ses bébés. Si elle se laissait dévorée par ses doutes, cela pourrait lui nuire.

Instinctivement, Nina plaça une de ses mains entre ses deux jambes. Depuis le début de son travail, elle écoutait ce que son corps avait envie de lui dire. Elle poussait quand il avait envie de pousser, et arrêtait lorsqu'il le jugeait nécessaire.

Un temps interminable se passa, mais cette force inébranlable fut des plus salvatrice puisque la tête du premier bébé était sorti. Au fur et à mesure de ses efforts, Nina sentait que la première étape était bientôt terminée.

Elle n'eut cru pas si bien dire, lorsqu'elle vit son premier enfant glisser hors de son vagin. Sans aucun cri, Nina le rattrapa de sa main et le porta auprès d'elle. Le front en sueur, et les larmes coulant à foison, elle ne prit guère le temps de s'apitoyer sur son sort, lorsqu'elle croisa le regard obsidienne de son premier né.

« Ma petite princesse... » murmura-t-elle tout bas.

Un sourire délicat vint se figer au creux des lèvres de notre jeune maman. Le bébé se mit soudainement à pleurer et Nina rit maladroitement.

« Tu en as du coffre pour une si petite chose... » gloussa-t-elle délicatement.

Cependant, elle n'eut pas le temps d'admirer un peu plus sa fille que déjà, elle sentait son autre bébé être prêt à arriver dans ce monde.

Elle posa délicatement sa fille, qui continuait à pleurer, dans la baignoire, puis se prépara à attraper le deuxième bébé en route. Elle eut à peine le temps de placer ses mains, que l'enfant jumeau de sa fille sortit rapidement en glissant.

Nina le rattrapa in extremis, et le monta pour le caler contre elle. Un large sourire apparut sur ses lèvres quand elle croisa le regard ténébreux de son fils. Elle le cala dans un de ses bras et récupéra sa fille pour la caler avec l'autre bras. Désormais assise contre le sol poussiéreux en bois, Nina posa ses lèvres sur les fronts de ses bébés en pleurs.

« Bienvenue au monde mes trésors... » susurra-t-elle avec émotions.

« Tout ira bien désormais... »