chapitre 8

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Avec le sentiment d'avoir l'air d'un gigantesque imbécile, Nathaniel était assis sur une chaise, la tête penchée en avant pour stopper le saignement. La douleur s'en allait peu à peu : visiblement, son nez n'était pas cassé. Cela faisait un problème potentiel en moins. Lynn faisait les cent pas à ses côtés, mi-inquiète, mi-exaspérée. Elle s'arrêta soudainement pour lui faire face, les poings sur les hanches.

– C'est quoi ton problème ? lança-t-elle d'un ton sec. Tu te rends compte que tu peux vraiment être dans la merde, là ?

Nathaniel allait protester, mais il était trop faible pour le faire. Il se contenta de marmonner entre deux tapotements de nez à l'aide d'un morceau de coton.

– C'est lui qui a commencé ! Je me suis juste défendu !

Son amie leva les yeux au ciel et lâcha :

– On s'en fout de ça ! Tu peux finir en gardav', j'espère que tu le sais, ça ?

Le jeune homme mordilla sa lèvre inférieure avec nervosité. Il est vrai que, sur le coup, il n'y avait pas vraiment pensé... Mais c'était trop tentant. Cela faisait des années que la rage s'accumulait en lui et il fallait bien que ça sorte. OK, il l'avait fait violemment, mais au moins maintenant, il se sentait un peu mieux. Or, comme Lynn le disait, il pourrait en effet se retrouver chez les flics. La brune souffla bruyamment, puis vint s'agenouiller à côté de son meilleur ami. Elle posa la main sur son genou, dans un geste qui se voulait compatissant.

— Ecoute, Nath... En soi, je te comprends. Mais cette violence...

Elle marqua une pause, un peu indécise quant à la suite de sa phrase. La jeune fille eut l'air de reprendre courage puisqu'elle poursuivit.

– Cette violence, c'est pas toi. Je sais que t'as beaucoup intériorisé ces dernières années. Mais tu sais mieux que personne que c'est pas la solution pour résoudre ses problèmes...

Nathaniel resta silencieux pendant quelques instants. Il savait qu'elle avait raison. La violence, il l'avait subie, ça, c'est sûr. Sans broncher. Bien sagement. Parce qu'il avait appris à le faire. Mais voilà, aujourd'hui, il avait eu l'occasion de se venger de son père à travers le fait de frapper Castiel. Il faut dire que c'était un peu satisfaisant. Pour une fois, c'était lui qui prenait – plus ou moins – le dessus. Peut-être allait-on enfin le prendre au sérieux ? Peut-être que Castiel comprendra enfin qu'il est un adversaire de taille ? Si cela pouvait stopper le rouquin de lui gâcher les vacances, ce n'était peut-être pas une si mauvaise chose. Cependant, il ne pouvait s'empêcher de se demander s'il ne valait pas mieux que son père... Sur ces sombres pensées, Madame Delanay débarqua de nulle-part avec un Castiel étrangement calme. Ce qui était probablement plus inquiétant que s'il était encore hors de lui. Il tenait une poche de glaçons contre sa lèvre blessée, mais n'avait pas l'air gêné par quelconque douleur, ce qui contraria légèrement le délégué. L'arrivée de Delanay et du rebelle fit office de signal pour Lynn de s'en aller.

La professeure de physique-chimie avait visiblement aussi redescendu en pression puisque la colère ne froissait plus ses traits. Un silence gênant s'installa, silence pendant lequel elle s'assit sur une chaise libre de l'infirmerie. Elle se pinça l'arête du nez, puis après quelques instants de flottement, elle releva la tête.

-Les garçons, commença-t-elle d'une voix fatiguée. Je ne sais pas d'où vient votre rivalité et, très honnêtement, je m'en fiche. Mais là, ça a pris des proportions trop importantes. J'aurais déjà dû vous renvoyer chez vous à l'heure qu'il est. Mais j'ai une proposition à vous faire.

Les sourcils froncés, le blondinet la regarda d'un air confus. Ce n'était clairement pas dans les habitudes de Delanay de faire preuve de compassion. Peut-être que le fait d'être en vacances l'adoucissait ? Mais la connaissant bien, Nathaniel savait que cela cachait quelque chose. De son côté, Castiel affichait une expression d'ennui profond. Il semblait bien plus intéressé par le paysage nocturne visible par la fenêtre que par la conversation en cours. Nath serra les dents, se retenant de faire une remarque. Ce n'était clairement pas le moment. La professeure reprit la parole.

– Vous allez rentrer dans le monde des adultes, maintenant. Et il serait temps de grandir et de mettre vos différends de côté. Vous ne voulez pas gâcher les vacances de vos camarades, n'est-ce pas ?

Aucun des deux garçons ne répondit, faisant alors soupirer leur professeur.

-Monsieur Castiel, Monsieur Nathaniel, continua-t-elle. Je pense que vous savez que ce qu'il s'est passé pourrait très bien arriver aux oreilles de la police et que cela pourrait avoir des conséquences plus graves qu'une simple heure de colle. Je sais que j'ai pu être sévère, mais j'ai été votre professeur après tout. Je vous parle aujourd'hui en tant qu'humaine. Je veux donc vous laisser une chance.

La partie « arriver aux oreilles de la police » avait, semble-t-il, sorti Castiel de sa fascination soudaine pour ce qui se passait derrière la fenêtre. Nathaniel crut même apercevoir une lueur d'inquiétude dans le regard acier de son ennemi. Mais il fallait bien admettre que lui-même que ses propres yeux devaient afficher la même émotion. Alors qu'il analysait le visage du rouquin, Madame Delanay cracha enfin sa valda.

– Deux choix s'offrent à vous. Soit je préviens Sylvia qui, la connaissant, se fera un plaisir d'appeler la police pour trouble à l'ordre public, soit vous acceptez de partager une tente pendant ces trois semaines. Vous n'êtes plus des enfants et je considère qu'il est encore possible d'apaiser les tensions. Je vais vous laisser en discuter ensemble et je serai de retour dans quinze minutes. Au moindre cri, au moindre son qui pourrait laisser penser que vous vous battez de nouveau, vous savez ce que vous risquez.

Sur cette annonce qui sonnait plus comme une menace que comme un marché, elle se leva et quitta l'infirmerie pour laisser derrière elle un Nathaniel et un Castiel complètement abasourdis.

le dernier été - a castaniel fanfictionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant