Introduction

13 1 0
                                    

 Il existe autant de légendes que de mondes capables de les générer. L'une d'elles parlerait d'une Strate située dans un coin encore inconnu de l'Unistrate. L'ORDRE n'était alors qu'une entité prenant tout juste pied dans ce vaste réseau, et elle devait encore tellement apprendre avant de devenir le gardien impitoyable que l'on connaît maintenant. D'après la légende, il s'agirait d'une Strate née de la volonté même de l'Imagination. Ce serait même celle sur laquelle le Primordial menait ses tests du temps où lui, Vitae et Temps tentaient de se mettre en commun pour libérer le plein potentiel de cette unification. Autant vous dire que le Primordial ne souhaitait sans doute pas qu'elle tombe ou disparaisse aussi facilement qu'un mot écrit sur une feuille volante à l'encre qui n'aurait pas fini de sécher.

Vous concentrer, penser à autre chose, ce n'est pas le moment.

Sur ce monde étrange, le végétal et le métal furent intimement liés dès le début. De nombreuses races animales de toutes formes et espèces végétales de toutes les couleurs foulèrent lentement ce sol aux vastes forêts trouées de temps en temps par une clairière. D'imposants arbres aux larges troncs, des branches composées de minuscules bulbes aux couleurs clignotantes, des lianes et des racines connectaient ce monde. Des animaux et insectes s'occupaient d'entretenir cette machinerie hors norme. Si discrets qu'on ne pouvait les apercevoir que du coin de l'œil. Des champignons de taille humaine laissaient échapper une bioluminescence de leurs chapeaux, une lumière assez forte pour permettre de voir où on posait les pieds lorsque la nuit prenait ses quartiers.

C'est dans ce décor aussi fascinant que dérangeant que des créatures bien plus étranges apparurent. Là, aux côtés d'un arbre encore plus haut que les autres. Son écorce était si rugueuse et épaisse que l'on aurait dit du bois fossilisé. Sa hauteur semblait se perdre dans le ciel tandis que ses frondaisons luisaient d'un intense éclat jaune variant au gré de la journée. Au début, ce n'était qu'une simple plaque composite au cœur de laquelle était incrusté un bourgeon duquel pulsait une lumière bleutée. Puis, alors que le temps continuait son avancée et se déployait sur l'ensemble de l'Unistrate, qu'ailleurs une enfant à manteau rouge et son créateur créaient de leur côté, le bourgeon grandissait. La plaque se complexifia, et des filaments de bioplastique s'enroulèrent en une longue gaine pour créer un vaste réseau encore connecté au sol.

Coupez cet espace mémoriel, EMV sollicitée inutilement.

Perte de concentration.

Concentrez-vous.

Le bourgeon devint un énorme cocon de câbles, de lierre, de racines et de lumière. Il n'était pas le seul, d'autres émergèrent, tous suivant le même procédé, tous autour de cet arbre dont les branches grossissaient toujours plus pour finir par pointer vers le sol et se connecter aux cocons. Ce qui devait devenir la première génération des Lumérys finit par émerger. Des cocons percèrent deux pointes métalliques acérées qui s'ouvrirent en une paire d'ailes aux membranes translucides incrustées de LED. D'un geste vif, les ailes taillèrent dans le cocon, une intense lumière s'en échappa et, dans une explosion de fluide verdâtre, les premiers Lumérys sortirent du berceau. Une tête sans visage, des cheveux colorés ou entièrement composés de câbles, des bras et des jambes à la peau lisse, aux fins sillons lumineux.

Treize femelles aux ailes de libellules et treize mâles aux ailes en nid d'abeille, trois enfants femelles et trois enfants mâles aux cheveux et teint bleutés, quatre adolescents mâles aux ailes orange irisé, quatre adolescentes aux yeux vert électrique, et un dernier aux contours indéfinis et d'une étrange forme, à la peau d'un gris métallique. En tout, quarante-deux Lumérys foulèrent le sol de Cythéria. Créatures unies sous un lien privilégié avec le métal et le végétal. Un lien qui ne cessera de se renforcer au point qu'ils seront les seuls à pouvoir associer autant l'organique avec la technologie. Une symbiose unique, parfaite.

La Lumière du SangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant