Le dîner se fit dans le silence le plus total. On m'annonça seulement que je devais me préparer car on me présenterait aux villageois ce soir. J'enfilai un pull fin pour me protéger de la brise du soir et un pantalon. Je laissai mes cheveux, encore ébouriffés et par endroit collés par du sang, dégringoler dans mon dos.
La musique qui se jouait sur la place me berçait tendrement alors que je m'appuyai sur le rebord de ma fenêtre. Ce soir j'avais annoncé dormir dans ma chambre d'enfant et non dans celle de mes parents, ce à quoi personne n'avait émis d'objection. Je contemplais le jardin à l'arrière de la maison, depuis cette pièce, je ne pouvais en voir qu'un petit morceau, mais il me paraissait indompté. Autrefois, c'était ma mère qui s'en occupait, elle s'en servait pour m'apprendre les bienfaits des plantes. Je détestais ses leçons mais à présent je savais qu'elles pouvaient servir. Trisna entra sans toquer et s'approcha.
"Tu es prête, me demanda-t-elle en venant poser son menton sur mon épaule.
- Oui, soufflai-je en appuyant ma joue contre son front."
Elle sourit dans mon cou avant de soupirer longuement.
"Que se passe-t-il?
- Rien, j'ai juste eu très peur de te perdre aujourd'hui."
Je ne répondis pas.
"Erove nous a raconté ce qu'il s'est passé là-bas, murmura-t-elle comme si elle avait peur que ses mots puissent me renvoyer à ce moment. Je te promets qu'elle le paiera ma douce."
Je me retournai vers elle, ce qui la surprit.
"J'aimerais plutôt une autre promesse.
- Tout ce que tu veux, me dit-elle en attrapant délicatement mes mains.
- Ce matin, quand ce soldat était sur moi et que je me débattais pour ne pas retourner au palais, j'ai réalisé que je préférais la mort à cet enfer."
Elle me regarda tristement, elle avait compris.
"Alors je t'en supplie, si ce genre d'incident se reproduit et que nous ne sommes pas en capacité de me protéger, ne les laisse pas m'emmener.
- Tu me demandes de te tuer pour éviter de retourner au palais, bafouilla-t-elle.
- Oui, je préfère mourir de ta main que de la sienne."
Elle me regarda en silence pendant un instant, comme si elle jaugeait la femme que je devenais en dehors du palais.
"D'accord, fit-elle en se redressant. Si on doit en arriver là alors je le ferai, mais si je dois être celle qui t'ôte la vie, je veux que tu me promettes, toi aussi, de ne pas laisser cet homme me prendre en vie."
Elle me tendit la main, pour marquer ce pacte si secret et si précieux, que je serrai avec la même volonté qu'elle. Je ne m'attendais pas à ce qu'elle comprenne si facilement et encore moins qu'elle me demande la même chose, mais quand je la regardais, je comprenais pourquoi. C'était une femme remplie de dignité et d'honneur, et elle comptait bien garder ces deux attributs jusqu'à sa mort. Elle me sourit tendrement.
"Nous devrions y aller avant qu'Erove et Estephan encastrent Elari dans la fontaine.'
Je pouffai et attrapai mon arme avant de me diriger vers la porte.
"Tu sais que tu n'en as pas besoin, on est là ce soir, me lança-t-elle en fixant ma dague.
- Je sais, c'est juste au cas où on soit séparés, ou qu'il y ai d'autres soldats, enfin tu vois quoi.
- Oui, fit-elle tristement, mieux vaut être prudent pendant quelque temps."
Je lui souris et nous sortîmes. La fête avait déjà commencé et les gens dansaient déjà. Trisna attrapa deux verres sur l'une des grandes tables qui avaient été sorties et couvertes de nourriture. Elle m'en tendit un.
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Au Prix De La Liberté
AventureNivna doit vivre avec Alistor, l'homme qui a décimé sa famille. Mais la rébellion qui enflamme le pays en a décidé autrement. Choisira-t-elle de rester esclave ou la voix de la liberté ?