Ça y était. Les championnats du monde sont demain. Mais je n'ai pas peur. Je me suis battue pour participer à ce tournoi. Mais avant ça... c'est parti pour deux heures de français. Sentez, s'il vous plaît, le désespoir dans ma pensée.
La prof était en train de nous expliquer un truc hyper important quand l'alarme incendie se mit à retentir. Vu la mine effarée de la prof, ce n'était pas un exercice. Les filles les plus idiotes de ma classe se mirent à crier et à courir partout.
Le brouhaha qui naquit ensuite me fit mal à la tête. J'écartai ma frange et me massai les tempes. Mes bracelets anti-magie tintèrent quand j'utilisai ma magie pour faire disparaître la douleur.
La prof hurla à tout le monde de se calmer et nous demanda de sortir.
- Madame, s'exclama un élève que je ne connaissais même pas. Si le feu se propage par cet escalier, on risque d'être pris au piège ! On pourrait mourir brûlés vifs !
- Ne dis pas de bêtises, Oscar ! Premièrement, le feu vient du self, à l'autre bout du campus, et deuxièmement, je ne vous ferai pas prendre de risque. Nous nous serions calfeutrés. Maintenant, sortez tous et dirigez-vous à votre emplacement dans la cour !
Nous nous exécutâmes bien gentiment. J'allais sortir, mais Mathieu me retint par le col et me tira en arrière. Son groupe passa devant moi et Gauthier me regarda avec un regard meurtrier.
- Dégage, minus. Tu serais la première à mourir s'il le fallait. Tu ne manquerais à personne sauf à ce stupide Adrian Nighthole. Franchement, comment peux-tu avoir ne serait-ce qu'un seul ami ? Tu es un déchet de la planète. Non mais regarde-toi ! Tu es l'allégorie de la faiblesse.
Mes poings étaient tellement serrés que mes ongles transpercèrent ma paume. Du sang s'écoula des coupures, mais je n'en fis pas cas. Mes yeux se remplirent de larmes artificielles et je mordis ma lèvre inférieure.
Klain lâcha un "tch" dédaigneux et me regarda avec dégoût. Kyo coula un regard froid sur moi et j'eus l'impression d'être pétrifiée. Comme si mon énergie était sapée par ce seul regard.
La haine que j'éprouvais était telle que mes bracelets vrombissaient et que mon tatouage royal me brûlait. Je pris une grande inspiration et regardai ce type dans les yeux, le menton légèrement relevé. Je lui adressai un sourire carnassier avant de détourner le regard. Je gloussai.
Nous descendîmes les escaliers avec une tranquillité étonnante, malgré la panique ambiante. Nous nous rassemblâmes rapidement dans la cour, obéissant aux ordres de la prof. La classe d'Adrian nous suivit car elle était la lettre d'après dans l'alphabet.
J'agitai la main pour qu'Adrian vienne, mais ses yeux s'écarquillèrent.
- Arcanne ! Qu'est-ce que tu t'es fait à la main ? Tu saignes, bon sang ! Quand est-ce que tu arrêteras d'en faire qu'à ta tête ?
Un grondement jaillit de ma gorge. Pourquoi se permet-il de me faire la morale ?
- Arrête de me faire la morale ! Ils ont encore osé t'insulter. Excuse-moi de vouloir te défendre. Je refuse de rester inutile. Moi, je me contiens au moins ! Je ne leur saute pas à la gorge pour un rien.
La culpabilité sembla alors le ronger. D'un coup, je regrettai mes paroles.
- Adrian... je...
- Non, c'est bon. J'ai compris. Tu ne veux plus subir. Fais ce que tu veux.
Il retourna dans son rang et je le regardai partir.
Une immense colonne de fumée noire s'éleva du self, et grâce à mon ouïe très développée, j'entendis les sirènes des pompiers au loin. Les flammes rouges et or léchaient la façade du bâtiment noirci de suie.
Soudain, sans aucun élément déclencheur, mon tatouage me brûla d'une manière très différente de d'habitude et mon buste irradia de douleur. Ma respiration se coupa et je me pliai en deux.
Une colonne pourpre déchira le ciel, déversant une lumière violacée sur la cour. Elle se posa lourdement au milieu de la place, entre toutes les classes. Des silhouettes jaillirent de l'ombre, leurs cris perçant l'air comme des lames aiguisées.
La douleur, vive et lancinante, brouillait ma vue et m'emplissait d'une terreur glaciale. Chaque hurlement, chaque mouvement des silhouettes semblait résonner comme un coup de fouet, me tirant encore plus profondément dans un abîme de désarroi.
Mes bracelets éclatèrent soudain et j'utilisai un sort qui restreint le pouvoir qui semblait vouloir dévaster l'endroit. Les silhouettes furent enfin parfaitement discernables et je tombai dans un choc profond.
Les personnes étaient dotées de grandes ailes membraneuses. Elles portaient des cuirasses à écailles avec des reflets holographiques. Deux fourreaux dans lesquels étaient rangées de grandes épées s'entrecroisaient dans leur dos. Ce furent tous des hommes et une ombre familière se dessina clairement dans le tas de dix personnes.
Azariel. Ce sont des soldats de Karmis.
L'homme le plus armé cria des ordres et les différents soldats se séparèrent pour approcher des classes apeurées. Heureusement, notre classe fut épargnée.
Au total, quatorze élèves furent pris en otage par les soldats. Je pensais qu'ils allaient arrêter là, mais la réalité fut différent.
Le chef des soldats fixa Azariel avec une détermination glaciale.
- Ces deux élèves ont l'air prometteurs. Emmène-les ! ordonna-t-il.
Azariel pâlit, son visage marqué par une profonde inquiétude. Il hésita un instant, scrutant les visages effrayés autour de lui. Ses yeux se posèrent sur moi puis sur quelqu'un à ma droite, une expression de regret sincère se dessinant sur ses traits. Il semblait partagé entre la terreur et le devoir, incapable de cacher sa détresse face à cet ordre impitoyable.
Il s'envola et fonça droit sur nous. Il me lança un regard franchement désolé et m'attrapa par le bras. Je poussai un cri réellement apeuré et me débattis. Ma vision était brouillée et je ne voyais pas distinctement le deuxième otage, mais avec cette chevelure noire, pas de doute, c'était Kyo.
Il se débattit comme un forcené et Azariel tomba au sol, déséquilibré. Je vis alors Adrian surgir dans mon champ de vision.
Il attrapa les ailes d'Azariel, son point faible, et l'immobilisa pour me permettre de fuir.
- Je ne te laisserai pas l'emmener, murmura-t-il d'une voix sourde, si basse que je l'entendis à peine. Emporte l'autre si tu veux, mais pas Arcanne. Azariel, je ne rigole pas. Que comptez-vous lui faire ?
- Adrian... je n'ai pas le choix. Si je n'obéis pas, ils tuent tout le monde.
Je regardai autour de moi, hébétée. Les autres soldats se rapprochèrent et encerclèrent le duo. Deux des hommes immobilisèrent Adrian et libérèrent Azariel. Les autres m'agrippèrent le col ainsi que celui de Kyo à mes côtés. Il regarda Azariel, horrifié, et un des soldats sortit son épée de son fourreau et la plaqua contre la gorge de mon ami roux.
Je m'appuyai sur mes jambes tremblantes, essayant de me redresser malgré la douleur lancinante. D'un élan désespéré, je tentai de foncer vers Adrian, mes mains encore tremblantes.
- Tu fais ne serait-ce qu'un seul mouvement, gamine, railla le soldat, et je lui tranche la gorge.
Rien qu'en me relevant, il avait appuyé sa lame et un mince filet de sang coulait du cou d'Adrian.
J'avais envie de bondir, de tous les tuer. Mais je me trouvais en position de faiblesse. Adrian avait une lame sur la gorge, les neuf autres soldats et les otages.
- Si je me rassois, lâchai-je, vous enlevez cette lame de la gorge de mon ami et vous le laissez partir dans son rang. C'est clair ?
Mon tatouage se mit à vrombir, et à ma stupeur, le soldat lâcha Adrian et le poussa vers son rang.
Je me sentis défaillir au moment où une douleur inconnue enflamma ma nuque. Je ne vis que le regard d'Azariel au-dessus de moi, le bras levé et une détresse nappant ses yeux verts.
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Dans les limbes...
RomanceJ'avais toujours réussi à conserver un minimum d'anonymat. Malheureusement, après dix-huit ans d'existence, il fallait bien que ça dérape. Après des coups d'éclat répétitifs et une prise d'otage qui tourne mal, mon secret est au bord de la révélatio...