Chapitre 4

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Je n'ai jamais aimé les décisions que j'ai prises au cours de ma vie, en particulier quand j'ai renvoyé Azariel à Karmis. Aujourd'hui, mon attitude me hantait. J'avais tellement honte.

J'aurais pu vivre ma vie sans aller à l'école, me concentrer sur mon développement personnel. Mais je n'aurais jamais connu Adrian, ni les joies du harcèlement. Je ne voyais pas l'intérêt de m'en plaindre, dans mon cas. Disons que je me trouvais assez forte pour survivre, passer outre. C'était comme de la torture mentale. Ça me fortifiait.

Cependant, je n'imaginais pas ma vie autrement. J'avais été en détresse et malheureuse une grande partie de ma vie. Parfois, j'éprouvais de la satisfaction pour mon travail ou un loisir, mais c'était tellement rare que je ne prenais pas conscience de cette satisfaction.

Les rencontres que je faisais étaient incroyables. Adrian avait été à lui tout seul un tournant dans ma vie. Le badminton aussi. Quand je jouais, j'étais apaisée.

Cette nuit-là, j'avais très mal dormi. Les cauchemars de mon coup d'éclat de la veille ne me lâchaient pas. Je n'avais pas particulièrement d'appréhension pour le lendemain, dans la mesure où c'était mon quotidien.

Mais quand j'avais commencé à armer mon bras pour frapper, mon tatouage royal s'était mis à crépiter, à me brûler même. Comme s'il était vivant, ou qu'il voulait me faire passer un message.

Ce n'était pas la première fois que ça m'arrivait. Mais la dernière fois que ça s'était passé, c'était quand il était apparu. Et qu'Azariel était encore là.

Les larmes me montaient aux yeux, mais je valais mieux que ça. Je me levai et retrouvai Adrian en train de regarder un épisode de sa série. Il avait sa cuillère remplie de céréales en suspension devant la bouche, captivé par la télé.

Je m'approchai doucement et fis léviter sa cuillère jusqu'à ma bouche. En faisant glisser les céréales sur ma langue, je ne pus m'empêcher de lâcher un soupir de contentement.

- Arcanne Athénaïe Hécate Leycris, je te promets que si tu ne reposes pas cette cuillère dans mon bol, je t'égorge.

Malgré mes aptitudes au combat, je ne pus éviter son regard quand il désigna le couteau posé à côté de lui. Un frisson parcourut mon échine. Il savait se battre aussi bien que moi, mais avec un couteau...

Sans que je m'en aperçoive, il saisit le manche à deux doigts et le lança dans ma direction. La lame effleura mon oreille avec un sifflement sinistre, laissant une légère entaille sur mon cartilage.

Il n'avait pas quitté l'écran des yeux, et le couteau était fiché profondément dans le panneau de bois derrière moi.

Annie et Charles avaient jadis décidé de nous apprendre à nous défendre en cas de nécessité, mais nous avions poussé l'entraînement un peu loin. S'il avait été tueur à gages ou assassin, ses compétences auraient été similaires.

Adrian lançait les couteaux aussi bien que je tirais avec mon Barret. Parfois, nos disputes en venaient aux mains, et c'était souvent violent. Quand on se battait, c'était pour de vrai, pour se faire mal, mais cette méthode avait l'avantage de nous calmer.

En représailles de ma coupure, je gelai son bol de lait, et il se jeta sur moi. J'évitai son assaut en bondissant de côté, mais il attrapa ma cheville. À terre, je lui fis un geste obscène et il éclata d'un rire sans joie.

- Dégèle mes céréales ! Arcanne, je te jure que si tu ne dégèles pas mon bol, je te smasherai dessus toute la soirée. Même hors match, sinon ce n'est pas drôle.

Je dégèlai son bol, mais l'engloutis à sa place. Et je m'enfuis en trottinant. Ce genre de scène de ménage arrivait souvent, mais ça me détendait.

Dans les limbes...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant