Chapitre 3 - Retour à la réalité

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Paris, 23 mai. Hôtel de Matignon.

8h -  Je lis et relis toutes mes notes. J'ai besoin d'être à la hauteur des attentes de tous les Français. Et même plus, tous les Européens. Il reste 10h avant le débat, mais je suis déjà mis à la page avec Valérie. Elle veut que tout soit parfait.

Jordan Bardella, Président du Rassemblement National, p'tit recrue de Le Pen. Encore un mec qu'elle considère comme un bout de viande, juste pour avoir le pouvoir. Je le plains. Mais je le connaissais déjà, bon nombre de débats que j'ai déjà eus avec.

Je prend le temps de me préparer calmement, je me regarde dans un miroir, un sourire en coin. C'est parti.

Il est 17h40 quand j'arrive dans les locaux de France 2, les caméras braquées sur moi. Je fais un signe de tête au monde, je serre la main aux gens plus importants. La sécurité m'accompagne jusque dans ma loge en attendant d'être conduit sur le plateau.

Dans la loge, je fis une télé qui retranscrit l'émission en direct. Je vois donc arriver Jordan Bardella, mon adversaire, mon rival, celui que je devais discréditer absolument ce soir. Je le vois vêtu de son costar bleu et de son arrogance, ce sourire que je déteste, enfin, surtout quand il le pointe vers moi durant nos débats.

17h55 - On vient me chercher, direction le plateau. J'essuie mes mains moites sur mon pantalon, du moins ce que je peux, parce que aussitôt fait, je me retrouve de nouveau avec les mains trempées.

J'arrive et mon adversaire est déjà là. Je m'approche du présentateur, lui serrant la main avec un signe de tête "Bonjour, vous allez bien ?" Dit-il. Je hoche simplement la tête avec un semblant de sourire.

Je m'approche du bout de viande, qui lui aussi à l'air plutôt anxieux. Je lui serre la main avec un sourire.

"Salut." Lança t-il. Je ne répond pas.

"Monsieur le Premier Ministre Gabriel Attal, Mr. Bardella, bonsoir, merci d'avoir répondu présent à ce débat."

"Bonsoir Charles, bonsoir monsieur le Premier ministre."

Je hoche simplement la tête avec un léger sourire narquois, puis je regarde le présentateur "Bonsoir Charles."

Je vois un sourire s'écrire sur le visage de Jordan Bardella, sûrement le même sourire narquois que le miens. Un point commun, alors.

Le débat commença aussitôt, le présentateur ne perd pas de temps avec ses questions, où je ne manque pas de répondre avec franchise et détermination afin d'avoir l'avantage sur mon adversaire.

Et, étonnamment, je me sens plus léger que ce que je pensais, j'arrive à répondre sans problème, je fais attention à mon rival qui essaie tant bien que mal de me déconcentrer avec petits piques pertinents.

Viennent les questions que je redoute le plus, sur l'immigration. C'est assez tendu de parler de cela avec un parti qui n'accepte pas que nous accueillons des personnes dits "étrangères".

"Mr. Bardella, que comptez-vous faire par rapport à la hausse de l'immigration en France ?" Lance le présentateur.

"Écoutez, Charles, nous sommes actuellement dans une impasse, je veux bien reconnaître que l'immigration fait partie intégrante de notre si beau pays, mais en même temps, cela nous empêche de nous consacrer sur ce qui compte réellement : les Français. Plus il y aura de l'immigration, plus nous allons devoir dépenser de l'argent, il faut les loger, les nourrir, leur trouver un travail... assurer leur sécurité. N'avons-nous pas assez d'insécurité comme cela à gérer actuellement ?"

Tout ce qu'il disait était vrai, pourtant, je suis dans un parti où nous favorisons l'entrée de l'immigration pour permettre au pays de se développer et montrer au monde entier de quoi nous sommes capables.

Je ne pouvais pas nier qu'il avait beaucoup d'assurance quand il répondait aux questions posées, un peu moins quand nous devions débattre, il tient ça de son mentor, Le Pen. "C'est faux." "Non, Mr. Attal." Sans cesse, c'était essentiellement ces mots qu'il répétés.

Lorsque le débat fut terminé, je m'empressai de filer vers la loge récupérer mes affaires, en sortant du plateau je fus juste le temps de regarder mon adversaire en fronçant les sourcils, le débat, qu'il dure une ou trois heures, ça reste très court et donc frustrant.

"C'est court, mais on se reverra." Lui lançais-je.

"Je pense, oui." Me répondit-il.

Puis, nous répartons chacun de notre côté, Valérie m'attendait déjà, surexcitée. Je n'avais qu'une hâte c'était de rentrer chez moi, de prendre une bonne douche bien chaude et de m'affaler dans mon canapé avec un verre de whisky.

"On se fait un p'tit apéro, n'oublie pas ! Chez toi ou chez moi ?"

Purée. J'avais complètement oublié ce détail. Ce n'est pas que je n'avais pas envie de profiter d'un bon verre avec Val, mais je suis crevé. N'empêche que je lui ai dit qu'on se ferait ça sûrement après le débat. C'est sans doute pour ça qu'elle a l'air d'être de super forme...

"Je préférerais chez moi." Lui dis-je.

Nous prenions aussitôt la route et nous faisons un saut chez elle histoire qu'elle laisse toutes ses paperasses, qu'elle prenne deux trois bricoles, et c'est parti. J'avais déjà de quoi faire un apéro dans mon frigo et mes placards. Heureusement, j'étais trop crevé pour aller acheter quoi que ce soit.

On se pose alors dans le canapé, Valérie fait partie des rares femmes qui aiment le whisky. Pour le coup elle n'est pas compliqué, puis elle commence à me féliciter pour ce débat que j'ai mener avec acharnement.

"C'était incroyable, Gab."

"Merci... Mais je reste perplexe. "

Les résultats sont dans quelques jours, je sens la boule au ventre qui s'intensifie un peu plus chaque jours...

"Tu l'as défoncé. Il ne savait même plus quoi répondre à la fin, tu l'as discrédité à fond. Marine aurait dû choisir un meilleur toutou, clairement."

"Oui, bon, il n'était pas si mal non plus. Franchement, pour son âge et le peu qu'il ait vécu dans la politique, il s'en est très bien sorti."

Je la vois me regarder d'un autre œil, mais elle ne répond pas à ce que je dis.

"Mmmh, je suis contente de me retrouver avec toi ce soir, un peu de tranquillité, j'attendais que ça."

"Oui, tu as raison."

Je n'en pense pas un mot sur le moment, trois mots résonnent comme des tambours dans ma tête - JE VEUX DORMIR.

Elle se rapproche un peu plus de moi, tentant un contact avec sa jambe gauche et ma jambe droite. Elle essaie de faire en sorte qu'elles se touchent, la sensation de son collant couleur chair sur mon smoking est assez étrange mais pas désagréable. Cependant, cette attitude ne me plaît pas du tout. Qu'est-ce qu'il lui prend ?

Éperdument - BARDELLA X ATTALOù les histoires vivent. Découvrez maintenant