Chapitre 1 - Matinée compliquée

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Paris, 20 mai 2024.

*soupire* - Pourquoi lui ai-je donné une clé de mon appartement, déjà ?

Comme à son habitude, elle s'assure que je sois levé et prêt à 7h30 tapante. Valérie est vraiment protectrice avec moi, mais j'avoue que, parfois, j'aimerais qu'elle me lâche les baskets. Le seul avantage que je tire de tout cela, c'est que ce n'est pas moi qui paie le petit déjeuner.

Aujourd'hui est un jour comme les autres finalement, "où allons-nous déjà ?" lui demandais-je.

"Ah ! Tu vois pourquoi tu as besoin de moi !" s'écria-t-elle. "Tu n'es jamais en mesure de te souvenir de la prochaine destination de cette campagne, Gabjbeig." Répliqua-t-elle, la bouche à moitié pleine du délicieux croissant encore chaud qu'elle a déniché dans la boulangerie du coin. Incroyable croissant cependant.

"C'est quoi cette musique que j'entends ? Gab, ne me dis pas que tu étais encore en train de jouer à FIFA ? Tu as dormi ? Purée. Tu ne prends pas cette campagne au sérieux."

"Alors... oui... bon... j'ai joué... une heure ou deux... ou peut-être trois. Je ne sais plus."

"Si tu ne fais pas attention, dans quelque temps tu auras des cernes tellement grosses que tu ne pourras plus profiter du p'tit déj mon poulet."

Je la regarde un instant, sans répondre, mais je n'en pense pas moins. *N'ai-je pas le droit de m'amuser un peu ? Sérieusement ? En plus, j'ai gagné tous les matchs que j'ai joués. Elle ne sait pas ce que c'est de devoir gérer une équipe entière ou quoi ?*

"Bref. Passons. Aujourd'hui, nous allons à Marseille ! Il va faire chaud, j'espère qu'on aura le time de se faire une petite glace t'en penses quoi ?"

*Hahaha, il n'y a pas que la glace que j'aimerais avoir en bouche.*

"Euh... Ouaip. Grave. On verra comment se déroule la journée, déjà. C'est bientôt la fin de la campagne d'ailleurs, je pense qu'on s'en est bien sorti. Non ?" Répliquais-je.

"Sans déc Gab ? Tu es vraiment le roi pour plomber l'ambiance. On en a déjà parlé, mais puisque tu préfères jouer, tu n'y prêtes pas réellement attention. La campagne a été compliquée, les Français se sentent de plus en plus délaissés par leur gouvernement. Alors pour obtenir des votes au niveau européen, c'est dur. Très dur... Mmmh."

"Désolée... Je suis super attentif au contraire, mais je...

Je n'ai pas eu le temps de finir ma phrase, qu'elle continua aussitôt avec d'autres réflexions.

"Gab... Je t'adore tu sais... Beaucoup... T'es notre petit chouchou, mais ces dernières semaines, j'ai l'impression que tu  t'égares et que tu perds les pédales. Je te le dis parce qu'à l'Élysée, tu sais comment ils sont. Alors à l'Assemblée, n'en parlons même pas. Beaucoup se demandent encore comment Manu* a pu t'élire, toi, plutôt qu'un autre. Alors j'aimerais que tu te reprennes, que tu fasses un effort, et que tu t'investisses à 3000%, parce que je suis seule à faire tout le boulot." 

*Mais qui elle est, celle-là ? La blagounette qu'elle me fait. Moi je ne suis pas investi ? Tiens tiens. Des bruits qui courent, tu m'étonnes ! C'est pas moi qui se tape une grande figure française.

Garde ça pour toi Gab... Tais-toi... Et acquiesce.*

"Désolé, Val. Tu as raison. Je suis un peu à côté de la plaque ces derniers temps, je pense beaucoup à mon avenir, à mon job, et si nous perdions ces élections ?"

"Je comprends tout à fait et je serai toujours derrière toi pour te soutenir, tu nous as beaucoup surpris, Manu et moi, ainsi que plein d'autres, mais il va falloir continuer à faire tes preuves."

... Un silence bruyant résonna dans mon salon. Je ne sais pas si je dois répondre.

"Alex est là ! Il est temps d'y aller, ne perdons pas de temps si nous voulions avoir notre train. Une longue route nous attend. Aller, ça va aller"

Alex, c'était son chauffeur privé. Un beau gosse, châtain, mâchoire carrée, tout ce que j'aime... Des fois j'aimerais bien en faire mon casse-croûte.

Je prends ma pochette, mon portefeuille et mes clés, et c'est parti. On va où déjà ?

Je ne peux pas lui donner tort sur tout ce qu'elle me reproche, c'est la seule qui a donné corps et âme pour cette campagne, pour que nous réussissions. Malheureusement, ces derniers temps je me sens beaucoup fatigué, j'ai besoin de me détendre, j'ai hâte que tout cela soit fini, et que je reprenne ma vie à peu près normale de Premier ministre. Ça reste tout de même beaucoup de travail... Mais je garde la tête haute.

*Manu = Emmanuel Macron

Éperdument - BARDELLA X ATTALOù les histoires vivent. Découvrez maintenant