Chapitre 26 - Jessica

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12e jour de thérapie

— Que s'est-il passé quand tu es rentrée chez toi ?

— Pas grand chose, à vrai dire.


En arrivant à la maison, mes parents m'ont immédiatement pris dans leurs bras, sans même me poser la moindre question. Il y avait de l'inquiétude dans leur regard. Sûrement la peur que mes pensées noires ne me reviennent. Malheureusement pour eux, elles étaient bel et bien de retour.

J'ai éclaté en sanglots.

J'ai voulu partir, et ils ne m'ont pas retenue.

Je me suis laissée tomber dans mon lit, les yeux posés sur mon mur scintillant d'étoiles. Mais je ne les ai pas vues. Ce qui a retenu mon attention, c'était ce cœur. Abigail m'avait menti. Elle m'avait fait croire qu'elle tenait à moi.

Je n'ai même pas réussi à dessiner une nouvelle étoile, car je pensais que c'était la fin. Que je ne pourrais jamais m'en remettre.

Ses mots résonnaient en boucle dans ma tête. J'étais incapable de penser à autre chose. Je m'en suis voulue d'avoir pu penser que notre relation était unique et spéciale. Et surtout, qu'elle était à double sens. Il n'y avait que moi qui ressentait ces papillons tourbillonnant dans mon estomac. Le réaliser m'a profondément blessée.

Malgré tout, je n'avais pas oublié ces marques sur son ventre, et j'avais peur qu'il ne s'en prenne à nouveau à elle.


Au lycée, tout le monde m'a regardée. J'étais l'objet de commentaires - voulus discrets - et de regards insistants. Mais je l'avais toujours été. Alors une fois de plus ou de moins, cela m'était égal. Ce qui me préoccupait, c'était Jake. Pendant que je traversais le couloir, je ne me suis demandée qu'une seule chose : quand est-ce que Jake allait venir me tuer ?

Eh bien, il n'est jamais venu. Abigail non plus, d'ailleurs. Ils avaient tous les deux disparus, du moins pour une journée. Évidemment, j'ai d'abord été soulagée. Puis j'ai été prise d'inquiétude, comme toutes les minutes qui me séparaient d'elle.

Mes amis m'ont demandé ce qu'il m'était arrivé, pourquoi est-ce que j'avais fait ça à Jake, et qu'il allait, je cite, me le faire payer de toutes ses forces, jusqu'à ce que je ne puisse plus bouger, mais il s'arrêtera avant que je ne puisse plus respirer pour ne pas avoir un meurtre sur le dos. Et honnêtement, je n'ai pas pu leur répondre. J'étais encore en colère. Contre Jake. Contre Abigail. Contre moi.

Alors j'ai décrété que ce n'était pas une bonne journée pour rester au lycée. J'étais simplement épuisée. Je n'avais pas récupéré mes forces, car je n'avais pas fermé l'œil de la nuit.


Ce que j'ai fait, j'ai rejoint le parc, notre parc. Enfin plus vraiment le nôtre. Celui qui... Bref. Le parc. Pourquoi ? Je n'avais sans doute pas assez pleuré et j'aimais me faire souffrir.

De là où j'étais assise, je pouvais voir nos deux fenêtres collées l'une à l'autre. Je me suis demandée ce qu'Abigail faisait, si elle aussi, elle pensait à moi, même si je savais que ce n'était pas le cas.

Le parc était bien plus rempli que lors de notre escapade nocturne. Il y avait des enfants, beaucoup d'enfants, beaucoup beaucoup d'enfants. Ils jouaient, rigolaient, hurlaient. Je nous ai revues toutes les deux, sur cette balançoire.

Je me suis perdue dans mes pensées, à ressasser ce qu'il s'était passé. Enfaite, je n'avais que cela en tête. J'étais comme obnubilée par elle.

Je regardais les enfants courir les uns après les autres, et se faire disputer par leurs parents dès qu'ils osaient venir les embêter. Je me suis surprise à sourire devant tant d'innocence. Eux n'ont pas encore connu le sentiment d'avoir le cœur brisé.

MeurtrieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant