Chapitre 3

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À la fin de son cours, Roxane ramassa ses affaires, enfila son sac à dos, prit sa béquille et sortit de la salle. Comme chaque midi, elle alla rejoindre Eva et Gabriel au restaurant étudiant. Traversant la place centrale du campus, elle sentit le soleil d'octobre réchauffer agréablement son visage. Elle prit une profonde inspiration, appréciant la rare sensation de confort que cela lui apportait.

Se rapprochant du bâtiment, elle aperçut Eva et Gabriel et alla se ranger à leurs côtés dans la file. Elle salua poliment Gabriel qui fit de même, tout en s'appuyant silencieusement sur sa béquille pour soulager la pression sur sa jambe.

- Votre cours s'est bien passé ? demanda-t-elle aux deux étudiants en histoire.

- Ennuyant à mourir, répondit Eva en grimaçant.

- Elle exagère toujours, reprit Gabriel avec un sourire en coin. Moi, j'ai trouvé intéressant d'évoquer les sources médiatiques du vingtième siècle.

- Nan mais regardez-moi cet hypocrite ! railla Eva. Va demander un autographe au prof tant que t'y es.

- Mais oui, carrément ! Et je pourrai l'agrafer sur le diplôme que j'obtiendrai contrairement à toi, se moqua-t-il.

Les deux continuèrent à se charrier pendant que Roxane divaguait dans ses pensées. Elle essayait de se concentrer sur leur conversation, mais son esprit dérivait constamment vers la fatigue qui alourdissait ses jambes et l'isolement qu'elle ressentait. Les bruits des conversations environnantes, le cliquetis des couverts et l'odeur alléchante des plats chauds semblaient lointains.

Ils avançaient en suivant la file jusqu'à arriver au niveau des plateaux. Roxane progressa, faisant glisser son plateau sur les cylindres métalliques, s'arrêtant à chaque fois qu'elle choisissait un plat. Chaque mouvement était calculé pour minimiser la douleur. Après avoir validé son paiement, Eva l'aida à porter son plateau, un geste de soutien silencieux mais inestimable.

Roxane apprécia le geste, reconnaissante de cette aide qui, bien que discrète, lui facilitait grandement la vie. Elle esquissa un sourire à Eva, essayant de participer à leur légèreté malgré le poids qui pesait sur ses pensées.

- Merci, Eva, murmura-t-elle en s'installant à une table.

Eva lui rendit son sourire et se plaça à côté de Roxane. Gabriel, lui, se mit en face d'Eva qui attacha ses longs cheveux noirs, bouclés et soyeux. C'était une belle jeune femme née d'un métissage entre un père blanc français et une mère noire éthiopienne. Elle avait hérité par conséquent d'un beau teint cuivré, de grands yeux noirs et de belles lèvres charnues. Il arrivait à Roxane d'envier le physique de son amie. Elle se disait qu'elle n'avait pas le même petit nez en trompette d'Eva, ni son beau teint, ni ses belles lèvres pleines. Roxane n'aimait pas grand-chose d'elle.

Bien qu'il fusse fin, son nez était droit et non en trompette, sa bouche n'était pas fine mais pas aussi pulpeuse que son amie. Au moins ses lèvres étaient bien dessinées, c'est sur ça qu'elle essayait de se rassurer. Elle appréciait aussi la forme de ses yeux en amande ainsi que leur bleu intense. C'était les éléments de chez elle qu'elle arrivait à aimer et qu'elle mettait le plus en valeur en les maquillant légèrement. Mais à part cela elle détestait son physique et par-dessus tout les séquelles des chirurgies sur son corps : ses cicatrices, sa petite taille, sa marche irrégulière avec sa jambe boiteuse. Tout cela, elle le détestait et elle le rejetait.

- Tu viens boire un verre ce soir ? demanda Gabriel à Eva. On fête le nouvel appart de Carl, on sera plusieurs de ses potes

Roxane ne releva pas qu'elle n'était pas directement invitée et elle s'en fichait puisqu'elle refusait deux fois sur trois de sortir.

Apprends-moi à m'aimerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant