Tu m'as perdu

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Vue de Mao Mao

  Un an, je savais que mon contrat était d'un an à tes côtés. Tu le savais aussi bien que moi, mais nous avons tous les deux fait le choix d'ignorer cette date limite même si nous ne pouvions la repousser. Mais est arrivé le jour, ce jour inévitable où l'empereur, d'une certaine façon, m'a mis à la porte. J'avais désormais l'interdiction de venir d'une quelconque façon à la cour impériale, j'avais enfreint les règles mais ça, Jinshi, tu le sais déjà, enfin, je crois. Mais non, l'empereur a choisi de te raconter un de ses impitoyables mensonges pour justifier mon départ. Tu ne le sais pas Jinshi, je ne sais pas non plus ce qu'il t'a inventé comme excuse, mais nous sommes sous l'autorité de l'empereur, il a le pouvoir sur nous, et nous n'avons d'autre choix que de lui obéir.

  Cette date limite de mon contrat avec toi, Jinshi, a pris fin un matin de fin mars, alors que le printemps commençait à déployer ses ailes. Je me souviens encore aujourd'hui que, ce jour-là, quelques cerisiers dans les jardins de la cour avaient laissé éclore leurs belles fleurs roses, comme si c'était un signe du destin, comme si la nature cherchait à me dire au revoir.

  Quand on y pense, m'exclure de la cour impériale pourrait être une idée stupide. Sans vouloir me vanter, je suis un certain atout, en tant que goûteuse comme je l'ai toujours été, mais j'ai résolu bien des enquêtes qui auraient pu me donner une certaine réputation. Et, malgré mes grandes connaissances en médecine et ma capacité à résoudre des énigmes, l'empereur a choisi de m'exclure. On pourrait se demander pourquoi il a fait ce choix, mais nous le savons tous les deux très bien Jinshi, tu as juste fait mine de gober ses mensonges pour justifier le fait que je dois partir.

  Il a fait ça sous la forme d'un certain contrat que j'aurais pour être à ton service comme dame de compagnie, même si nous savons pertinemment que tu m'as achetée il y a bien des mois et que, en théorie, je t'appartiens. Il nous a donnés la date où je partirai définitivement, et ce jour est arrivé, malheureusement.

  Les fleurs m'ont dit au revoir, Shaolan m'a dit au revoir, Shisui m'a dit au revoir et m'a promis de bien m'occuper de ma petite protégée, toutes mes connaissances m'ont dit au revoir, même le charlatan et son chat qui m'a volé mon prénom.

  Et puis il y a toi, Jinshi, où les au revoirs ont ressemblé terriblement à des adieux. J'ai ressenti toute la peine dans ta petite voix quand tu m'as lancé ces mots impersonnels : « Au revoir Mao Mao, prends soin de toi ». J'ai ressenti que tu étais sincère malgré le masque que tu portais avec ce faux sourire figé et plaqué sur ton visage.

  Si nous avions été seuls, je t'aurais sûrement tout dit, je t'aurais sûrement supplié de venir avec moi ou alors de convaincre l'empereur pour que je reste ici, mais nous savions tous les deux que c'était impossible. Alors je t'ai répondu avec ces autres mots sans saveur : « Au revoir Maître Jinshi, merci, prenez soin de vous également ».

  Et je suis partie.

  Quand j'ai franchi le pas des grandes portes qui me séparaient du reste du monde, l'envie subite de me laisser tomber sur le sol et de pleurer m'a prise, mais je ne pouvais pas, pas en public. Je ne voulais pas paraître faible et perdre encore une fois ma dignité

  Alors j'ai hélé la première calèche qui arrivait, j'ai payé le jeune homme avec le peu d'argent que j'avais sur moi et lui ai donné la direction de l'endroit où je voulais me rendre. À l'intérieur de la calèche, il y avait également deux autres personnes qui semblaient aussi perdues que moi.
  La première, une femme qui devait se rapprocher de la trentaine, assez grande et qui collait sa tête contre la vitre d'un air las, soupirant de temps à autre sans distinction, mais personne n'allait le lui reprocher. Elle avait de longs cheveux noirs qui lui arrivaient presque au niveau de la taille, attachés en deux grandes tresses avec quelques perles piquées de temps en temps, un beau teint pâle, un beau visage enfantin avec un petit maquillage très élégant, et une longue robe rose en soie. Elle semblait complètement désespérée et ne jetait aucun regard aux deux autres passagers.
  Le second, un jeune homme qui semblait plus jeune que moi, peut-être quinze ans ou dans les environs. Il semblait plutôt musclé derrière ses vêtements en coton qui sculptaient parfaitement son corps d'athlète, ses cheveux bruns plaqués en arrière par de la cire et une mine affligée sur le visage.

Mao Mao x Jinshi : Sauve-moi...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant