Chapitre 3

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Le groupe s'engagea à travers les larges rues d'Alizor d'un pas décidé, tentant de ne pas trop attirer l'attention. Les tenues des gardes, moins renforcées, ressemblaient davantage à des vêtements usuels. De plus, la capitale avait l'habitude de voir quelques soldats passer, voire même des équipes complètes lorsque des attaques avaient lieu, dans des villes éloignées.

En effet, personne n'avait jamais réussi à s'en prendre à cette ville, bien trop protégée. La mission qu'avait reçue Alira visait à empêcher, de nouveau, les traîtres de parvenir ici. Malgré ses talents pour le combat, Azano ne désirait pas reprendre les armes avant un moment, et était bien soulagé de pouvoir profiter de la présence de sa fille.

La princesse et ses soldats atteignirent rapidement la sortie de la ville, où une charette les attendait. Différents arceaux étaient disposés sur le côté, et une fine toile entourait cette partie, pour offrir à ceux qui s'y installeraient un doux ombrage.

Alira prit place, et ses hommes ne tardèrent pas à l'y rejoindre. Les missions avec elles avaient bonne réputation : contrairement à Azano, elle ne leur imposait pas un silence complet, ni une discipline de fer. Ils pouvaient ainsi communiquer pendant le trajet, et faire passer le temps à leur façon. Parfois, elle se joignait même à leurs activités.

Certains discutaient de leurs loisirs, d'autres évoquaient les souvenirs de leurs familles. Munis d'un petit jeu de cartes, ils attendaient patiemment, se doutant que le trajet leur prendrait le reste de la journée.

La princesse attendait, le regard dans le vide, ennuyée. L'un des soldats se tourna vers elle, et l'observa quelques secondes, ne sachant quoi faire. Face à n'importe qui d'autre, il n'aurait pas hésité à lancer la conversation, mais il n'était pas courant de s'adresser familièrement à un membre de la famille royale. Elle, toutefois, n'était pas réputée pour être trop stricte, et faisait souvent entorse aux règles commandées par son père.

- Tout va bien ? questionna finalement l'homme d'une voix peu assurée.

La jeune femme sortit de sa rêverie, et tourna lentement la tête vers son interlocuteur. Sa compagnie ne lui ferait aucun mal. Au fond d'elle, elle aurait adoré pouvoir se joindre, à chaque mission demandant un tel trajet, aux activités de ses camarades, ne serait-ce que pour apprendre à connaître un peu ces gens qui l'accompagnaient, ou pour ne pas se sentir seule. Malheureusement, il n'était pas dans les codes, pour une princesse, de perdre son sérieux. À tout moment, elle devait paraître sûre d'elle, comme si chaque seconde n'était pour elle qu'une occasion de repenser son plan.

- Bien entendu, répondit-elle d'une voix calme. Pourquoi me posez-vous cette question ?

L'homme haussa les épaules, légèrement embarrassé par son initiative. Pourquoi avait-il tenté de s'exprimer, s'il ne pouvait pas enchaîner deux phrases ?

- Je me disais simplement que, comme nous, vous deviez trouver ces trajets un peu long... essaya-t-il d'une voix de plus en plus mal à l'aise.

La jeune femme laissa échapper un petit rire. Sa façon d'agir, dépourvue de cet air maniéré si froid que gardait son père, attirait souvent l'intérêt de ses interlocuteurs.

- En effet, je vous l'avoue... confirma-t-elle. Je n'y ai pas grand chose à faire, et le plan est déjà tout tracé... J'attends donc patiemment. Je ne vois pas spécialement le paysage, d'ici, et rien ne peut réellement faire passer le temps...

L'homme fut légèrement surpris qu'elle lui réponde aussi facilement, un sourire apparut sur ses lèvres. Pourrait-il vraiment tenir la conversation ainsi ? Il en avait bon espoir.

- Dites-moi, vos habitudes sont bien différentes de celles de votre père... avoua-t-il en la regardant soudainement plus sérieusement. Y-a-t-il une raison à cela ?

Les traîtres d'EriziaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant