Les traîtres d'Erizia

Chapitre 6

Alira observa son interlocuteur pendant un moment, incrédule. Son corps tremblait. C'était impossible ! Cet être en face d'elle ne pouvait tout de même pas être son oncle, son père lui aurait parlé d'une telle situation ! Et pourtant, il avait toujours refusé de lui expliquer en détail ce qu'il avait appris des traîtres, et surtout de leur chef. Aucune information ne circulait à leur sujet, alors qu'elle savait, au vu des mots qu'il employait, que son père connaissait son identité.

- C'est impossible... trancha-t-elle, tentant de mettre fin à ses craintes.

Elle ne pouvait se permettre de douter des siens, dans une telle situation ! Elle devait s'enfuir, elle aurait bien le temps d'enquêter après ! L'homme en face d'elle afficha un petit sourire, et la fixa quelques secondes.

- Bien sûr que si, répliqua-t-il. Je te l'accorde, on ne se ressemble pas vraiment... Mais Azano est bien mon petit frère. On a eu un différent, et il m'a scellé ici, en profitant de l'excuse des "traîtres", qui n'ont en réalité jamais existé. Le seul que l'on pourrait désigner ainsi, c'est lui...

La princesse serra les poings. Il était logique que les habitants d'Isilo accusent le roi, mais de là à essayer de la convaincre ! Astrior souffla, découragé. Son regard balaya la pièce, puis se posa sur Alira. Son expression s'adoucit.

- Tu lui ressembles énormément... murmura-t-il. Serait-il possible que... non, elle nous avait toujours soutenus...

La jeune femme releva un sourcil. De qui parlait-il ? Soudain, elle remarqua le pendentif, autour de son cou. Celui-ci demeurait fermé, et cachait sûrement quelque chose d'important. Souhaitant en apprendre plus, elle attrapa soudainement l'objet. La minuscule chaîne céda, et le bijou resta entre ses mains. Elle l'ouvrit rapidement, et aperçut une silhouette familière. Une femme, en tout point semblable à elle, mais un peu plus âgée. Elle portait une robe rouge de velours, dont le matériau rappelait la tenue que portait actuellement Astrior. Il devait être impressionnant, ici, de porter des vêtements relativement neufs, n'étant pas couverts coups.

Sans lui laisser le temps de l'observer, le chef des traîtres empoigna l'objet, et noua les morceaux abîmés de la chaîne autour de son cou, pour récupérer le pendentif. Il jeta un regard sévère à la prisonnière, puis se releva.

- Je vais te trouver des preuves, tu vas voir... décida-t-il. Elian, viens avec moi ! Ton pouvoir me sera utile...

L'homme aux cheveux blancs acquiesça d'un signe de tête. La manière dont il le regardait rappelait l'admiration du peuple pour le roi Azano. Toutefois, il semblait plus rassuré, comme si une relation de réelle confiance existait entre les traîtres, alors qu'elle demeurait, la majeure partie du temps, moins évidente à Erizia.

Alira observa le duo s'éloigner, jusqu'à les perdre de vue. L'ombre qui la retenait avait disparu, et elle s'étira légèrement, prête à mettre en application son plan. Il fallait qu'elle sorte de là, et qu'elle rejoigne le palais. Après ça, elle aurait tout le temps, avec l'aide de Lucius, de se documenter sur la situation ; et s'il refusait de l'accompagner, elle se renseignerait seule. Elle devait comprendre ce qui s'était passé entre Azano et Astrior, et déterminer qui était la personne sur le portrait finement dessiné du pendentif.

Après s'être assurée que les deux éléments gênants ne pouvaient plus la surveiller, elle jeta un œil dans le couloir. Un garde, posté plus loin et un peu épuisé, goûtait à cette même brioche desséchée qu'elle avait remarquée auparavant. De larges cernes s'étaient développées sous ses yeux, et il était évident que sa seule envie était de se reposer un peu. Quelques minutes passèrent, et la fatigue le rattrapa. Ses paupières finirent par descendre, et, sans dormir vraiment, il avait relâché sa vigilance.