Le décompte

6

- Maman, tu peux venir me chercher ? l'appelai-je tout en enroulant mon écharpe autour de mon cou.

Elle eut un petit temps de réaction.

- Ethan ne te ramène pas ?

Je voulais éviter le sujet à tout prix. Malheureusement pour moi, ma mère était une curieuse de nature.

- Ah, euh, oui, à la base, mentis-je. Il... Il ne se sentait pas bien. Il est rentré chez lui.

- Et tu es seule ? s'écria t-elle précipitamment.

- Oui, je suis en bas de son immeuble.

- J'arrive.

Je ne cherchais pas à comprendre comment elle allait me retrouver. Ethan lui avait probablement donné son adresse.

J'attendais sous le soleil couchant du printemps. Un vent frais se levait et j'espérais que maman arrive le plus vite possible.

Cependant, je ressentais une sensation étrange dans mon ventre, totalement inconnue. Vous savez, ce mystérieux barbouillis qui vous tord en deux et dont son origine vous laisse perplexe ? C'était ça. Sincèrement, je savais que ce mal-être s'était formé à cause du comportement étrange de mon copain. Comment réussissait-il à changer d'humeur aussi rapidement ?

Je pris la décision de lui envoyer un énième message, sachant que je l'apercevais derrière sa fenêtre du salon.

« Réponds moi, je t'en pris. »

Il baissa sa tête. Il prit son téléphone en main. Il lu mon message. J'en étais certaine. Il plongea sa main dans une poche de son pantalon. Il reposa ses bras sur la vitre en verre qui le séparait de l'extérieur. Comment pouvait-il me faire ça ? Je n'y étais pour rien, je n'avais rien fait de mal.

Je sentis mes yeux se remplir et mon cœur se serrer. Et mon ventre se nouer. Et un sentiment d'abandon se propager en moi. Je laissai ma tête pendre en arrière lorsqu'une mélodie affreuse retentit à quelques centimètres de moi et me fit bondir.

- Mais ça ne va pas ! hurlai-je après l'homme de tout à l'heure.

Il rigola en guise de réponse, et s'éloigna. Cet homme avait un réel problème, je le détestais. A cause de lui, mon copain ne m'adressait plus un mot.

Je vis le monospace noir de ma mère arriver à toute allure et s'arrêter juste devant moi.

- Monte, dit-elle joyeusement.

Je bouclai ma ceinture quand elle détacha la sienne.

- Qu'est ce que tu fais ? l'interrogeai-je.

- Je vais demander à Ethan s'il veut passer la soirée à la maison. Il ne se sent pas bien, alors il n'a sûrement pas envie de cuisiner.

- Et n'a certainement pas envie de passer la soirée chez des gens qu'il connait à peine, étant malade, rétorquai-je.

- Vous êtes en froid ?

- Non.

- En temps habituel, tu aurais sauté sur l'occasion pour le voir.

- Maman !

- Je ne fais que dire la vérité.

- Moi aussi, il ne se sent pas bien. Quand tu es malade, tu déclines tes invitations, je te signale.

- Sauf que ton père est là pour s'occuper de tout. Ce n'est pas comparable.

Alors là, j'étais à court d'arguments. Pourquoi décidait-elle de l'inviter aujourd'hui ? Il me fallait trouver quelque chose à dire. Empirer son état de santé ? Non, je ne prendrais pas le risque qu'elle monte le voir pour de bon.