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Comme je faisais parti de la catégorie des gens minables, j'ai passé de longues minutes à pleurer sans ne même savoir pourquoi. Il me semblait que trop souvent, des larmes roulaient sur mes pommettes pour finir leurs courses sur mon cou. Mais je pensais trop, à mes risques et périls, que j'avais une excuse à cela. Je me sentais trop incomprise depuis le début de ma vie. Après tout, on pourrait me dire que je faisais une dépression liée à ma maladie. D'autres verraient en cela une forme miraculeuse de guérison car je pensais comme une adolescente à la vie pourrie.

Depuis mon hospitalisation et l'annonce tragique qui l'en a suivi, mon cas a intrigué énormément dans la sphère médicale. Une maladie incurable à seize ans ? Vraiment ? Mais d'où est-ce que cela peut venir ? Aucune ressemblance avec le cancer ? Que donnent les analyses de sang ? Aucun antécédent étrange dans la famille ? Un choc psychologique dans l'enfance ? Non, non, rien de tout cela. J'étais malade, le destin en avait décidé ainsi car, médicalement parlant, ma maladie restait un mystère impossible à comprendre.

J'ai finalement trouvé le courage de me lever pour m'emparer d'un bon vieux roman. Une vie, de Maupassant, avait traversé les siècles pour venir s'installer sur ma bibliothèque. Il m'arrivait de me surprendre moi-même, dévorant des livres par centaines depuis quatre ans alors que je ne les supportais pas avant. Mais ma vie avait changé, comme celle de Jeanne, l'héroïne de Maupassant. Ce roman avait beau être un livre scolaire, dès que mon frère avait fini de l'étudier, j'en avais savouré toutes les pages.

La société d'avant était l'opposé de la notre, même si, il faut bien se l'avouer, le futur sera également une autre phase. Les guerres de religions et la pollution achèveront population et nature. Peut-être que la si terrible fin du monde prédite depuis des centaines d'années et imaginée dans des dizaines de films se produira vraiment. J'aurais profondément apprécié assister à cet évènement. La Terre se découpant, des humains surdoués tombant dans l'infinie, et pour finir, notre chère planète engloutissant toute trace de vie. Morbide, mais j'aimais cela.

- Tu m'as l'air si concentré.

J'eus l'horrible sensation que ma cage thoracique se rétrécissait et que mon rythme cardiaque ne battait plus une mesure normale. Ethan était planté derrière moi et je ne l'avais pas entendu arriver.

- N'ais pas peur, susurra t-il.

En temps habituel, le voir aurait été un plaisir pour moi. Mais pas maintenant. Je me sentais ridicule d'avoir fuis, d'avoir pleuré et de ne pas savoir s'il me regardait depuis longtemps.

Je lui adressai tout de même un sourire.

Il se baissa à ma hauteur, déposa un baiser furtif sur mon front et s'allongea sur mon lit. Ses yeux étaient rivé sur le plafond blanc, mais lorsqu'il les braqua sur moi, il fit un bond et passa ses pouces sur mes joues mouillées.

- Mimi, ma douce mimi, chuchota t-il à mon oreille. Pourquoi pleures-tu ?

Il n'attendait pas de réponse car il s'écarta de moi la seconde d'après pour se lever. Il positionna ses mains autour de ma cage thoracique, ses doigts frôlant ma poitrine, et m'allongea. Je me laissai faire, ayant total confiance en lui. Une fois sous la couette, il retira ses baskets pas lacées et se blottit contre moi, sur les couvertures. Je tremblotai mais sa présence me paraissait nécessaire. Je souris : mon comportement était typiquement lunatique. Il y a encore une poignée de minutes, je regrettais qu'il soit monté dans ma chambre, alors que maintenant, je respirai dans son cou, où une légère odeur boisée y était rependue.

Ethan faisait jouer ses doigts sur mon front, sur mes joues, et, me pinça mon nez en trompette.

- Eh !!!!! râlai-je.

Le décompteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant