Chapitre 3

26 4 2
                                    

KURTIS

D'après le message qu'il m'a envoyé, Gabin est installé à une table isolée dans un coin de la cafétéria. Après trois jours de cours, j'arrive à peu près à me repérer seul. C'est pour ça que mon ami a pris de l'avance alors que je me changeais rapidement suite à notre cours de contemporain.

Je foule le self, mon casque de musique réglé au volume maximum, me créant ainsi une bulle de protection face à l'environnement qui m'entoure.. Depuis que les cours ont repris pour la totalité des étudiants, je me sens comme asphyxié pendant les moments de pause tels que ceux du déjeuner. Tant d'élèves se retrouvent tous ensemble afin de bavarder, manger...

Et je déteste ça.

Ça m'angoisse. Heureusement, je trouve vite l'endroit qu'a choisi Gabin, qui attend avec nos deux plateaux-repas face à lui.

Ce gars est le meilleur, putain.

Dans un souffle je m'écroule sur la chaise à sa droite. D'ici, nous avons le loisir d'observer toute la pièce et les gens à table.

Je retire mon casque audio, le glisse autour de mon cou. La musique défile encore de manière étouffée.

— Merci pour le plateau, mec.

Gabin balaie sa main devant nos visages signifiant que ce n'est rien. Alors que pour moi, c'est tout.

— Le prof m'a achevé, je suis mort, geint-il.

Il s'affale sur son siège, jetant sa tête en arrière. Je ris doucement, il agit toujours comme si chaque cours lui arrachait toute énergie vitale alors que sa batterie est pleine à longueur de journée.

— Tu répètes tout le temps ça et pourtant je suis sûre que d'ici dix minutes tu auras trouvé une nouvelle occasion d'être infernal !

Je secoue la tête, moqueur. Gabin grommelle que je ne suis pas drôle et qu'il est vraiment à l'article de la mort.

— Mais bien sûr ! m'exclamé-je en grignotant mon entrée.

Je comprends tout de même ce qu'il veut dire. L'enseignant de ce matin n'a pas été tendre avec nous. Personnellement, ça ne m'a pas dérangé. J'aime pousser mon corps dans ses retranchements. C'est quelque chose qui me plait avec l'art de la danse. Avoir le pouvoir d'être meilleur, d'évoluer grâce à ma persévérance.

Si je finis courbaturer ce soir, qu'il en soit ainsi.

— Je me demande bien comment ça va se passer cet après-midi..., marmonne Gabin.

Nous avons ballet, c'est la deuxième catégorie de danse que je préfère parce qu'elle nécessite des efforts à fournir qui sont à mes yeux les plus sérieux.

Rigueur, discipline, dépassement de soi.

Mais c'est lorsque je marie les deux univers qui me font vibrer que je me sens le plus en symbiose. Classique et contemporain.

— T'as peur de te foirer ? l'interrogé-je.

Gabin mord sa lèvre et signe un oui de la tête.

— Tu sais bien que ce n'est pas mon domaine.

Mon meilleur ami est né pour la danse de rue, il aime casser les codes. Sur du hip-hop par exemple, mais aussi du street dance. C'est son oxygène, il est fait pour ça. C'est ce qui a davantage forgé notre amitié à l'association, car lorsqu'il avait du mal aux entraînements de classique, je lui filais un coup de main.  Puis, nous avons tous les deux lutté dans chacune de ces catégories, et travaillé d'arrache-pied. Sans ça, nous ne serions probablement pas ici. N'empêche qu'on a tout de même notre petite préférence au fond du cœur.

Nos âmes jumellesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant