CHAPITRE 38

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Je bondis dans la forêt, mes pattes puissantes fouettant le sol avec une agilité, tentant de m'ajuster à mes nouvelles capacités. Chaque mouvement était à la fois exaltant et déroutant, comme si je découvrais un monde que je n'avais jamais vraiment connu. Pourtant, malgré cette transformation, mon cœur était brisé en mille morceaux, chaque éclat de douleur résonnait dans ma poitrine.

Je fermai les yeux un instant, me concentrant pour éteindre notre lien, ce fil invisible qui nous reliait. Ma louve, protectrice, se tenait en travers de ce lien, formant une barrière impénétrable. Il ne pouvait pas me contacter, ni savoir où je me trouvais. C'était une décision difficile, mais nécessaire. Je ne voulais plus être vulnérable à ses manipulations.

Une vague de tristesse m'envahit, et je voulais pleurer, pleurer de ma naïveté, de ma stupidité. Je m'étais donnée à lui, corps et âme, croyant en un amour sincère, en une connexion profonde. Mais à présent, je réalisais avec amertume qu'il n'avait fait que se jouer de moi, exploitant mes sentiments pour ses propres fins.

Il m'avait tout pris, chaque fragment de moi, chaque espoir que j'avais nourri. Même ce moment tant attendu, celui où j'aurais enfin pu connaître ma louve, cette part de moi qui sommeillait en moi, il me l'avait enlevé. C'était un instant que j'avais imaginé des milliers de fois, un moment de révélation et de puissance, où je me serais enfin sentie complète, en harmonie avec ma véritable nature.

Mais à la place, je me retrouvais dépossédée, trahie par celui en qui j'avais placé ma confiance. Je me sentais comme une coquille vide, errant dans la forêt, chaque pas résonnant avec la douleur de ce qui aurait pu être.

Épuisée, tant physiquement que mentalement, je cherchai un endroit où me reposer, un refuge temporaire. Mes muscles étaient tendus, chaque pas me coûtant un effort considérable. Je n'avais nulle part où aller, aucune destination en tête, juste un besoin désespéré de fuir la douleur qui me rongeait.

Je me frayai un chemin à travers les sous-bois, mes sens en alerte, mais je ne cherchais pas à fuir les dangers extérieurs. Non, c'était la douleur intérieure qui me poussait à chercher un abri. Finalement, je découvris une petite clairière, entourée d'arbres. Leurs branches s'étendaient comme des bras protecteurs, et je me laissai tomber contre le tronc d'un vieux chêne, le cœur lourd.

L'odeur de la terre humide et des feuilles fraîches m'apaisa légèrement. Je fermai les yeux, essayant de chasser les pensées sombres qui m'assaillaient et je finis par m'endormir, brisée.

֎

— Elle est là ! cria une voix masculine, brisant le silence de la forêt.

Je me relevai en sursaut, le cœur battant à tout rompre. Mes sens s'éveillèrent instantanément, et ma vision s'ajusta, me permettant de distinguer les silhouettes familières des Amarokić qui m'entouraient. L'adrénaline affluait dans mes veines, me préparant à toute éventualité.

— Surprenant, dit Renan, un sourire amusé sur le visage, mais ses yeux trahissaient une curiosité sincère.

— C'est fou, on dirait Sina.

Je les regardai, mes émotions se bousculant en moi. Ma louve, toujours présente, se renforçait, méfiante. Je pouvais sentir son instinct protecteur s'éveiller, une vague de prudence m'envahissant. Je pris une profonde inspiration, tentant de me calmer.

— Elle a réussi à te cacher pendant tous ce temps.

— Ce n'est pas étonnant de sa part, c'était la plus forte d'entre nous.

Un frisson me parcourut à la mention de sa force.

— On ne te veut pas de mal, me dit Renan, son regard sincère cherchant à apaiser mes craintes.

— Que me voulez-vous ? demandai-je, la méfiance teintant ma voix.

— Tu es l'une des nôtres, tu es la fille de Sina, affirma-t-il, comme si cela devait tout expliquer.

Je me reculai instinctivement, méfiante, le cœur battant.

— Nous ne t'obligerons à rien, mais si tu le souhaites, tu peux nous rejoindre et vivre parmi nous, ajouta-t-il.

Je n'avais plus personne, plus rien, mais en même temps, je n'étais pas sûre de pouvoir vivre avec les Amarokić, même si, d'une certaine manière, j'étais reliée à eux par le sang.

— Est-ce que vous étiez au courant ? demandai-je, mes yeux passant sur chacun d'entre eux, cherchant des réponses.

Ils échangèrent des regards, avant que l'Amarokić la plus âgée ne plante son regard dans le mien. Je ne connaissais d'ailleurs toujours pas leurs noms.

— Nous avions senti quelque chose d'étrange en toi, mais nous n'avions jamais su que Sina était enceinte, expliqua-t-elle, sa voix empreinte de sagesse. Le jour où je t'ai guérie, le jour où j'ai planté ma griffe dans ton cœur, ce jour-là, j'ai su que tu étais différente. C'est pour ça que nous t'avons, en quelque sorte, testée.

Je restai silencieuse, le poids de ses paroles m'écrasant.

— Merci, d'avoir répondu à ma question et pour votre proposition, mais je me dois de la refuser.

Il hochèrent la tête silencieusement, impassibles.

— Nous comprenons, tu as besoin de temps pour te retrouver. Sache que si tu change d'avis, notre territoire te reste grand ouvert.

J'acquiesçai d'un hochement de tête. Leurs visages, resteraient gravés dans ma mémoire. Je pouvais sentir le poids de leur regard sur moi, comme s'ils me transmettaient une partie de leur force.

Dans un dernier regard, ils s'en allèrent, leurs silhouettes se fondant lentement dans l'ombre de la forêt. Je les observai disparaître, chaque pas qu'ils prenaient me rappelait la décision que j'avais prise, celle de rester seule.

֎

Un mois s'était écoulé depuis que j'avais pris la décision de m'éloigner, et j'errais dans la forêt. Chaque jour, je changeais d'endroit, cherchant à me fondre dans les bois, mais un vide persistait en moi.

Je me découvrais petit à petit, explorant mes nouvelles capacités. Chaque pas dans cette forêt était une tentative de me reconnecter avec ma véritable nature. Pourtant, malgré mes efforts pour me concentrer uniquement sur ma louve , je ne pouvais m'empêcher de penser à lui. Ce serait mentir de dire le contraire.

La nuit, lorsque le ciel s'illuminait de milliers d'étoiles scintillantes, mes pensées dérivaient inévitablement vers lui. Je me retrouvais allongée sur le sol frais, et je sentais une douleur sourde dans ma poitrine. Ma louve, cette part de moi qui aspirait à la liberté et à l'amour, le réclamait d'une certaine manière.

Il était là, dans chaque souffle du vent, dans le bruissement des feuilles, et dans le doux murmure de la nuit. Je pouvais presque entendre sa voix, comme un écho lointain.

֎

La peur m'enveloppait dans son étreinte glaciale, faisant frissonner chaque parcelle de mon être. Mes pensées étaient embrouillées, tourbillonnantes dans ma tête comme les feuilles emportées par le vent. Les branches se brisaient sous mes pas, mes jambes tremblaient de fatigue et mes poumons ne semblaient jamais se remplir complètement d'air. Pourtant, je ne me permettais pas de ralentir, car je savais qu'il était derrière moi. Je pouvais l'entendre à quelques kilomètres, me traquant comme une proie, désireux de mon corps et de ce que je représentais. La forêt se faisait de plus en plus dense, chaque arbre devenait un obstacle supplémentaire dans ma course éperdue.

Tous mes sens étaient en alerte, les battements de mon cœur, tambourinant dans ma poitrine, semblaient presque aussi bruyants que mes pas précipités dans la forêt. Chaque pulsation était un rappel de ma faiblesse, un rappel de lui.

Pourtant, mon âme désespérée criait ardemment après la sienne. 

La meute sanglante: l'éveil (Bientôt en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant