c h a p i t r e 2

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OMBRES ER RETROUVAILLES


La vie que je mène depuis quelques années est devenue une sorte de routine. C'est étrange de dire ça, mais vivre sur le fil du rasoir est maintenant mon quotidien. Fuir, éviter les regards, rester sous les radars. Avec Ethan à mes côtés, je me suis habitué à cette existence. Nous avons volé une somme d'argent à Reshala avant de quitter Chicago, et maintenant, Rome est notre nouveau terrain de jeu. Pas pour jouer, non. Juste pour disparaître.

Je scrute la ville depuis la fenêtre de notre appartement miteux. Les lumières des rues romaines éclairent faiblement les ruelles pavées, et un léger brouillard s'installe dans l'air nocturne. Ça fait des mois qu'on est ici, à essayer de passer inaperçus. C'est une ville parfaite pour ça. Personne ne te pose de questions si tu ne te mêles pas des affaires des autres. Mais moi, je ne peux m'empêcher d'observer tout ce qui se passe autour de moi.

Je sens encore la légère brise nocturne sur ma peau, mate et marquée par des années de vie active. Serrant les poings dans les poches de ma doudoune Puffect, que je ne quitte jamais, est légèrement ouvert, révélant un t-shirt simple. Ethan, qui est assis derrière moi, ne dit rien, mais je sens son regard se poser sur moi un instant avant de retourner à son téléphone.

— Ça te manque, hein ? dit-il en levant les yeux vers moi, interrompant mes pensées.

Je hausse les épaules sans répondre tout de suite. On a quitté Chicago il y a trois ans, et même si je ne suis pas du genre à regarder en arrière, il y a des visages, des moments, qui ne s'effacent jamais vraiment.

— Ce qui me manque, c'est la tranquillité, dis-je finalement.

Ethan sourit en coin, sans vraiment y croire. Il sait que je ne cherche pas la tranquillité. Il sait que je suis toujours attiré par ce frisson, par cette sensation que quelque chose peut basculer à tout moment.

Ce soir-là, on décide de sortir. Juste une promenade. Rome est immense, et il est facile de se fondre dans la foule, surtout dans le quartier Trastevere où on aime traîner. La ville est magnifique, mais c'est aussi un labyrinthe de ruelles et de secrets. On marche dans ces rues pavées, et je sens cette vieille familiarité, ce confort étrange dans l'inconnu.

On s'arrête dans un petit bar que j'ai repéré il y a quelques jours. Un endroit discret, où personne ne pose de questions. L'ambiance est tamisée, et l'odeur du tabac froid flotte dans l'air. Ethan commande deux verres, et je me laisse aller dans un coin, observant la salle.

Et c'est là que je la vois.

Samaël Cortez.

Elle entre dans le bar comme une tempête qui balaie tout sur son passage. Rien chez elle n'a changé, mais tout semble différent. Ses cheveux noirs tombent sur son dos, et ses yeux sombres brillent dans la lumière tamisée. Elle a cette démarche assurée, cette allure qui attire tous les regards, même ceux qui ne devraient pas se poser sur elle. Mais moi, je la connais. Je sais ce qui se cache derrière ce regard.

Samy.

Le souvenir de notre passé commun me revient en plein visage. Nous n'avons jamais été de simples amis. Il y avait toujours cette tension entre nous, cette frontière floue entre l'amitié et quelque chose de plus. Mais nous avons pris des chemins différents, et pourtant, elle est là, dans ce même bar, à Rome, après tout ce temps.

Je me lève sans hésiter, mes jambes me portent jusqu'à elle avant même que mon esprit ne puisse se poser trop de questions. Je l'appelle, d'une voix calme mais assurée.

— Samy.

Elle se retourne brusquement, son regard s'accroche au mien. L'étonnement traverse son visage, mais elle le cache vite derrière ce sourire. Ce sourire que je connais trop bien.

ROSTEROù les histoires vivent. Découvrez maintenant