Chapitre 5 : Le temps de dire adieu ✞

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À l'hôpital, l'ambiance était lourdement morbide, presque palpable. Le service, désert et silencieux, était baigné d'une lumière blanche aveuglante qui accentuait le vide de l'endroit. Le doux bourdonnement des machines résonnait dans le couloir, un rappel incessant de la vie qui s'accrochait désespérément à chaque instant.

Ma mère était assise sur une chaise, les traits tirés, Sam blotti contre elle, cherchant du réconfort. Ryan se tenait appuyé contre le mur, les bras croisés, le regard perdu dans le néant, tandis qu'Ethan et moi étions accroupis par terre, les genoux serrés contre la poitrine, cherchant à nous protéger de cette réalité dévastatrice.

Après de longues minutes qui semblaient interminables, le médecin entra dans le couloir et nous appela d'un ton grave. Nos cœurs se serrèrent alors que nous franchissions le seuil de cette chambre immaculée. À l'intérieur, Harry reposait sur le lit, les bras le long du corps, son visage paisible contrastant avec les fils et les tubes qui l'entouraient. Il était encore connecté à plusieurs machines, témoins silencieux de son combat acharné.

-Il vous attendait, déclara l'infirmier en fermant doucement la porte derrière lui, comme s'il savait que ce moment était crucial.

Sam se jeta au chevet de son père, les larmes aux yeux, le suppliant de tout son cœur de ne pas partir.

Ils avaient toujours partagé un lien profond, une complicité unique, et Harry, cet homme admirable, était pour lui bien plus qu'un père. Il était un grand-père pour moi aussi, toujours bon, toujours juste, irradiait de sagesse et de chaleur. Quand le diagnostic de son cancer du pancréas était tombé comme un coup de tonnerre, jamais il ne s'est apitoyé sur son sort. Au contraire, il avait affronté cette épreuve avec une force incroyable, gardant le sourire, même lorsque la douleur était insupportable.

Il s'était battu corps et âme contre ce fléau pendant plus de quatre ans, chaque jour un nouveau combat, chaque instant une nouvelle épreuve. Mais ce soir, alors que la lumière de son existence commençait à s'éteindre, une réalité accablante s'imposait à lui : c'était la fin.

- Papa, je t'en supplie, ne pars pas... sanglota Sam, sa voix tremblante chargée de désespoir. J'ai encore besoin de toi, ne m'abandonne pas... Il serra les mains de son père avec une force désespérée, ses doigts tremblants cherchant à ancrer leur lien dans un moment où tout semblait se fissurer. Les larmes coulaient librement sur ses joues, chaque goutte portant le poids d'une promesse non tenue et d'un amour incommensurable.

Il s'accrochait à cette main, comme si sa vie en dépendait, incapable d'accepter que cet instant pourrait être le dernier. Le regard de Sam était empli d'une peur profonde, une terreur sourde face à l'idée d'un avenir sans son père, un avenir qu'il n'était pas prêt à envisager. Son cœur se brisait sous le poids de cette réalité insupportable, et la pièce semblait se remplir de leur douleur commune, comme si même le temps lui-même s'était arrêté pour leur laisser un dernier instant ensemble.

Harry était à peine conscient, flottant entre la vie et l'au-delà, mais son cœur s'illuminait à la vue de son fils unique et de ses petits-enfants réunis à ses côtés. Un sourire fragile se dessina sur son visage fatigué, et dans un ultime râle, il ferma les yeux pour toujours, laissant un silence lourd dans la pièce. 

Je restai figée un instant dans la chambre d'hôpital, le silence pesant autour de moi après le départ de Harry. L'air semblait chargé de chagrin, et je ressentais encore la douleur de Sam, son cri déchirant résonnant dans mon esprit. Mais c'est Ethan qui attira mon regard. Je le vis se lever, le visage blême, avant de quitter la pièce presque en courant, comme s'il fuyait quelque chose de terrible. Sans réfléchir, je me mis à sa suite, un élan inexplicable me poussant à le suivre. Pourquoi moi ? Qu'est-ce que je croyais pouvoir faire pour lui ? Je me retrouvai bientôt à l'extérieur, où l'air frais me frappa le visage, mais je ne me laissai pas distraire. Mes yeux se portèrent sur Ethan, qui était accroupi entre deux voitures, le visage crispé, vomissant son chagrin sur le bitume.

Je t'aime, moi non plus.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant