Chapitre 16 : Esprit vagabon. ✿

33 17 0
                                    


Ce soir là, c'était l'une de ces soirées où le salon se transformait en champ de bataille, animé par des rires et des chamailleries amusantes. Le plateau du jeu était déjà prêt, posé sur la table basse. Ethan, les enfants et moi étions assis par terre, tandis que les anciens avaient le cul bien au chaud sur les deux canapés que contenait la pièce. J'avais pris place au côté d'Ethan qui tenait Alex sur les genoux, voulant attraper tous les pions du plateau. Mais nous étions prêt à lancer les dés comme s'il s'agissait d'un acte de grande stratégie militaire.

On avait choisi un jeu classique, un de ceux qu'on ressort toujours pour ce genre d'occasion, quelque chose qui met tout le monde sur un pied d'égalité... mais bon... même avec toute la bienveillance du monde, nous savions très bien qu'entre nous il y aurait forcément des trahisons, des alliances secrètes, et des petits coups en douce. Ça faisait partie du jeu. Sam, comme à son habitude, jouait avec un éternel sérieux. Il ne pouvait pas s'empêcher de transformer une partie anodine en véritable opération tactique. Je l'entendis déjà marmonner des calculs improbables pour optimiser ses mouvements. 

Ma mère, quand à elle, restait en retrait sur le canapé, avec un sourire amusé. Elle disait toujours qu'elle n'était pas assez compétitive pour ces trucs là, mais je savais bien qu'elle adorait nous voir s'amuser, un verre de vin rouge à la main, en commentant la partie comme un match de tennis, et cette fois ci, Marie était sa complice de commérage. Moi, de mon côté, j'étais plongée dans cette ambiance chaleureuse, avec cette excitation qui montait en moi à mesure que le jeu avançait. J'adorais ce genre de soirée. 

Quand se fût à mon tour de jouer, et qui pouvait me donner la victoire, je sentis tous les regards se poser sur moi, j'essayais de rester impassible, même si je crevais d'envie de sauter de joie pour une simple bonne pioche. Je posais mon pion sur le plateau et balayais celui d'Ethan, m'offrant la victoire. Je laissais ma joie exploser, et Alex ria avec moi, sans savoir pourquoi.

-T'as triché ! S'indigna Ethan ! Montre moi ta carte !

-Je n'ai pas triché, répondis-je un sourire narquois aux lèvres.

Il tenta de voler ma carte, mais je la cachais dans mon soutif. Et il pesta, assurant que j'avais triché, car son coup était parfait.

Mauvais joueur.

- Elle triche depuis le début de la partie, intervint ma mère en riant, toujours avec son verre de vin à la main. Elle triche tout le temps.

J'écarquillai les yeux faces à la traîtrise de cette femme, et son rire emplie la pièce.

-C'est faux ! La contredis-je. J'ai juste... arrangé un peu le...jeu, fis-je dans un murmure à peine audible.

-T'as triché ! S'indigna encore Ethan, les yeux ronds comme des boules de billard.

-Non, mentis-je en faisant glisser le dé entre mes doigt fins, j'ai juste, amé-li-oré le jeu. Insistai-je.

-EN TRICHANT ! S'écria Ugo qui se releva d'un bond.

Il avait l'air visiblement très énervé ce garçon.

-Hey ! Ne me crie pas dessus ! Rétorquai-je. Vous n'aviez cas mieux jouer.

-Elle a bien menée sa barque n'empêche, je n'y ai vu que du feu, renchérie Ian, en me lançant un sourire complice.

Je sais reconnaître un tricheur quand j'en vois un, et toi mon garçon, t'en est un.

-T'es de son côté ? Se révolta Ugo contre son cousin.

-Et toi ? T'étais de mon côté quand t'as baisé Emma ? S'emporta Ian.

J'écarquillais les yeux une nouvelle fois, et me tournais vers Ethan qui s'empêchait de rire, en se mordant l'intérieur des joues.

Le salon se plongea dans un silence lourd, seulement brisé par le tic-tac régulier de l'horloge, chacun retenait son souffle, attendant que quelqu'un ne nous sorte de cette situation malaisante.

- C'est quoi cette histoire ? Demanda Marie, qui reposa son verre de vin sur la table basse.

-Vas y Ugo, raconte à ta chère maman, comment tu t'es fait sucer par la femme que j'aime !

-On avait un pacte ! Répondit Ugo, en levant les bras en l'air.

- a plus de pacte, rétorqua Ian, le regard noir, en quittant la pièce.

Milton se redressa, remis lentement son pantalon en place, apporta son verre de vin blanc à ses lèvres, et balaya la salle du regard pendant de longue secondes, fixant un par un nos paires d'yeux.

Tu fais peur Milton.

-Et bien, dit ce dernier, voilà une soirée qui se termine bien. Allons nous coucher.

Il se tourna sur ses talons, et il partit, nous laissant en plan.


Je regagnais la salle de bain, un peu plus tard dans la soirée, le sourire aux lèvres d'avoir gagné. Je fîs couler un bain, et me plongeait dans cette eau bouillante, faisant frémir tout mon corps, en repensant à cette journée. Cette superbe journée. 

"alors je serai cet homme si la vie m'arrache à toi"

"Tu es libre" 

"Tu es en sécurité"

Je fis taire mes pensées en basculant ma tête sous l'eau, laissant le silence apaiser mon esprit vagabon.

Lorsque je sortis du bain, mes extrémités étaient toutes fripées, je n'avais pas vu le temps passer...je m'enroulais dans une serviette chaude, et fis face au miroir au dessus du lavabo. Mon visage n'avait plus aucune séquelle de la nuit d'hier. Je me brossais les dents, et je regagnais ma chambre qui était sur le même pallier.

J'enfilais une nuisette noire, et me faufilais sous les draps.

J'avais l'impression d'être droguée, comme si, tout ce temps, je l'avais vécu en apnée, sans m'en rendre compte, et que d'un coup, je remontais à la surface et prenais de profonde inspiration. Je me sentais si bien... c'était nouveau à ce que j'avais déjà connu par le passé. Je me sentais plus légère. Plus apaisée. Grace à une personne.






Je t'aime, moi non plus.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant