Six

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L'atmosphère était lourde dans le bureau de Finn pour un lundi matin. Seule la trotteuse de l'horloge brisait le silence à intervalles réguliers.
De l'autre côté du bureau, en face de lui, Olive Martin lisait du bout des doigts le contrat traduit en braille et ce depuis une demi heure.

Finn, tendu, avait d'abord fixé son reflet dans les grands verres teintés d'Olive. Puis au fur et à mesure que les minutes passaient, ses yeux s'aventuraient autre part trouvant de quoi le distraire.
Il avait d'abord analysé ses cheveux blonds qui encadraient son visage et s'arrêtaient dans sa nuque. Leur couleur doré se mariait parfaitement avec les teintes crèmes du bureau.
Pendues à ses oreilles, deux petites perles en forme de goutte se balançaient à chacun de ses mouvement.
Son regard revenait sur l'énorme monture noire qui lui mangeait le visage.
A quoi ressemble-t-elle sans ses lunettes ?
Tout le reste de son visage était anguleux: ses pommettes étaient saillantes, son nez en trompette, ses sourcils et même son menton en pointes.
Seule sa bouche en cœur offrait des rondeurs généreuses. Ses lèvres rosées s'ouvraient et se refermaient au rythme de sa lecture et il y était complètement suspendu. Tant et si bien qu'il n'aurait pu dire combien de temps avait passé quand elle se mit à parler.
— Bien.
Elle reposa le document sur le bureau et croisa ses longues jambes.
— Dites-moi Foster, vous n'auriez pas des connexion dans la presse par hasard ?
— Si, je dois en avoir pourquoi ? Foster fronçait les sourcils suspicieux.
Elle attrapa le stylo sur le coin de la table et signa le contrat avant de lui tendre, un sourire malicieux aux lèvres.
— Nous irons manger demain midi dans un restaurant, choisissez lequel, et invitez une journaliste.
— Une journaliste ? Pourquoi pas un homme ?
— Parce qu'une femme fait toujours mieux son travail qu'un homme. Maintenant signez ce contrat que je puisse rentrer chez moi, j'ai autre chose à faire.

***

Finn arrangeait sa cravate pour la dixième fois par nervosité avant de se rendre compte que cela ne ferait aucune différence. Olive ne saurait même pas comment il était habillé. Il regarda sa montre encore une fois.

Trouver une journaliste qui cherchait un scoop n'avait pas été un souci. Les reporter à la recherche d'information croustillante couraient les rues ces temps-ci. La difficulté avait été de faire passer le message par une source extérieure pour pas qu'on ne sache qu'il était à l'origine de cette piste. Le problème avec cette technique est qu'il ne savait pas combien de temps la journaliste allait les attendre, et ils étaient déjà en retard.

Il passa cette fois par l'entrée du garage. Les journalistes n'étaient pas nombreux et il réussit à se faire assez discret pour ne pas se faire repérer. La jeune fille de la dernière fois n'était pas là non plus donc il poursuivit son chemin après qu'un employé du garage l'ai reconnu.
Il toqua deux fois à la porte et elle s'ouvrît immédiatement sur Olive.
Ses cheveux étaient plus brillant et elle arborait un magnifique ensemble de costume gris anthracite qui semblait être fait pour elle. Sous son blazer un haut blanc échancré lui fit lever la tête. Avec ses talons aiguilles le haut de son crâne arrivait pile au niveau de ses yeux.
— C'est moi qui vous emmène, il réussit à articuler en la détaillant.
— On ne porte pas la même couleur n'est ce pas ? Elle rétorqua, visiblement peu surprise de le voir ici.
Finn jeta un œil à son costume bleu marine.
— Non.
— Bien, allons-y.
— Prenez mon bras, les escaliers ne vont pas être facile avec des talons aussi haut.
Elle ne répondit rien mais il sentit sa main se glisser dans le creux de son coude et un frisson le parcouru tout entier.

Elle s'installa dans la voiture avec une grande maîtrise pour quelqu'un qui n'était jamais monté dedans.
Finn sentait l'envie inévitable de l'impressionner monter en lui. Cette femme avait l'allure d'une grande dame même si elle n'avait jamais côtoyé les hautes sphères de la société. C'était tout simplement impressionnant et il avait tellement de mal à s'en détacher qu'il la fixa quelques secondes avant de mettre le contact.

En arrivant on les fit monter dans la salle commune. Un bruit ambiant résonnait et Finn trouva Olive extrêmement détendue.
Il commanda du vin pour accompagner le repas et elle acquiesça.
Quand le serveur partit enfin elle se pencha en avant pour qu'il puisse l'entendre.
— Bien maintenant parlez moi de vous.
— Pardon ? Pourquoi je ferais une chose pareil ?
— Parce que je vous le demande ?
Il ne répondit pas à ça et la regarda dans l'incompréhension.
— Écoutez Foster, si l'on commence à vous parler de moi il va bien falloir que vous sachiez dire deux-trois choses histoire de tromper l'ennemi, il en est de même pour moi si l'on veut montrer que nous sommes proches.

Il l'avait deviné mais n'avait pas voulu s'avancer. Elle voulait une image dans les tabloïds de demain qui montre eux deux en pleine complicité et amitié pour réécrire la photo de la semaine passée.
Un petit sourire s'étira sur ses lèvres.
— J'aime les choses bien faites.
Elle ne bougea pas, jouant du bout des doigts avec sa fourchette.
— Une réponse fade qui ne m'étonne pas venant de vous. Sérieusement, qui n'aime pas les choses bien faites ? Maintenant répondez à la question je vous prie.
Il la toisa piqué à vif.
— Bon répondez en premier, ça me donnera une idée de quoi dire.
Elle poussa un grognement passablement irrité mais cela ne fit qu'agrandir son sourire.
— J'affectionne la lavande et le violon.
Il prit un moment pour l'imaginer au milieu d'un champ de lavande et cette image lui plue.
— Vous en jouez ?
— Non, ce n'est même pas la faute de mon inconvénient visuel. Je préfère juste l'entendre des autres c'est tout.
— Pourquoi gardez-vous vos lunettes ?
— Je vous ai posé une question il me semble Foster.
Il pesa le pour et le contre. Elle se moquerait sûrement mais ce n'était pas si honteux que cela. Si ?
Il se racla la gorge et fit tourner le pied du verre à vin de ses doigts, nerveux.
— J'aime les échecs et... les choses douces. Il ferma les yeux pour ne pas être témoins de se réaction mais elle pouffa et il l'entendît.
— Vous m'avez demandé de vous ai répondu arrêtez de vous moquer sinon j'écourte cette entrevue. En plus qui me dit que cette journaliste n'est pas partie avant que nous arrivions.
Elle cessa un instant de rire pour lui répondre.
— Moi. Moi je vois le dis. Regardez à dix heure. La table derrière la dame avec la voix très aiguë. Les serveurs évitent cette table comme la peste mais le restaurant est bondé.
Finn jeta un coup soleil discret et aperçu en effet une jeune femme seule assise à une table.
— Vous avez des oreilles bioniques.
— Il faut bien avoir des avantages à être aveugle non ?
Elle sourit et il se sentit soudain privilégier. Elle était si inaccessible qu'il n'aurait jamais cru qu'une telle expression puisse peindre son visage.
Il voulait la voir en entier. Sans cette horrible monture qui lui mangeait le visage. Il voulait à nouveau la voir sourire de tout ses muscles. C'est comme si son visage se transformait.
— Rappelez-moi de ne jamais médire de vous si vous êtes dans les parages, il s'entendît répondre.
Le serveur arriva et les servi en vin. Finn le congédia au moment où leur verres furent remplis.

— Pourquoi gardez-vous vos lunettes ?
Elle finit de déguster sa gorgée de vin et reposa doucement son verre.
— Pourquoi voulez-vous tant savoir ça ?
« Parce que je veux vous voir » il aurait voulu répondre.
— Parce qu'elles sont hideuses, il s'entendît articuler.
Il ne mentait pas. Il les trouvait vraiment horrible.
Elle pencha la tête sur le côté en souriant légèrement. La tête de la nostalgie.
— Si je ne peux pas voir le monde, le monde ne me verra pas.
— Et de qui provient cette citation ? Il ne put s'empêcher de demander.
— De mon père.
Le cœur de Finn eut un raté à ce moment. C'était la première fois qu'elle mentionnait sa famille.
Elle était humaine, elle avait donc des géniteurs. Mais Finn n'avait pas pu s'empêcher de penser qu'elle était née comme Héphaïstos, de la seule volonté de Hera.
— Comptez-vous commander quelque chose ? Il essayait de changer de sujet comme il pouvait.
— Non, partons. Elle a déjà pris plus d'une vingtaine de photo. Ça devrait suffire pour son article.
Elle se leva et remit son blazer.
— Vous voulez mon bras pour descendre.
— Merci, elle lui offrit un sourire qu'il sut forcé, et il se demanda si cette grimace était pour la caméra, ou le fait de prendre son bras.

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⏰ Dernière mise à jour : Aug 31 ⏰

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