ᴘʀᴏʟᴏɢᴜᴇ

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ᴘʀᴏʟᴏɢᴜᴇ

      Les draps m'emprisonnent avec lui. J'avais beau me débattre fortement au début, ils entravaient tous mes mouvements. Ma force s'en va petit-à-petit, entraînant ma dignité avec.

     Mes yeux se posent sur son visage, qui arbore une expression mauvaise - me mettant encore plus mal à l'aise. Ce n'est pas dans ses habitudes, de mettre les gens à l'aise. Il préfère les déstabiliser, leur faire du mal ; on pourrait croire que son principal but dans la vie est de faire du mal aux autres. En ce moment, les autres, c'est moi. D'ailleurs, "en ce moment" est trop vague pour le sujet. Ça fait un an et demi. Dit comme ça, ça peut paraître peu, mais si vous y réfléchissez... Imaginez le vous d'il y à un an et demi. Imaginez tout le temps qui c'est passé depuis cette période. Là, ça parait déjà plus long, non ?

     Elijah me détaille lentement, un sourire fixé aux lèvres. Ça l'amuse bien, d'avoir tout ce pouvoir sur moi.

     Dégoûtant.

     Le peu d'amour que je ressentais encore pour lui quelques heures auparavant s'est envolé à la seconde où il a recommencé à me faire du chantage. Il sait très bien que c'est la seule façon de me faire rester. Je n'aurais jamais dû me confier à lui. Malheureusement, je l'aimais plus que tout. Je lui faisais confiance.

     Note à moi-même : ne pas faire confiance aux hommes qui paraissent trop gentils. Aux hommes tout court.

     Des larmes silencieuses dévalent mes joues, coulant sur les draps clairs. Je déteste pleurer devant les gens qui sont la cause de mon malheur, comme mon père, par exemple, mais je finis toujours en pleurs quand je suis avec lui. Pleurer devant eux brise mon égo. En fait, pleurer en soit ne me gène pas plus que ça, quand je suis seule. Devant les autres, c'est une autre histoire. Ils se réjouiront forcément de ton malheur, tant qu'ils sont heureux d'avoir réussi à te blesser. Surtout que presque personne n'a le cœur assez ouvert pour essayer de te comprendre. S'ils n'ont pas vécu ce que tu pleures, ils se diront que ce n'est pas si grave, que tu exagères forcément sur un point. Même les gens qui l'ont vécus peuvent parfois penser que leur souffrance surpasse la tienne. Personnellement, je pense que chaque personne vit différemment les épreuves de la vie.

     Je sens l'humidité de mes larmes sur la taie d'oreiller, plaquée contre ma joue. J'inspire malgré moi, mieux vaut éviter de m'étouffer si bêtement. L'odeur de lavande que je m'efforçais tant d'éviter entre dans mes narines. Un haut le cœur me prend immédiatement. J'adorais cette odeur, avant. C'était son odeur. Maintenant, elle me dégoûte.

     Parce que c'est son odeur, justement.

     La nausée s'invite en plus de mon mal de tête, me donnant le tournis. A quoi bon se battre, quand on sait que le combat sera vain ?

     Je sens mes mains retomber aux côtés de mon corps, sans trop les apercevoir. J'ai l'impression d'être shootée : trop d'émotions me traverse. Alors je ne sens plus trop mes membres. Ce sont juste des amas de chair recouvrant mon âme. Je n'ai même plus la force de maintenir son corps à distance du mien. Le brun se presse encore plus contre moi - comprenant ma défaite.

     Il n'a pas besoin de ça, je suis déjà vaincue.

     Je laisse ma tête retomber sur le côté, le cerveau vidé par le surplus d'informations qui me traversait. Seul le dégoût me tient compagnie. Même l'envie de vomir semble avoir déserté. Enfin, pour l'instant. Quand mon cerveau aura assimilé ce qui se passe, tout reviendra se chambouler dans ma tête. C'est toujours comme ça.

     Je suis totalement détachée de la situation.

     Refusant de "perdre le contact visuel", ses doigts trapus saisissent mon visage en coupe. Il n'est pas doux dans son geste. Il ne l'a d'ailleurs jamais été. J'ai toujours détesté ça, parce que même pendant nos rapports, il ne semblait pas se rendre compte de la violence de ses gestes. La seule chose qui émane de lui, c'est ça ; la violence. Bien sûr, j'étais bien trop naïve pour m'en apercevoir, quand on s'est rencontrés. J'étais focalisée sur le fait qu'un homme attirant et un peu plus âgé puisse s'intéresser à moi.

     Mais voici le problème : il inspire et expire violence, il mange violence, il parle violence. Il vit violence.

     Le brun tourne mon visage dans sa direction et capte directement mon regard. Quand il expire, son souffle chaud s'écrase sur mon visage, éboulant un peu plus mon monde. Je hais le fait que ce connard respire comme si de rien n'était, alors que moi, j'agonise lentement sous son corps brûlant. Je hais son odeur, la sensation de son touché, la couleur de ses yeux... Je hais tout de lui. Et si seulement il pouvait me détester aussi, tout irait mieux.

     Je suis tellement fatiguée.

     — Regarde-moi... souffle-t-il au creux de mon oreille. Fais face aux conséquences de tes actes, Ju'.

     Les conséquences de mes actes ? Qu'est ce que j'ai fais de si grave ? J'ai essayé de le quitter. A chaque fois, c'est pareil. Ça ne lui a pas plu. Il a complètement vrillé. Comme à chaque fois. Au bout d'un moment, je devrais peut-être arrêter d'essayer.

     Pour moi, la relation s'est terminée la première fois où il m'a violée. La première fois que j'ai voulu le quitter. C'est complètement impossible de sortir de ce cauchemar. Je me déteste tellement d'avoir cru que ce serait facile...

     Ses lèvres commencent à se balader sur mon cou, embrassant et mordillant ma peau fine. Je me retiens difficilement de hurler quand je sens sa salive sur mon épiderme. Hurler de dégoût ? De colère ? De frustration ? J'imagine que c'est tout ça rassemblé. Je ressent tout et rien à la fois.

     Ironique, n'est-ce pas ? Je suis en train de me faire agresser et je ne peux même pas exprimer ce que je ressens.

     C'est à partir de là que je commence à sentir quelque chose en moi. Pourtant, la panique n'est pas la première chose qui me prend aux tripes. Ça ressemble plus à de la nervosité. Je hais vraiment cette sensation. Je hais tout de ma vie, de toute façon - à part le chat errant qui traîne vers chez moi.

     C'est étrange, la manière dont le cerveau humain essaye de nous garder dans le déni. Jusqu'à ce que ce soit trop tard pour réagir, on est complètement paralysé. J'aimerais que tout soit plus facile.

Quand ses mains se mettent à caresser ma taille, je pense que c'est le moment du déclic. Je me remets à pleurer. Les larmes coulent encore plus qu'avant, elles inondent mon visage.

Le corps de la victime se paralyse jusqu'à ce qu'aucun retour en arrière ne soit envisageable, jusqu'à ce qu'elle soit traumatisée à vie. Même une tentative de viol peut gâcher la vie de la victime. Il n'y a pas grand monde qui se rend compte à quel point cette sensation est horrible. La sensation d'être sale. La sensation des mains de votre agresseur sur votre peau.

Je l'entends baisser sa braguette, et je sais pertinemment que je ne serais plus jamais la même dans quelques minutes.

     Je hais ma vie.

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Je suis trop contente de vous retrouver après une loooooooooooooooongue pause ! (my bad)

On part sur un prologue de qualité supérieur au premier, pour ceux qui était déjà là 👏

Si vous avez besoin d'un cast pour visualiser les personnages, je vous invite a allez sur mon ig (l4ure.w)

Je pense poster tous les vendredis, à voir si c'est le jour qui m'arrange :)

Donc, à la semaine prochaine !!

With my entire heart, L📚

𝐑𝐞𝐦𝐞𝐦𝐛𝐞𝐫 𝐌𝐞Où les histoires vivent. Découvrez maintenant