Until the very end

Au bord du gouffre

**8h30.**

Le médecin venait de quitter ma chambre d'hôpital.
J'étais déjà debout pour me changer et rassembler les quelques affaires éparpillées dans cette maudite chambre.
Malheureusement, mon bras était douloureux, ce qui limitait grandement mes mouvements.
Les garçons étaient partis remplir les papiers de sortie. C'était la première fois que je me retrouvais seule depuis mon arrivée ici.
J'avais en horreur les hôpitaux : l'odeur, l'ambiance... L'angoisse était bien présente, mais il était hors de question qu'une foutue crise me fasse rester ici plus longtemps.

J'avais tout rassemblé, mais avec mon bras, je ne pouvais pas porter les deux sacs. J'attendais donc le retour des garçons. C'est Sawyer qui passa la porte.

— Tu as déjà tout rangé ? On allait venir t'aider, tu sais, on ne comptait pas te laisser là.

Il avait l'air totalement sérieux.

— On n'est jamais trop prudent. Je n'ai pas l'intention de rester ici plus longtemps, on peut y aller ? Où est Jax ?
J'étais fatiguée. J'avais mal, j'étais de mauvaise humeur... le trajet promettait d'être long.

— Mya, détends-toi, je plaisante. Il est allé chercher la voiture. Tu monteras à l'avant avec lui, puis on conduira à tour de rôle, lui et moi. On aimerait éviter de faire des pauses. Allez, viens, on descend.

Encore une fois, on aurait dit que tout était dans l'urgence. Pas de pause. C'est aussi ce que devait faire Kyle au retour... quelque chose clochait.

Une fois à l'extérieur, je commençais enfin à me sentir un peu mieux, à respirer pour de bon.

Dans la voiture, j'appuyai ma tête sur la vitre, absorbée dans mes pensées. Les médecins étaient inquiets pour mon état de santé général. Oui, il était vrai que je n'avais pas vraiment pris soin de moi ces derniers mois, mais je ne pensais pas qu'il y avait de quoi s'alarmer. Je savais qu'à présent, j'allais avoir mes deux compagnons de voyage sur le dos pour un bon moment... ils allaient même devenir mes colocataires.

Je ne savais même pas quoi faire une fois rentrée... tout était flou et rien ne me paraissait important. J'avais l'impression d'être là sans vraiment l'être.
J'espérais que ce soit juste les effets des médicaments. Mais j'avais peur d'avoir vraiment touché le fond cette fois... que la dépression ait fini par m'engloutir toute entière.

Je fus sortie de mes pensées sombres par la voix de Jaxon.

— Mya, tu m'écoutes ? Ça va ?

— Heu... oui, pardon, tu disais ?

— Est-ce que tu veux qu'on s'arrête pour manger ? On roule depuis déjà trois heures et tu n'as rien dit depuis le départ.

— Comme vous voulez, je n'ai pas faim.
Je me réinstallai contre la fenêtre.

Je pense que j'avais fini par m'endormir car je n'ai pas senti la voiture s'arrêter.

J'ouvris les yeux en sursaut en entendant une portière claquer. J'étais seule dans la voiture, Sawyer était en train de faire le plein et Jaxon était parti payer. J'en profitai pour sortir, me dégourdir les jambes et aller aux toilettes.

J'avais vraiment une tête à faire peur. Les cernes étaient noires et creusées, j'avais l'air épuisée et maigre...
Mon dieu, dans quel état j'étais... je comprenais mieux l'inquiétude des garçons.

— Mya, tu es là ? On va aller manger un morceau avant de reprendre la route.

— Oui ! J'arrive dans une minute.

Je les rejoignis dehors, toujours à moitié ailleurs.

— Allez, viens.
Jaxon me tenait délicatement par mon bras valide.
— Sawyer nous attend au restaurant en face. On a pris une nuit dans le motel d'à côté, tu as besoin de te reposer et le pickup n'est pas l'idéal.

Je le suivis sans rien répondre.
Une fois à table, je décidai de me secouer. Les pauvres devaient penser que je leur en voulais pour ce qui s'est passé, alors que pas du tout...

— Les garçons, je suis désolée, je vois bien que vous êtes inquiets, mais je vais bien. Je pense que je réagis mal au traitement. Les cachets doivent être trop forts, ils m'engourdissent le cerveau... je vous promets que ça va aller mieux maintenant.
Je voulais les convaincre, mais je voulais aussi me convaincre moi-même...

Le reste du repas se passa dans la bonne humeur, on avait pas mal rigolé, et ça m'avait vraiment fait du bien. Mais la fatigue se faisait sentir et je savais que le lendemain, on aurait encore beaucoup de route.

— Je vais aller dormir, mais profitez encore un peu de la soirée, le motel est à côté. Je vais prendre une douche et dormir. C'est quelle chambre ?

— Chambre 8 pour toi, on est dans celle d'à côté, la 9, mais si tu veux que l'un de nous reste avec toi, aucun souci.

— Profitez de la soirée, je vous ai dit. Si jamais ça ne va pas, je sais où vous trouver. J'ai mon téléphone avec moi.

— Ok, je passerai voir si ça va en rentrant. Et s'il y a quoi que ce soit, tu m'appelles, ok ?

Jaxon était inquiet, je le voyais.

— Promis.

Je les serrai dans mes bras, l'un après l'autre, avec mon bras valide.

Dehors, il faisait frais, c'était agréable. Je me sentais mieux, le repas m'avait fait du bien et je n'avais pas pris les cachets pour éviter cette sensation de vide, de flottement autour de moi. Le motel était une rue plus loin. Les environs étaient déserts, hormis quelques voitures sur la grande route qui s'étendait à perte de vue.

Je marchais doucement, profitant du calme environnant, quand j'entendis quelqu'un.
C'était dans la ruelle à côté. C'était sombre et je n'y voyais pas grand-chose. La voix d'une femme s'éleva à nouveau. Puis celle d'un homme, lui demandant de la fermer.

Je compris très vite que cette femme se faisait agresser. Sans réfléchir, je me précipitai dans la ruelle, le téléphone à la main pour appeler les garçons. L'homme s'éloignait, il avait dû m'entendre arriver.
La jeune femme devait avoir 26 ans, les cheveux châtains clairs, de magnifiques boucles jusqu'en bas du dos. Elle releva ses magnifiques yeux bleus vers moi, et je compris tout de suite mon erreur. Elle se releva, les yeux tristes, s'excusa et prit la fuite. En me retournant, j'aperçus l'homme qui était revenu. Je l'avais déjà vu... Sloan.
C'était un des Sons of the death, celui contre qui Jaxon c'était battue le soir au club. Celui qui m'avais mis sont point dans la gueule quand je m'étais interposé pour protéger Kélya.
J'étais dans la merde...

Il s'approcha de moi comme un prédateur de sa proie. Le premier coup fut porté à l'estomac, puis un second au visage. Je ne faisais pas le poids...

J'étais au sol, incapable de bouger, la respiration complètement coupée par les coups.

— Comme ont ce retrouve ! Je t'avais manqué ? Mon petit tour de passe passe était pas mal hein ?Tu diras à tes chiens de garde que vous êtes chez moi, ici. Je suis clément pour cette fois, mais ce sera la dernière. On se revoit très vite. Ils ont une dette envers moi et l'heure de la régler a bientôt sonné.

Il s'éloigna comme si rien ne s'était passé.
La jeune femme l'attendais, il partirent bras dessus bras dessous. Me laissant là par terre.

J'avais réussi à atteindre mon téléphone et à appeler Jaxon. Je savais qu'il avait tout entendu, car je l'avais entendu répondre à travers le téléphone. J'entendais leurs pas au fond de la ruelle. Leurs cris. J'aurais voulu les rassurer. Mais je n'avais pas la force de me lever. J'aurais voulu que tout s'arrête là. Je savais que ce n'était que des coups, que ça irait. Rien n'étais cassé je le sentais. Mais psychologiquement, j'étais détruite.
Je ne voulais plus me battre, c'en était trop pour moi...
Je baisser les bras. Je les entendais hurler mon prénom encore et toujours. Je voulais m'endormir et ne plu me réveiller...