Immortels I : Déluge [Edité][Version intégrale Wattpad]

A vos marques, prêts ? Mourez.

 Un toussotement bref rompit le silence dans l'air glacial de la geôle souterraine. Catherine Madaeve, assise sur une chaise de métal bancale et les mains attachées dans le dos, toisait du haut de ses 60 années bien tassées le quadragénaire assis en face d'elle.

"Madame Madaeve, vous êtes accusée de haute trahison, je vous conseille fortement de coopérer." Répéta le sergent Todd pour la quatrième fois. "Des sources nous informent que vous hébergiez la femme du château, la Lady comme vous dites." Elle tiqua lorsqu'il prononça avec dédain le surnom d'Ereyne.

"D'après ces même sources elle vous appellerait maman, alors je vous pose encore une fois la question : quelle est votre lien avec la Lady ?"

Catherine secoua délicatement la tête, essayant de repousser une mèche blanche qui lui chatouillait le nez. Elle observa attentivement l'homme en face d'elle : un soldat de sa majesté, banal, si inconscient du monde qui l'entourait.

"Elle porte votre nom et vous appelle maman, quelle est votre lien avec cette jeune femme ?

-Tout le monde m'appelle maman. Je tiens une maison d'hôtes principalement occupée par des jeunes, des étudiants, tous m'appellent maman.

-Mais tous n'ont pas votre nom de famille!" Rétorqua violemment le sergent Todd, provocant une réaction de fierté chez la dame.

"C'est moi qui porte son nom et non l'inverse ! La lady a aidé ma mère rendue orpheline par les bombardements de Londres lors de la seconde guerre mondiale. GreyHall, en grande partie qrâce à la Lady a recueilli et aidé de nombreux orphelins de guerre. Plusieurs d'entre eux ont prit le nom de la Lady en gage de reconnaissance, perpétuant ce lien entre nous.

-Elle a aidé votre mère dans les années quarante ? Mais quelle âge a t-elle réellement?"

Catherine sourit, elle se posait également cette question, comme la majorité des anciens de la ville.

"Nous ne le savons pas, la Lady est là c'est tout. Elle nous a toujours aidés, voilà pourquoi nous ne vous aiderons pas à la tuer."

Sur ce elle se tut et ignora superbement son interlocuteur qui finit par abandonner et quitter la pièce, non sans la laisser plongée dans le noir avec pour seule lueur l'espoir qu'Ereyne vienne la sauver.

Ereyne qui faisait les cent pas sur les remparts du château, observant les soldats au loin autant qu'ils l'observaient elle. La jeune femme avait tenté de se distraire, d'oublier mais son esprit revenait immanquablement vers l'épisode du lac et la fuite d'Abigail. La fureur de Zelyan allait être l'une des pires qu'elle aurait l'occasion de voir. En effet, Fitz lui avait fait part la nuit précédente de mouvements autour de la montagne. Les humains cherchaient des accès plus ou moins secrets pouvant mener au château. Elle était à peu près sûre qu'il n'y en avait aucun mais on ne savait jamais, elle était donc un peu anxieuse.

Les seuls qui s'amusaient étaient les deux mages récemment libérés, leur dernier jeu en date était de trouver les pièces interdites. Pour cela ils erraient dans les couloirs, dans toutes les ailes et à tous les étages du château et s'approchaient tour à tour de chaque porte. Si les fantômes habitant les armures et autres meubles à proximité s'échauffaient et poursuivaient le challenger, alors la pièce était interdite. En revanche ils prenaient garde à ne pas vraiment tenter de pénétrer dans ces pièces car le maître de maison n'était pas spécialement prompt à pardonner la désobéissance.

Et en parlant du loup, Zelyan rentra ce jour-là. Ereyne le sentit au moment où il fermait la porte de la pièce menant à l'entrée de la grotte. Elle n'avait pas de don de prescience, enfin pas à sa connaissance, mais il émanait de lui une telle odeur soufrée qu'il empestait tout le château. Fier de lui, le sourire aux lèvres, il parcourut le château à sa recherche et la trouva dans un petit salon. Elle était allongée sur un canapé, luttant pour se concentrer sur un livre ennuyeux. Zelyan se pencha au-dessus d'elle, laissant quelques gouttes d'un sang qui n'était pas le sien tomber sur son front. Elle avait cela en horreur et il le savait bien.