1. Les murmures (1/3)

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 Les ténèbres avaient toujours vécu en moi, comme derrière les fleurs aux pétales gonflés d'eau

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Les ténèbres avaient toujours vécu en moi, comme derrière les fleurs aux pétales gonflés d'eau. Les plantes se nourrissaient d'une terre venue d'un royaume lointain et craint. Seules la mer et ses flots nous protégeaient de ce dernier. Mais les Ombres pouvaient être visibles sur les rivages dont les vagues battaient qu'à quelques pas de moi.

Mes mains s'accrochèrent au voile qui recouvrait une partie de mon profil au souvenir de cette phrase murmurée il y a deux siècles. Elle était celle qui me donnait le courage d'accomplir des tâches que jamais une Grande Korê n'aurait songé être les siennes.

J'empruntai une ruelle et atteignis la rue principale de la cité. Nul habitant ne s'attarda sur moi, leurs visages concentrés sur leurs interlocuteurs. Plusieurs pourtant suivaient le chemin vers le complexe palatial. Les marchands avaient bien élu leur jour, attirant les foules sur leurs produits d'Orient. Mon regard se posa sur un bien en particulier qu'une grande partie des sujets de la ville tenaient entre leurs mains.

Elle se trouvait sur de nombreux stands — et bien que protectrice, accompagnée de figures d'argiles de démons pour les foyers, ses traits firent remonter un frissonnement le long de mon échine. Si ces autres figures familières signifiaient protection, celle de cette immortelle dont je méconnaissais tant ne se trouvait jamais sur nos terres... pas depuis des dizaines d'années.

Les Crétois ne s'en souciaient pas, s'adaptant aux apports des marchands qui traversaient la mer, achetant quelques objets en ce jour sacré avant de rejoindre les festivités. Le Minos ouvrait ses portes pour des jeux, les taureaux et les acrobates danseraient avec les bêtes. Un honneur pour les divinités, et principalement au nom du fils de la reine solaire, de celui qui protégeait le roi.

Un événement qui me permettait de me dissimuler entre les habitants. Vêtue de vêtements bien simples pour les femmes minoennes qui se pavanaient entre les rues, des courtisans à leurs pieds, je ne passais que plus inaperçue. J'empruntai un chemin parallèle, m'éloignant de ce centre d'activité pour rejoindre un lieu bien plus calme. Les murs devinrent rapidement plus rustiques, mais les étages demeuraient, bien que moins étendus. Les quelques habitants restés s'occupaient de leurs grains, quelques femmes accoudées aux balcons et d'autres s'adonnaient certainement à la tâche du tissage derrière des rideaux lourds qui les protégeaient.

Mes yeux parcouraient chaque recoin de ces rues dont la verdure prenait davantage de place et le doux son de la mer me suivait. Je ne pouvais pas être vue, les déesses et les korês demeuraient à l'ouest, sur leur territoire. Nous ne nous mêlions pas aux mortels, ou très rarement. Seules les prêtresses nous liaient, mais je ne pouvais pas passer par elles. Pas aujourd'hui. Plus grave se profilait à l'horizon.

Je perçus enfin une maison au loin, un temple, ses colonnes rouges soutenant une voûte. Quelques femmes aux vêtements colorés et à la poitrine révélée se trouvaient aux alentours. À peine m'approchai-je, qu'elles se reculèrent avant de s'agenouiller. Je ne pouvais plus me dissimuler d'yeux qui reconnaissaient mes traits.

— Où est-elle ? questionnai-je d'une voix douce malgré ce qu'exigeait mon rôle.

L'une d'elles, la plus âgée, se redressa. Du bout du doigt, elle me désigna l'arrière du temple. Elle croisa rapidement ses mains au niveau de son ventre, les reposant sur les divers pans aux motifs uniques, mais ressemblant aux deux autres. Une prêtresse de la déesse soleil, reconnus-je là l'aide du collier qu'elle avait autour du cou.

D'un hochement du visage, je la remerciai et suivis la direction indiquée, écoutant pourtant les murmures derrière moi. Ils ne mentionnaient qu'un seul nom, celui venu à nos rives par les marchands de Syrie. L'une des raisons pour lesquelles je m'étais déplacée jusqu'ici. De nouveaux frissonnements s'éveillèrent à mesure que les prêtresses s'approchaient des murs, leurs yeux observant mes mouvements, leurs voix basses se faufilant entre les colonnes. Elles ne formaient plus qu'une unique entité.

Les serviteuses de mes propres semblables. La voix de la Grande Déesse.

L'odeur de l'encens m'atteignit, enivrant mes narines, mais je ne parvins pas à me détacher de leurs discussions. Elles s'étaient passé le mot, semblerait-il. Les prêtresses avaient sans aucun doute supposé la raison de ma visite à l'aide des statuettes qui ornaient le marché. Je sus pourtant que la résonance de ces messes basses était principalement due par la présence de celle que j'étais venue voir — et qui ne tarda pas à se révéler.

Sa silhouette élancée se tenait au bord de cette colline, admirant les bois, entourée d'armoises qu'elle caressait du bout des doigts comme pour canaliser sa colère.

À peine m'approchai-je de quelques pas de plus, qu'elle se tourna vers moi. Ses iris aussi bleus que les éclairs et gris comme les nuages me détaillèrent avec respect tandis que ses cheveux bouclés volaient au vent. Elle baissa la tête. Un signe léger, mais reconnaissant mon rôle de Grande Korê.

Ses bras cessèrent d'effleurer les plantes, et elle patienta que je ne m'approche d'elle, silencieuse. Je sus pourtant que ses yeux qui semblaient briller suivaient le moindre de mes faits et gestes, sans se soucier des prêtresses en retrait. Elles feignaient d'accomplir leurs tâches, mais nous n'étions pas dupes. La Grande Prêtresse se trouvait sans aucun doute auprès du Minos, nous laissant le loisir de nous retrouver en ces lieux et à elles de s'accorder un temps. Personne ne dénoncerait personne.

Mon regard se posa sur la vaste étendue boisée à nos pieds. Un lieu proche des plantes dont elle connaissait tous les secrets — la nature était son foyer, tout autant que les plaines abandonnées aux vents.

— Diwija, la saluai-je.

Mais qui est donc Diwija ? Et que va faire Persephone d'après vous ? RDV jeudi pour les premières réponses 😏

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Khtonia Empyrea 🏺 T.1 Le désir des enfers {Hadès et Persephone retelling}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant