Chapitre 9

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Aujourd'hui

Laszló

Je sillonne les routes du reinaume depuis bientôt trois semaines pour annoncer les résultats de cette fichue loterie. Je ne sais quelle mouche a piqué le régent pour qu'il me désigne responsable de cette expédition. Un cortège de demoiselles en détresse qui se pâment devant moi à longueur de journée. Sortez-moi de là !

J'aperçois la moue moqueuse d'Ayden et le rictus railleur de Caleb. Il faut dire qu'ils restent tous deux de marbre face aux nombreux assauts féminins qu'ils reçoivent chaque jour. Je les envie au plus haut point.

Non pas que cela m'affecte, mais je préfère la solitude de mon bureau et le calme du palais. Tout plutôt que ces cancans incessants.

Ces deux abrutis sont mes amis depuis l'enfance. Nous avons été élevés ensemble. Là où je n'ai pas eu le choix, eux ont pu devenir gardes royaux. Mes gardes. Qui affichent actuellement un air goguenard. Je ne voudrais pas choquer ces demoiselles en leur collant mon poing dans la figure. Mais par la Déesse, que c'est tentant.

— Ayden, fais-moi disparaître ce sourire idiot de ton visage et ramène ton cul, aboyé-je.

Il s'approche d'un pas désinvolte. Que quelqu'un me vienne en aide.

— Serais-tu sur les nerfs, votre Altesse ?

— Ferme-la et suis-moi.

Je l'entends étouffer un rire tandis qu'il m'emboîte le pas en direction de ma tente. Nous devons organiser la dernière étape de notre voyage : Bersmark, la plus grande cité côtière du pays. Je salue les deux gardes en poste devant ma tente et écarte les plis pour me glisser à l'intérieur. Ma respiration se fait plus régulière à l'écart de toutes ces folles furieuses.

L'intérieur est assez sobre. Un lit de camp et un bureau pour que je puisse écrire les différentes missives destinées au régent ou aux commandants de garnison afin d'organiser au mieux l'avancée de notre charmante équipée.

Je me jette lourdement sur mon siège, y mettant toute ma lassitude.

— Rien que ça. N'en rajouterais-tu pas un peu ? me taquine Ayden en s'asseyant en face de moi.

— C'est facile pour toi. Ta belle gueule les attire moins que mon titre et mon argent.

— Personnellement, elles pourraient me chanter une sérénade totalement nues que je m'en ficherais toujours autant.

Je lève les yeux au ciel.

— Sans blague ! Merci Lieutenant Zilmouth pour cette pertinente remarque, persiflé-je.

Un mal de crâne commence à poindre. Il faut vraiment que cette tournée s'achève.

— Tout est prêt pour le départ de demain ?

Ayden retrouve son sérieux et m'énumère la liste de tous les préparatifs mis en place pour la suite de notre périple.

— Parfait. Maintenant, va rejoindre Caleb et laisse-moi reprendre des forces avant la dernière salve de hurlements qui nous attend demain.

Mon geste de la main le congédie, je me replonge dans ma lettre adressée au régent à qui je dois rendre compte de notre avancée. Je saisis ma plume et couche des mots sur le papier  jusqu'à ce que ma vue se trouble. Mes paupières s'alourdissent. Je ne les retiens plus. Je m'assoupis.

Je suis réveillé quelques heures plus tard par un raclement insistant. Émile, mon valet, se dandine d'un pied sur l'autre. Il porte sa livrée verte habituelle. J'exècre cette couleur. Celle du reinaume et du deuil. Quel choix merdique. Un rappel quotidien de ceux que nous avons perdus : ma mère, mes tantes et ma cousine. Je secoue la tête, affichant une expression avenante pour le dérider un peu.

L'AchilléeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant