Cheikh
Mon fils Abdel est rentré de France il y a quelques jours et je suis fière de lui . Il y a peu , ce n'était qu’un gamin qui n'aimait pas les maths et maintenant il rentre à l’université , Dieu fait grâce . J'aurais aimé avoir le temps de le voir mais je n'ai pas eu une seule seconde pour moi , j'ai été trop occupé avec le travail. Cet après-midi , j'abandonne exceptionnellement un meeting important dans la ville voisine pour passer du temps avec Abdel. Mon avion attérie donc à Abidjan vers 18 heures et je rentre directement à la maison . Je passe d'abord par ma chambre pour me rafraîchir et me détendre un peu avant de retrouver ma femme qui m'annonce qu’Abdel est sur la véranda. Lorsque je m'apprête à fouler la porte de la grande pièce, Coumba à ma grande surprise attrape ma main et me fais savoir qu'elle doit me parler . J'accepte de l'écouter uniquement par respect parceque je n'en ai pas envie au fond . Coumba et moi , ne sommes plus depuis longtemps le couple parfait, nous ne l'avons jamais été je dirais . Nous fesons semblant devant la famille et les amis mais dans le fond nous ne sommes que des inconnus . Elle pose sa main glacée et manucurée sur mon épaule et me tire sur le lit . Nous nous asseyons face à face et je regarde mes doigts en attendant qu'elle commence.
- Thiam , écoute, ça ne va pas avec ta mère .
Encore cette histoire ? Je ne veux pas en parler et cela se voit même malgré mon expression désintéressée .
- Vas droit au but Coumba , s'il te plaît, je suis pressé .
Je lui fais savoir .
- Yaye commence à perdre la tête, elle va finir par tout avouer .
Dit elle la tête baissée . Je sais qu'elle a raison, ma mère va finir par parler un jour si on agis pas . Mais enfermer ma mère, je ne le supporterais pas et je le dis clairement à Coumba .
- Elle fais de plus en plus de scènes, et un jour elle dira un mot de trop, crois moi . Elle dois se faire soigner .
Ses yeux commencent à s’humidifier puis elle continue.
- Si Abdel entend un mot de trop ... . Une larme descend sur sa joue . Je sens que je dois la rassurer , elle a peur et son sentiment est justifié .
- Nous allons trouver une solution, lui dis- je la main droite posée sur son épaule.
- Ne pleure pas s'il te plaît, je vais lui parler... j'ajoute avant de me lever .
En vérité, parler n'est pas ce dont ma mère a besoin . Dans notre famille, nous avons des antécédents de maladies mentales comme la schizophrénie, la dépression et autres . Lorsque ma mère fait ce que j'appelle des crises , sa vraie personnalité ressort et elle dit ce qu'elle pense sans réfléchir. Nous sommes l’une des familles les plus riches et connues du pays et j'aimerais éviter un scandale. C'est un lourd fardeau qui pèse sur mes épaules mais j'accepte de tout assumer, c'est ça un père de famille et j'aimerais préparer Abdel à cela . Quand il aura sa propre famille, il aura d'énormes responsabilités aussi et il doit avoir les épaules pour ça . Pour moi , il est impératif que Abdel et Freddy réussissent dans leur vie professionnelle. Je m'attend à ce que mon fils , gère d’une poigne de fer l'empire Thiam . C'est d'ailleurs ce dont je dois parler à Abdel ce soir , j'ai l’intention de les laisser commencer leurs études en Côte d'Ivoire d'abord pour ne pas les dépayser puis les faire voyager plus tard . Ce serait beaucoup plus judicieux à mon avis , mais je n'impose rien . Selon Coumba, les enfants font un picnic sur la terrasse et j'aimerais en profiter pour leur parler à tous les deux , leur donner des conseils sur les vices de l’université , les mauvaises fréquentations et même les relations amoureuses . Dior est sérieuse de base et je sais qu'elle fera attention, elle sait où elle va et c'est ce que j'aime chez elle . Cette une bonne enfant et je mettrais tout à sa disposition pour sa réussite. Je le ferais pour elle et surtout pour ma très chère Ange-dominique . Ça fait des mois maintenant qu'elle est décédée et elle me manque tous les jours . J'aurais aimé passer plus de temps avec elle et l'accompagner dans sa dernière demeure mais hélas . J'espère qu'elle me pardonnera pour tout . Abdel quant à lui , a toujours eu des facilités avec les filles , je l'ai toujours senti et j'en ai même eu des preuves. J'aimerais que mon fils soit dans le bien et je préfère même le marier jeune plutôt qu'il ne déshonore ma famille. Moi j’ai failli le faire dans le passé et c'est resté secret mais jusqu'à présent je le regrette. J'ai fait du mal à certaines personnes et Dieu seul connaît mon sort . J'y pense et cela me fait accélérer le pas , je suis tout excité de voir les enfants , j'ai le pressentiment que la vie veut me donner une chance d'empêcher l’histoire de se répéter . C’est un moment crucial de leur éducation et une grande fierté pour moi de les avoir élevés jusque-là . Quand j'arrive devant la porte , je l'ouvre doucement de sorte à ne faire aucun bruit et je pointe délicatement le bout de mon nez . C'est un autre atmosphère qui m'accueille , un bon vent qui frappe mon visage , de légers rayons qui tapissent le sol carrelés et l'air frais du jardin juste en bas . J'entre directement mais ce que je vois me laisse sans voix, je suis indigné et dégouté à la fois . Abdel et Frédérika qui s'embrassent tendrement sur un tapis au sol . J'aurais pu tout imaginer sauf ce scénario ci , je n'en crois pas mes yeux . Mon fils et la fille de mon amante ensemble , je ne le supporterais pas . Mon cœur bat et je ne sais même pas quelle réaction avoir . Soudain je me surprend à hurler :
- "Que se passe t il ici ?" Je sursaute presque à l’échos de ma voix dans la pièce. Je ne veux même pas y croire et pourtant c'est la réalité. Abdel est le premier à réagir , il lève légèrement la tête pour me regarder d'abord puis se redresse complètement à la vue de ma mine déçue. La petite aussi se redresse quelques instants après , l'air gênée et la tête baissée , comme si elle se sentais humiliée . J'ai mal pour eux car au fond de moi , je les comprends. J'ai envie de le leur crier même , ô combien ils n'ont pas à se sentir fautifs car les sentiments ne se contrôlent pas mais je ne peux pas . Je dois rester ferme et éviter le pire . Je dois immédiatement agir et c'est dans cet élan que j'invite Abdel à me rejoindre dans mon bureau avant de quitter la pièce. Je leur lance un dernier regard de tristesse à la suite de quoi je referme la porte . Le cœur lourd , je me dirige dans mon bureau dans un silence envahissant . Je fais les cents pas dans la pièce en attendant mon garçon qui met du temps à venir . Quand il arrive, il me trouve assis sur l'un des sofa , la tête baissée et les coudes déposés sur les genoux tandis que mes doigts ont saisis mon crâne . Plus loin , en face de la baie vitrée , il y a une petite table et des chaises sur l'une desquelles Abdel se met sur son séant . Je commence :
- Abdel c'était quoi tout ça ?
Il lève la tête et la rabaisse honteux avant de ne réussir qu’à prononcer :
- Papa ...
Il reprend ensuite après une grande inspiration .
- Je suis désolé, tu n'aurais pas dû tomber sur ça. C'est moi qui ai commencé et tout est de ma faute mais je te promet que c'est la dernière fois , papa.
Je le regarde incrédule un instant face à son audace et à son cran . J'apprécie comment il prend les devant et j'aurais aimé avoir le même courage il y a des années. Ça aurait tellement été plus simple si j'avais discuté avec mes parents de mes intentions pures envers Ange-dominique, ça aurait été tellement simple. Mais maintenant le mal est fait et ce sont d'autres personnes qui vont en payer les conséquences.
- Abdel, écoute...
Je me rapproche de lui .
- Cet amour est impossible et tu dois le comprendre. Vous devez y mettre fin .
Son regard s’attriste .
- Papa s'il te plaît , je ne profiterais de rien , je compte bien l'épouser un jour si c'est ce qui t'inquiète , mais ne nous sépare pas .
- Je suis désolé , mon fils , je ne peux pas .
Sa peau claire a déjà virée au rouge tout comme ses yeux , comme quand il s'énerve . Je remarque ses points qui se serrent laissant apparaître ses veines et ses jambes le dirigent à la porte. Il part , soit à sa chambre , soit la voir , je n'en ai aucune idée . Moi , je réfléchis toute la nuit avant de prendre la grande décision de les séparer.
Le lendemain matin très tôt , à contre cœur , je téléphone au directeur de la plus grande université du pays pour l'inscription de Frédérika d'abord. Comme le campus est assez loin de la maison , elle sera en cité et reviendra pendant les vacances et les fêtes . Je préfère amener Abdel dans un autre pays car même s'il risque d'être dépaysé , il a déjà voyagé et connaît un peu les réalités de la vie à l’étranger . Je ferai tout pour qu'ils ne se croisent plus avant longtemps et que tous leurs sentiments s'effacent . Par la même occasion , j'éviterai à Yaye de dire la vérité à Abdel en attendant de trouver une solution pour elle . En effet, puisqu'Abdel sera tout le temps parti , il n'aura pas assez de temps avec sa grand-mère pour qu'elle puisse lui parler. Et surtout Yaye ne doit absolument pas savoir qu'il existe quelques choses entre Frédérika et Abdel, sinon elle serait capable de tout rien que pour les séparer .
C'est ainsi que dès la semaine qui a suivi l'avion d'Abdel s'est envolé pour les États-Unis tandis que mon homme de main Djibril accompagna Dior à sa nouvelle demeure , la résidence estudiantine. La tristesse et la douleur se sentais sur son visage , mais l'incompréhension était celui qui régnait le plus . Elle avait mal mais voulais plus que tout comprendre pourquoi j’avais agis de la sorte . Et même si l'envie de tout lui avouer me harcelait chaque seconde , je ne pouvais pas. J'avais au lieu de cela remplacé leurs téléphones de sorte à ce qu'ils se perdent totalement de vue . J'étais perçu aux yeux de mon fils comme un ennemi et cela a contribué à détériorer notre relation au fil des années. J'avais très mal moi aussi au début mais je me suis habitué, les hommes c'est comme ça . Ça fesait mal mais la vie continuait et les enfants ne cessaient de grandir en maturité et d'évoluer professionnellement. Abdel a force d'avoir mal , s'était forgé une carapace solide et s'était installé définitivement à Londres , au Royaume-Uni. Dior quand à elle est devenue comme une fille pour moi , nous nous sommes de plus en plus rapprochés et je suis maintenant son mentor . C'est comme si avec elle , c'était plus facile d'avoir la proximité que je n'arrivais pas depuis des années à avoir avec mon fils . Bien qu'elle ai fait des études en médecine , elle m’est d'une grande utilité dans ma boutique de vêtements africains où elle passe ses heures de libres. Nos idées vont toujours dans le même sens et je vois de plus en plus la ressemblance entre elle et moi . Sans mentir , j'avais toujours imaginé Abdel à cette place mais Dior le fait bien et même mieux que lui l'aurait fait . Elle m'enlève un grand poids du dos car en vérité je ne sais plus où donner de la tête avec tout ce travail. J'ai dès le plus jeune âge compris que dans ce monde , pour réussir il ne faut pas que être éduqué mais aussi intelligent. Aujourd'hui j'ai dix petites , moyennes et grandes entreprises à mon actif et de quoi laisser un héritage à mes arrière petits enfants , c'est vraiment le but d’une vie .
Douze ans s'écoulent dans cet atmosphère d'étude, de travail acharné et de surtout beaucoup de discipline . Je suis maintenant un vieillard quinquagénaire qui fait le tour du monde . Mes enfants ont grandi au point où avec l'aide de Coumba , ils font la majeure partie de mon travail. Ce matin j'atterris à Abidjan pour une occasion des plus spéciales , les fiançailles de Frédérika et l'opportunité pour moi de laisser revenir Abdel au pays . Maintenant que Dior est prise par un autre homme , rien que par respect , il n'osera même pas la regarder . Il est temps pour moi de briser la glace et de passer plus de temps avec mon fils qui maintenant est devenu un grand homme d'affaire dur et guindé . Sa vie actuelle se résume au schéma boulot-dodo et je m'en veux beaucoup. Souvent , je me dit que si je l'avais laissé avec Dior , il aurait été plus heureux mais on ne peut plus retourner en arrière . J'ai informé Dior de la venue d’Abdel et bien qu'elle ait essayé de masquer sa tristesse , c'était assez évident . La cérémonie doit se dérouler dans une des villas que je possède dans la ville de Grand-Bassam . J'y arrive donc la veille de la cérémonie et passe la nuit sur place tandis que Coumba nous rejoint le lendemain avec les employés de maison et le service traiteur . La journée passe à grande vitesse et le soir arrive enfin avec son lot de stress et d'agitation . Le fiancé est un ancien ami d’Abdel du nom de Koffi Emmanuel. C'est un baoulé , chrétien catholique de base mais assez amoureux pour se reconvertir. Bien évidemment, je suis contre parceque sa reconversion n'es pas sincère et que je n’aurais jamais laissé mon propre enfant changer de religion à cause d'une femme. Ça n'a aucun sens et pour moi , c'est le meilleur moyen de se prendre un billet pour l'enfer . Néanmoins j'accepte parceque la décision ne me revient pas . Les invités envahissent la maison au bout de quelques heures puis le fiancé arrive avec sa famille. Son père est un grand banquier et homme politique du pays et sa mère styliste professionnelle et propriétaire d'une grande chaîne de boutique de vêtements féminins. Il se présentent tous les trois à moi et nous discutons tous autours d'une table . C’est une famille instruite et raffinée , et c'est la première chose que je remarque . Plus-tard dans la soirée , Dior arrive dans une somptueuse et longue robe , taillée dans le même tissu que les vêtements d’Emmanuel , avec ses cheveux rassemblés en un chignon volumineux et décorés de bijoux dorés. La soirée devrait normalement commencer mais Abdel a un retard et je ne veux pas commencer sans lui . Je sens l'inquiétude sur son visage quelques peu froissé quand elle s'approche de moi . Arrivée juste à mon niveau , elle me regarde dans les yeux avant de me prendre la main et de me remercier du fond du cœur pour tout . Je ne sais même pas comment réagir et je suis tout aussi ému qu'elle . C'est vers la fin de la soirée , pendant mon discours qu’Abdel apparaît avec un présent dans les mains . Je suis heureux de le voir parceque depuis un moment je n'y croyais plus . Le discours ainsi que toute la partie religieuse terminée , c'était le moment du repas . Tous les invités étaient à présent assis à table à déguster une variété de mets et de boissons proposés par le service traiteur . Tous les membres de la famille Koffi ainsi que ceux de la famille Thiam doivent dîner ensemble autours d’une même table . Cela symbolise qu'à partir de ce jour , nous ne formons qu'une seule et même famille. Coumba arrivée en retard comme son fils est assise à côté de moi , Abdel en face des fiancés , et les autres occupent toutes les places qui restent . La soirée se termine dans un atmosphère de bavardages et de convivialité sauf pour Abdel et Freddy . Après le départ des Koffi , plus tard dans la soirée, c'était le moment d'aller se coucher lorsqu’Abdel a annoncé son départ . Il comptait vraiment retourner au manoir à cette heure ci de la nuit , mais j'ai refusé sans même lui laisser le temps d'insister. Je dois réussir à briser la glace entre ce garçon et les autres membres de la famille et vite .
- Bon , moi je monte... ai-je avancé avant d'entamer les escaliers.
- Coumbaaaaaaa ! Ai je ajouté pour qu'elle puisse laisser les enfants discuter .
Je suis persuadé maintenant que je n'ai plus rien à craindre . Ils ont bien grandis et sauront contrôler leurs sentiments . D’autant plus que Dior a un prétendant , ça m'arrange.
Une fois dans la chambre avec Coumba, nous nous étions tous les deux débarbbouillés et étions assis autour d'une petite table dans la chambre . C'est le moment où avec ma confidente depuis le début de cette aventure, je lève un verre à la réussite de mes plans . Je viens d'éviter une catastrophe et peut-être même une abomination .
Beaucoup plus tard , après une douce soirée aux côtés de Coumba nous nous sommes endormis paisiblement dans ce joyau architectural qu'est cette maison de vacances. Soudain au beau milieu de la nuit , je me réveille avec une légère envie d'eau fraîche. Je me lève donc de mon lit dans le plus grand des calmes et referme la porte de la chambre tout doucement après moi . J'entame le long couloir dans lequel se trouve des chambres alignées de part et d'autres puis je prend les escaliers. J'ai déjà dépassé les chambres d’Abdel et Freddy qui sont tous les deux sûrement endormis profondément du fait de la dure journée qui vient de se terminer . J'ai soif mais en même temps je pense aussi à me prendre une glace ou une boisson pour me rafraîchir un peu , une fois en passant ça ne fait de mal à personne.
Lorsque mes pieds foulent la porte de la cuisine je vois une scène qui j'avoue m'étonne beaucoup. Freddy est assise les jambes croisées sur une chaise et semble discuter au téléphone avec un interlocuteur que je n'arrive pas à identifier. Abdel lui est debout derrière et la fixe sans bouger . Ils n'ont tous les deux pas remarqué ma présence et Freddy pense certainement être seule . Je décide alors de prendre la parole et de les rappeler à l'ordre . Quand je le fais , Freddy se lève en première position, toute surprise de l’image dressée sous ses yeux et me fixe d'un air perturbé. Abdel , lui se rue tout de suite au fond de la cuisine fesant mine d'être venu chercher un verre . Freddy regarde Abdel un instant puis se rendant compte de sa tenue de chambre elle s'excuse avant de nous laisser .
Je me demande bien ce qui se serait passé si je n'étais pas arrivé et cela me fait me poser énormément de questions. J'espère juste qu'aucune catastrophe ne se passera avant le mariage. Rien ne doit empêcher ce mariage et je ferai tout pour cela.Si vous avez lu jusque là, je suppose que c'est parceque vous avez aimé mon histoire, n’hésitez pas à la recommander si possible.
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Scandale Au Manoir
Teen FictionAbdel et Frédérika, deux adolescents issus de milieux sociaux opposés, vivent dans la même résidence depuis leur enfance. Abdel est le fils des riches patrons, tandis que Frédérika est la fille de la ménagère. Malgré leur différence de statut, une p...