La chute libre

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« Il sait pour Alexandre, mais je ne sais pas ce qu'il sait de plus » dit-il à l'autre homme.

« Détruit les preuves avec le logiciel, on a une copie dans le serveur de toute façon » répondit-il

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Les mots nouveaux qui pourraient décrire les événements se rapprocheraient certainement de l'enfer, du moins pour eux. Depuis la révélation concernant Jordan il y a plus de dix jours, plus rien ne semblait aller. Entre les deux hommes, un silence pesant s'était installé depuis plusieurs jours. Gabriel, le politicien, s'était réfugié auprès de Charles, son allié de longue date, et passait désormais la majeure partie de son temps libre à ses côtés. Jordan, quant à lui, se concentrait sur son travail, enfouissant profondément ses sentiments et son amertume.

Il se sentait trahi, un couteau planté dans le dos par ceux en qui il avait le plus confiance. Plus rien ne semblait fiable. Si Alexandre avait orchestré toute cette situation, qui d'autre était dans la confidence ? Ses collègues étaient-ils réellement sincères avec lui ou portaient-ils des masques soigneusement façonnés, dissimulant des intentions obscures ? L'incertitude le rongeait. Pourquoi son mentor, en qui il avait toujours cru, avait-il fait appel à Jordan plutôt qu'à quelqu'un d'autre ? Quelle était cette mystérieuse dette qui le liait à lui ? Les réponses se dérobaient, et Gabriel, lui, se sentait de plus en plus isolé, abandonné à ses propres doutes.

Dans ce chaos émotionnel, Charles était devenu l'unique refuge de Gabriel. Il le soutenait d'autant plus ardemment depuis ces derniers jours, renforçant leur lien. Et Gabriel, bien qu'amer, se réjouissait de cette proximité, car elle éloignait Jordan, celui qu'il considérait désormais comme un traître.

Cependant, ce soir-là, tout risquait de basculer dans un drame. Alors que les menaces semblaient s'être estompées depuis quelques jours, les trois hommes se trouvaient en voiture, en direction du domicile après une journée tendue. C'est alors qu'un véhicule suspect fit irruption dans le rétroviseur central, son allure provocante et sa proximité troublante attirant immédiatement l'attention de Jordan.

« Monsieur Attal, Monsieur Moreau, je vais devoir vous demander de mettre vos ceintures de sécurité et de vous abaisser dans vos sièges. Un véhicule semble nous suivre, je vais tenter un détour », déclara Jordan d'un ton calme mais ferme, gardant les yeux fixés sur la route.

Sans poser de questions, Alexandre et Charles s'exécutèrent, un regard d'inquiétude partagé se croisant dans le rétroviseur central, reflet de l'angoisse montante. La tension était palpable, l'atmosphère dans l'habitacle devenait oppressante. Jordan, quant à lui, serra les mâchoires et accéléra légèrement, ses mains crispées sur le volant. Il savait que chaque seconde comptait.

Les rues défilaient à une vitesse croissante, les lumières des réverbères se brouillant dans le flot d'adrénaline qui envahissait l'habitacle. Pourtant, la voiture suspecte restait obstinément derrière eux, imitant chaque virage, chaque accélération. Jordan tenta plusieurs manœuvres, cherchant à brouiller la piste, mais rien n'y faisait. L'ombre de la menace se rapprochait inexorablement.

Ce soir-là, tout pouvait basculer. Une nuit qui semblait paisible se transformait en une course contre le danger.

La nuit parisienne défilait dans un flou inquiétant de lumières tremblotantes, un ballet d'ombres et de phares qui peignaient des reflets sinistres sur le pavé humide. Le moteur du coupé Mercedes noir, d'habitude si silencieux, grondait à travers les rues comme un prédateur blessé, tandis que Jordan, les mâchoires crispées et les mains fermement agrippées au volant, fendait l'obscurité à une vitesse vertigineuse.

Dans le rétroviseur, les phares d'un autre véhicule surgissaient, implacables, comme des yeux traqueurs qui se rapprochaient à chaque seconde.

Gabriel, assis à l'arrière, fixait l'horizon avec une intensité fiévreuse. Ses yeux, habituellement si vifs et calculateurs, trahissaient cette fois une peur sourde. Charles, à ses côtés, plus pâle encore sous la lueur vacillante des écrans de contrôle, respirait difficilement. Son souffle était saccadé, témoin d'une angoisse qu'il tentait vainement de contenir.

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