Chapitre 8

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TW : cet épisode traite de conséquences suite à des abus sexuels, pour lecteurs avertis !

Alex rentre en début de soirée. Il ne cherche pas à ouvrir la discussion, sachant que je n'y participerais pas et se contente de me saluer. Je n'ai pas bougé de la journée, prostrée sur le canapé, j'ai l'impression d'avoir fusionné avec. Les larmes roulaient sur mes joues de temps à autre mais simplement par automatisme. Je ne ressentais plus grand chose, simplement de la honte et du dégoût pour moi-même.

J'ai passé la plus grande partie de mon temps à regarder dans le vide et maintenant je dois me préparer pour un rendez-vous auquel je n'ai pas envie de me rendre. Je vais dans ma chambre, ouvre le rideau de mon armoire et contemple mes vêtements. Pour la plupart des jupes. L'idée d'en porter une me révulse et je n'ai que quelques pantalons. J'en emprunte un à Alex qui a quasiment le même gabarit de jean que moi. Je me débrouille comme je peux pour recouvrir mon corps. J'imagine que ça fera l'affaire. Je me coiffe maladroitement; je ne veux pas me retrouver encore une fois face à mon reflet et refaire une crise.

Je salut rapidement Alex qui me regarde interloqué :

- "Tu vas où comme ça ?"

- "J'ai promis à une amie de la rejoindre pour boire un verre, je ne veux pas l'inquiéter sachant que ça fait maintenant deux jours que je ne lui donne aucun signe."

- "Mmh..Je sais pas si c'est une bonne idée."

- "Je n'ai pas le choix, ce n'est qu'une soirée je devrais m'en sortir."

- "Mouais. Fais attention à toi."

- "Promis ! A tout à l'heure."

Je lui lance un sourcil et appelle un taxi pour m'amener à destination.

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A peine arrivée, j'aperçois déjà Sonia de l'autre côté de la rue, me faisant des grands signes. J'inspire un bon coup. Ça ne devrait pas être si terrible. Je traverse et elle me prend dans ses bras. Je me raidis mais je dois faire bonne figure alors je l'enlace lentement à mon tour. Nous entrons dans le bar et mon amie commande deux sangria, de quoi bien commencer la soirée. J'accepte avec un sourire un peu trop forcé à mon goût.

On commence à discuter et je me détends petit à petit. Les verres s'enchaînent et je dois dire que ça m'aide énormément dans la soirée. Sonia est vraiment drôle et explicite. On aborde pas mal de sujets : d'abord la fête de fin de semaine, puis du travail, on programme de futures sorties et en débouche sur le sujet de l'être humain. On parle très juteusement des femmes et partageons un avis bien tranché sur les hommes :

- "De toute façon ils n'ont jamais servi à rien. A part aider la femme à avoir des enfants, je ne vois pas vraiment ce qui explique leur présence sur cette terre." Dit mon amie, avant de finir d'une traite son verre de vodka pomme et d'en commander un autre, à l'orange cette fois-ci.

- "Je suis totalement d'accord ! N'avoir que des femmes serait une aubaine pour ce monde." Dis-je, essuyant mon 3e verre de whisky.

Je me sens un peu vaseuse, tandis que Sonia continue de baver sur la gente masculine. Les souvenirs et les pensées remontent. Je m'éclipse en douceur et quitte la pièce pour aller aux toilettes. Je n'ai presque pas le temps d'arriver au dessus de la cuvette et je régurgite la soirée. En effet, je pense qu'Alex avait raison, ce n'est pas une bonne idée. Je me rince la bouche, ressors des sanitaires et attrape précipitamment mon sac à main :

- "Je dois y aller, on se voit une prochaine fois ?"

- "Quoi, déjà ?! Mais il n'est pas tard ! Reste encore un peu !"

- "Désolé Sonia, il faut vraiment que je rentre, je ne suis pas chez moi et je ne veux pas embêter mon hôtel en plein milieu de la nuit. A plus."

Je dépose la moitié de la note en argent et sort rapidement sous le regard perplexe de mon amie.
J'appelle un taxi et rentre le plus vite possible.

Arrivée devant la porte, je tente de l'ouvrir mais impossible, elle est verrouillée. Je toque doucement et Alex m'ouvre rapidement. Il devait être prêt à se coucher au vue de son pyjama et du masque au charbon qui recouvrait son visage.

Je rentre sans un mot avec une démarche quelque peu tremblante. Mon ami me soutient jusqu'à ma chambre et m'allonge sur le lit. J'ai chaud. Il essaie de m'aider à enlever mon pull mais je me raidis violemment et il me lâche comme s'il s'était fait brûler :

- "Excuse-moi.. Je ne voulais pas.." Murmure-t-il.

Mes larmes commencent à perler aux coins de mes yeux.

- "Ce.. Ce n'est pas grave. Tu n'y es pour rien." Tentais-je pour le rassurer.

Il recula lentement et quitta la pièce la tête baissée. Je m'en voulais vraiment de lui faire endurer ça, de lui mettre ce poids sur les épaules. J'avais honte de ne pas pouvoir me débrouiller de moi-même et de devoir compter sur une personne qui n'a rien demandé. Je vais commencer à travailler dès demain et je gagnerais assez d'argent pour prendre mon indépendance et laisser mon confident tranquille.

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Je ne trouve pas le sommeil et me retourne dans mon lit. Ne rien faire m'angoisse parce que c'est dans ces moments là que mes pensées reviennent à la charge et m'embrouillent le cerveau. Mais je n'ai aucune envie de faire quelque activité que ce soit. Peindre peut-être ? Non, je n'en ai pas envie.
Lire sans doute ? Pas plus, les mots se mélangent dans mes yeux et je ne peux pas me concentrer. Ou simplement être sûr mon téléphone ? Je n'y trouve aucun intérêt. Je ne peux que rester là, allongée, à regarder dans le vide, espérant peut-être un miracle ou une aide mystérieuse qui viendrait effacer ces souvenirs hideux qui remplissent mon cerveau à longueur de temps. Mais ça n'existe pas. Personne n'est sauvé par une aide venue de nulle part sauf les protagonistes de livres à l'eau de rose. Je ne suis pas dans ces livres et je n'ai aucune envie d'y être.

A force de questionnement je finis par m'endormir mais toujours avec ces pensées me dévorant lentement de l'intérieur...

Maybe she can make me forgetOù les histoires vivent. Découvrez maintenant