CHAPTER SIX

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ALENA OZEROVA





Vendredi 9 novembre 2001.
Russie, St Petersburg.

Le toit s'étend devant moi, immense, presque infini dans cette lumière de l'aube qui semble adoucir chaque contour. Les tuiles grises, abîmées par le passage du temps et les saisons, crissent légèrement sous mes pas.

Chaque mouvement semble résonner, malgré le silence environnant, comme si le toit lui-même portait la mémoire des générations de danseurs passées par ici, cherchant, tout comme moi, un moment de solitude avant le tumulte des répétitions.

L'air est frais, presque mordant, imprégné de cette humidité légère qui accompagne les premières heures du jour. Autour de moi, les couleurs du ciel commencent à changer subtilement, le bleu profond de la nuit s'effaçant peu à peu pour laisser place à des teintes douces de rose, de lavande et d'abricot, comme un tableau délicatement peint.

Je m'avance lentement vers le bord du toit, mes doigts glissant machinalement le long du parapet de métal qui court autour du bâtiment. Le métal est glacé sous mes mains, encore trempé par la rosée qui a perlé au cours de la nuit. Cette sensation froide contre ma peau est vivifiante, comme un rappel de la pureté de l'aube.

Le toit lui-même est un espace vaste et presque vide, un lieu oublié, rarement fréquenté, où les traces du passage du temps se révèlent à chaque fissure, chaque tâche d'usure sur les ardoises irrégulières. C'est ici, dans cet endroit isolé, que je me retrouve le matin, loin des exigences du studio, des jugements silencieux des professeurs, et des attentes constantes.

Je m'accoude sur le parapet, m'y agrippant légèrement, et laisse mon regard se perdre dans la vue qui s'étend en contrebas. D'ici, la ville paraît presque irréelle, figée dans une sorte de sommeil tranquille, comme si le monde hésitait encore à s'éveiller pleinement.

Les toits des immeubles s'étalent à perte de vue, certains plongés dans les ombres de la nuit qui s'accrochent encore aux coins des rues, tandis que d'autres commencent tout juste à capter les premières lueurs dorées du jour.

Les fenêtres des bâtiments sont noires, fermées sur l'intimité de ceux qui dorment encore, et les rues en contrebas sont désertes, comme abandonnées. Je peux discerner le tracé des artères principales de la ville, leurs pavés encore humides de la rosée matinale, sur lesquels les réverbères vacillent avant de s'éteindre un à un.

Le vent, léger mais constant, effleure mon visage, soulevant des mèches de mes cheveux et les faisant danser doucement autour de ma tête. Je ferme les yeux un instant, laissant ce souffle frais m'envahir, me purifier, comme si je pouvais, ne serait-ce que pour quelques secondes, me libérer de tout ce qui pèse sur mes épaules. Il y a dans cet air matinal une odeur de renouveau, de pureté.

Il s'insinue sous ma peau, mais je refuse de bouger. Je resserre un peu plus mon gros pull en maille kaki autour de moi. Les mailles épaisses sont agréablement rugueuses contre mes doigts, comme une armure douce contre le vent glacé.

Il est légèrement trop, tombant sur mes hanches, et recouvrant mes doigts gelés. Il cache à moitié la jupe noire en crayon que je porte en dessous. La laine du pull contraste avec le tissu lisse de la jupe, comme deux mondes qui ne devraient pas aller ensemble, mais qui fonctionnent parfaitement sur moi.

Le froid s'insinue le long de mes jambes nues, serpentant comme un souffle venu d'ailleurs, glaçant chaque parcelle de peau offerte à l'aube. Le frisson qui me traverse est silencieux, presque imperceptible, mais il s'étend de mes chevilles jusqu'à mon cœur, comme une vague invisible.

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⏰ Dernière mise à jour : Sep 21 ⏰

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𝐇𝐨𝐥𝐝 𝐘𝐨𝐮𝐫 𝐁𝐫𝐞𝐚𝐭𝐡 [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant