Julia Ogden couchait Susannah dans sa chambre lorsque William rentra chez eux. Il ne prit pas la peine d'ôter son manteau, juste son chapeau, qu'il posa sur la table à côté de lui, en s'asseyant. Il savait. Il savait qu'il ne pouvait plus se voiler la face. Qu'il ne pouvait plus continuer de vivre ainsi. Bien sûr, sa femme et sa fille le comblaient de bonheur, mais il lui manquait quelque chose. Ce quelque chose qu'il avait toujours nié, qu'il avait toujours accepté chez d'autres mais jamais chez lui-même, tant il voulait renvoyer l'image de famille parfaite vantée par la société, et tant il voulait se rapprocher d'une certaine image de Dieu et de Ses enseignements. Mais sa religion était-elle réellement contre cette face de lui ? Était-Il réellement contre les minorités ? D'un côté, il avait toujours été convaincu que non, mais de l'autre... de l'autre, il faut bien l'avouer, il l'avait quelque peu internalisé.
Ce paradoxe interne l'effrayait, mais ce qu'il l'effrayait encore plus, c'est la réaction de son épouse. Pourrait-il continuer de la voir, après cela ? Pourrait-il continuer de faire partie de la vie de sa fille, de l'élever ? Il était certain qu'elle demanderait le divorce, ça serait tellement logique, après tout. Comment est-ce que ce divorce serait-il perçu par sa hiérarchie ? Comment le justifier ? Il savait qu'il était, pour certains dans sa haute hiérarchie, une cible à abattre. Il l'avait déjà été, par le passé. Il est incorruptible, et il met tous coupables en prison, même s'il s'agit d'une personne ayant du poids dans la société. Ce qu'il s'apprêtait à dire à Julia devait être tût, puisque ça pourrait lui coûter très cher.
Julia descendit l'escalier, Susannah dormait sans doute. Elle entra dans le salon, et perdit son sourire en voyant l'air grave de son époux. Stressé, il serrait les dents, baissait la tête. Il n'osait pas affronter son regard. Sa gorge était nouée. Elle, elle sentait bien qu'un problème était sur le point d'être mis en lumière. Une tempête grondait sur leur couple. Elle sentit l'angoisse monter en elle.
« William... ? Que se passe-t-il... ?
- Assis-toi, je t'en prie... »
Lentement, elle s'assit face à lui, ne le quittant pas du regard. Il se racla la gorge.
« Je crois qu'il n'y a pas de bonne manière de dire cela... sache que tu es la première à qui je l'annonce, et tu comprendras aisément que je ne souhaite pas l'ébruiter...
- Tu me fais peur, William... »
Il releva la tête. Il la regarda un instant, puis laissa son regard vaquer entre son épouse et la table, au fur et à mesure de la conversation.
« Je ne souhaite pas briser notre vie, notre famille, tout cela me rend heureux, crois-moi. J'ai besoin de te garder dans ma vie, et Susannah aussi, je vous aime toutes les deux, sois-en certaine.
- J'en suis certaine. De quoi veux-tu me parler... ?
- De James.
- James... ?
- Pendrick.
- Je m'en doute qu'il s'agit de James Pendrick, mais que vient-il faire dans cette conversation ? »
Murdoch baissa les yeux, de nouveau.
« Je... je l'aime. Toi aussi. Je vous aime tous les deux, de la même manière. »
Des larmes montèrent aux yeux de Julia, qu'elle se retint de déverser. Elle tentait de maîtriser sa voix au mieux, mais ne put l'empêcher de chevroter légèrement.
« Est-ce que tu te rends compte de ce que tu me dis, William ?
- Je sais... je sais... »
Des larmes montaient aussi dans ses yeux, tandis que Julia tentait de sécher les siennes.
« Comment envisages-tu l'avenir ? Susannah est trop jeune pour une garde partagée, et...
- Je ne veux pas vous perdre, toutes les deux... Je t'aime, je l'aime, et j'aime notre vie à deux... j'ai juste besoin de James dans l'équation... »
Un silence pesant s'installa. Bien qu'elle comprenait et qu'elle se refusait de juger en tant que médecin et psychologue, c'était une toute autre chose lorsque ce genre de choses la touchait elle et sa famille. C'était un bouleversement qu'elle ne pouvait assimiler d'un coup d'un seul.
« William... j'aurais besoin d'y réfléchir... d'y réfléchir à tête reposée...
- Bien sûr...
- Seule... Vu qu'il est tard, tu pourras partir demain matin de la maison avec quelques affaires, on en rediscutera au travail quand je me sentirai prête... »
Il acquiesça.
« Ne t'en fais pas, je pars dès ce soir... »
Face au silence de son épouse, qui restait interdite, il se leva et prépara sa valise avec quelques affaires nécessaires pour tenir une semaine. Avant de s'en aller, il regarda un instant sa fille dormir à travers la porte ouverte de sa chambre. Il descendit l'escalier, échangea un regard entendu avec Julia, puis sortit dans l'obscurité de la nuit.
Murdoch toqua à la porte en chêne qui se présentait devant lui. C'est James Pendrick qui lui ouvrit. Lorsqu'il réalisa qui se tenait devant lui, il eut l'air surpris.
« Que me vaut cette visite, inspecteur ?
- Disons que... ce n'est pas l'inspecteur qui se tient devant vous, mais l'ami... »
Il souleva sa valise en la regardant, attirant ainsi l'attention de Pendrick sur son bagage.
« Nous avons un différent avec mon épouse, on dirait...
- Hmm. Entrez donc, je vous en prie. Vous dormirez dans le bureau, j'ai un lit de camp que je peux mettre à votre disposition.
- Merci beaucoup, James. »
William put entrer et s'installer. Les journées suivantes se sont enchaînées, un froid, une gêne toujours bien présentes entre les deux époux. William pouvait néanmoins compter sur le soutien de James.
Un samedi soir, après le dîner, Pendrick se permit de demander :
« Puis-je connaître la nature de ce fameux différent, entre vous et Julia Ogden ? »
William se racla la gorge et planta ses yeux dans le regard de James.
« C'était... à votre propos, justement...
- A mon propos ? Je ne comprends pas...? »
La perplexité de Pendrick se lisait sur son visage, tandis que le regard de William s'illuminait.
« Vous savez, lorsque nous nous sommes connus, je vous pensais toujours coupable de crimes dont vous étiez innocent... mais je sais aujourd'hui de quoi vous êtes véritablement coupable.
- Ah oui, inspecteur ?
- Oui. Vous êtes coupable d'avoir volé mon cœur, James. »
Pendrick sourit.
« Et quelle sera ma peine, inspecteur Murdoch ?
- Que nous vivions ensemble jusqu'à ce que mort nous sépare, si vous y consentez, bien entendu !
- Hmm, une peine à perpétuité que je peux accepter ou refuser, intéressant... je l'accepte avec grand plaisir, William ! »
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L'inspecteur et l'inventeur
FanficUne fanfiction classique et sans prétention, née d'une question entre amis : et si William Murdoch et James Pendrick étaient plus qu'amis ? C'était donc l'occasion pour moi d'avoir un point de départ pour ma première fanfiction... j'espère que ça vo...