Chapitre 8: Réponse brulante

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— Tu m'as posé des questions plus ou moins intrusives. Et je n'ai pas le droit de t'en poser une aussi simple que celle-ci ?

Je me racle la gorge le plus silencieusement possible, pour ne pas dévoiler ma gêne. L'air de la voiture devient presque étouffant, lorsque son regard se pose ainsi sur moi.

Dans ses iris émeraudes, on a presque l'impression que le monde ne compte plus. Que les limites de l'univers ont été franchies et que le retour en arrière est impossible.

— Je t'ai vu entrer dans l'infirmerie, alors...

J'inspire, essayant de contrôler ma respiration.

— Alors je suis entré dans l'infirmerie, pour essayer de me rapprocher de toi.

Qu'on me fasse écraser par un train, je le supporterais mieux.

Il ne répond pas, son regard trop calme déviant entre la route et moi.

— Si tu penses être légitime de faire ça, après l'incident de la piscine. Arrête ça.

— Je ne fais pas ça à cause de ce qui s'est passé la dernière fois, ne te fais pas d'idée.

Pas en partie.

— Alors pourquoi ? Je ne pense pas que tu souhaites non plus te créer des relations dans le cadre des affaires de nos parents. Ça m'avantagerait plus que toi dans tous les cas.

— Ne me parle pas comme si tu me connaissais sur le bout des doigts.

— Bien. Alors dis-moi. Dis-moi la vérité. Dis-la-moi au lieu d'agir comme si je n'étais qu'un jeu que tu dois résoudre pour occuper ton esprit.

— Un jeu ? je pouffe nerveusement.

S'il pense avoir tiré dans le mille, il est à côté de la plaque.

— Je ne sais pas pour qui tu me prends, Maël, mais je n'ai pas d'idée aussi perfide derrière la tête lorsque je m'approche de toi. Tu sais quoi ? Je t'ai vu dans un moment de ta vie où tu as eu le malheur de fléchir devant moi. Et inversement. Alors on est à égalité sur ce point-là.

Je reprends ma respiration avant de continuer d'un ton plus calme.

— Ce n'est pas parce que je te montre de l'intérêt que tu peux t'octroyer tous les droits sur ta façon de parler de moi.

Il ne répond rien pendant un court laps de temps avant d'ajouter d'une voix aussi posée qu'à son habitude :

— Je vais essayer de te croire.

— De ?

— Que tu n'as pas d'idée malhonnête, disons.

C'est déjà ça de fait, même si ce n'était pas vraiment ce que j'espérais.

— C'est à moi de te poser une question. Qu'est-ce que tu t'es fait pour aller à l'infirmerie ?

Je le sens me toiser quelques secondes avant de répondre, d'une voix toujours hésitante. Il doit sûrement penser qu'il m'en dira trop, et qu'on ne devrait pas me faire confiance. Je dois lui prouver le contraire.

— Les médecins disent que je me surmène trop, et qu'il n'est qu'une question de temps avant que je lâche. Ce n'était pas très grave tout à l'heure, je n'étais pas allé très loin, mais...

— Il y a eu des cas plus graves ?

— Ça fait deux questions, Jude. Arrêtons-nous là.

Je n'insiste pas plus. Il se gare près de l'immeuble de mon appartement. Je quitte sa voiture en le remerciant brièvement avant qu'il ne sorte vite de mon champ de vision.

Une deuxième journée à ajouter à la liste de celles foirées de la pire manière.

Une fois à mon étage, je compose le code de mon appartement, pousse la porte d'entrée puis la claque. Avant de m'y assoupir... enfin, jusqu'à ce que je reconnaisse une silhouette au fond de mon salon, assise sur mon fauteuil.

Mon cœur se glace lorsque je comprends qui c'est.

Et à cet instant, j'aimerais juste raisonner et gifler l'ancienne moi qui a osé lui donner mon code d'entrée. Je ne me suis jamais sentie aussi stupide que maintenant d'avoir oublié que je le lui avais donné, et de ne pas l'avoir changé.

Car désormais, je ne suis même plus sûre de l'avenir de ma vie, avec Jesse Harinson dans la même pièce que moi.

Cette journée n'aurait pas pu se finir plus mal.

Burning HeartOù les histoires vivent. Découvrez maintenant