L'inconnu

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Au moment où je me retourne, je me retrouve face à son torse. Il est immense. Je suis obligée de lever la tête pour croiser son regard. Mon Dieu, il est... il est... Tout s'arrête. Mon esprit se fige. Je ne parviens même plus à réfléchir. Lui, il me fixe, comme s'il était déconnecté de la réalité, perdu dans ses pensées. 

Pourquoi mon corps s'échauffe-t-il soudainement ? Non, ça ne va pas. J'ai une envie irrépressible... Non ! Je ne vais pas penser à ça. Qu'est-ce qui me prend ? Je ne le connais même pas... Mais ses yeux...

Stop. Il faut que je me reprenne.

— Sa... salut. Tu es perdu ? Je peux t'aider ? balbutié-je maladroitement.

Pourquoi est-ce que je n'arrive plus à parler normalement ? Lui, il continue de me fixer, silencieux. Deux secondes. Peut-être trois.

— Salut. On se connaît, non ? Ton visage me dit quelque chose, lâche-t-il enfin.

— Euh... non, enfin je ne crois pas. Tu es nouveau ici, non ? Je ne t'ai jamais vu en ville.

— Ouais, on peut dire ça.

Il lève les yeux au ciel et regarde vers l'entrée de la salle. Un frisson me parcourt l'échine.

— Tu es dans cette salle, c'est ça ? demande-t-il.

Pourquoi veut-il savoir ça ? Il commence vraiment à me faire peur.

— Oui, je suis avec...

Il me coupe la parole d'un geste brusque et entre dans la salle sans un mot de plus. Je reste là, abasourdie, incapable de bouger pendant plusieurs secondes, avant de le suivre, malgré moi.

Marie m'accueille avec un regard accusateur.

— T'étais où ?! J'ai cru que tu t'étais perdue ou que t'avais manqué d'oxygène. T'as raté la meilleure partie !

— La meilleure partie ? Là où il n'y a que des cadavres ? ironisé-je.

— Exactement, cette partie-là ! hurle-t-elle, les yeux brillants d'excitation.

Je pouffe de rire. J'adore la voir s'énerver comme ça, parce qu'elle aime que je ne rate jamais un détail de ce qui l'enthousiasme. C'est ce que j'apprécie le plus chez elle.

La séance se termine et nous nous préparons à sortir. En enfilant ma veste, je me retourne et... là, dans l'ombre, je crois apercevoir cet inconnu. Est-ce qu'il m'a observée tout le long du film ? Non, c'est impossible... Je dois me faire des idées. Pourtant, il ne détourne pas le regard. Et moi non plus. À chaque fois que je le fixe, c'est comme si quelque chose m'empêchait de détourner les yeux, comme si on communiquait en silence.

Marie me donne une petite tape sur l'épaule.

— Eh, je peux savoir qui tu regardes comme ça ?

— Le gars en face, tu le connais ?

— Quel gars ? Y a personne...

Je me retourne brusquement. Il a disparu. Comment a-t-il pu partir aussi vite ?

— Mais... Il... Laisse tomber, soufflé-je. Bon, rentrons. Je commence à être fatiguée. Lizon doit venir me chercher.

En sortant du cinéma, je m'appuie contre le mur, les pensées encore embrouillées par ce qui vient de se passer. Je ne peux m'empêcher de repenser à cet inconnu. Son visage, son regard... quelque chose cloche. J'entends alors un klaxon familier. Lizon, au volant de sa petite voiture, m'attend devant l'entrée.

— Allez, monte ! s'exclame-t-ils en souriant.

Je monte dans la voiture, encore troublée par mes pensées. Tout le trajet se passe dans le silence. Lizon me jette quelques coups d'œil inquiets mais ne dit rien. Je n'ai pas décroché un mot. Je n'ai fait que penser à ce jeune homme et à ce que j'ai ressenti en croisant son regard. Je ne suis jamais tombée amoureuse, seulement des coups de cœur. Mais l'idée de me mettre en couple m'a toujours terrifiée. Pourtant, pour la première fois, je ressens une étrange connexion, comme si quelque chose de profond m'attirait vers lui.

ET MeeRDEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant