Chapitre 6 : L'érèbe

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Dans l'obscurité feutrée de la pièce, après que la trappe s'est refermée dans un bruit sourd et définitif, je prends une profonde inspiration. Ma veste en cuir, lourdement usée par les années, se moule autour de moi comme une seconde peau, réconfortant dans sa familiarité. Elle a été témoin de tant de moments sombres, et ce soir n'en sera qu'un de plus. Tandis que je descends prudemment les escaliers de métal, chaque pas résonne dans le vieux sous-sol. Ce lieu n'est pas simplement une cellule improvisée, mais un espace chargé d'une histoire que je préfère ne pas connaître, hanté par les échos de ceux qui y sont passés, trop effrayés ou trop brisés pour sortir de ces murs humides et rongés par le temps.

Derrière moi, deux silhouettes avancent dans la pâle lueur des néons défectueux, rendant l'atmosphère encore plus sinistre. Mes hommes de main, inébranlables et fiables, avancent avec une détermination implacable. Leur regard fixe et leur silence sont rassurants ; ils connaissent leur métier et leur allégeance est inébranlable. J'ai pris soin de m'entourer des meilleurs, des hommes à qui je peux confier les tâches les plus sombres sans jamais douter de leur exécution. Chacun a ses secrets, ses raisons de me suivre dans cette voie et, avec une exacte précision, ils opèrent loin du chaos potentiel qui pourrait briser ce fragile équilibre entre la justice et la vengeance.

Nous parvenons au bas de l'escalier, où se dresse devant nous une massive porte de fer. Elle se détache dans cette obscurité, immuable témoin de nos actions. Mon cœur bat au rythme d'un tambour déterminé et régulier tandis que mes hommes poussent la porte, qui s'ouvre dans un grincement métallique, semblable à un condamné traînant ses chaînes.

À l'intérieur, l'homme est couché, inconscient sur le sol, sa chute de plus de cinq mètres l'ayant plongé dans une torpeur involontaire. Les néons, clignotant au-dessus de nous comme des yeux fatigués, diffusent une lumière blafarde sur son visage inexpressif. Avant même qu'il n'apprécie pleinement la douleur de son atterrissage ou ne grappille à la surface de la conscience, l'un de mes hommes s'affaire. Avec une efficacité redoutable, il sort une seringue de sa poche intérieure et injecte son contenu dans le bras du prisonnier, un sédatif puissant qui ralentira son éveil.

À côté, l'autre homme prépare les liens, ses gestes aussi précis que ceux d'un chirurgien. Il attache l'homme à la chaise solidement ancrée au centre de la pièce. Cette scène, une macabre danse de routine, se déroule comme une chorégraphie maintes fois répétée. Moi, spectateur silencieux de ce drame, je ressens le poids invisible de notre mission commune.

Mes deux hommes, comme deux statues vigilantes, attendent en silence, leur patience aussi redoutable que le sort qui guette notre captif. Pendant ce temps, l'homme, enchaîné à sa propre vulnérabilité, commence à revenir à lui. Son retour à la conscience est un processus laborieux, une lutte entre l'esprit et le corps que je surveille attentivement depuis l'ombre, mon inquiétude se mêlant à l'impatience.

Son réveil est marqué par un tressaillement au coin de ses lèvres, avant que ses paupières ne s'ouvrent lentement, dévoilant un regard embrouillé par le choc et la confusion. Dans sa première tentative d'interaction, sa voix jaillit comme un râle déformé.

— Mais... qui êtes-vous ? Pourquoi suis-je ici ?

Ses mots flottent dans l'air, sourds et résonnants dans l'écho lugubre de l'espace, tandis qu'il essaie de comprendre l'ampleur de sa situation.

Je laisse une pause intentionnelle s'installer entre nous, laissant le poids de mes prochaines paroles se former avec soin. Je m'avance, rompant enfin le silence de ma présence, chaque pas mesure un rappel de la situation désespérée dans laquelle il se trouve. Quand j'atteins enfin la lumière, il peut distinguer mes traits, et l'angoisse s'immisce davantage dans son regard.

— T'es dans le ventre même de ta propre culpabilité, dis-je calmement, mes mots coupant l'air comme une lame aiguisée.

Il se débat verbalement, cherchant à se défendre derrière un écran de confusion, mais ses yeux trahissent déjà une lueur d'inquiétude.

— Quel est ton nom ?

Under The raven's featherOù les histoires vivent. Découvrez maintenant