LE COMTE BLACKWOOD

CHAPITRE 1: le début de la fin

Le soleil se levait à peine sur le village de Northumberland, teignant le ciel de teintes pastel tandis que Mary Katherine arpentait les ruelles étroites, son cœur battant d’une excitation mêlée d’anxiété. La veille, elle avait reçu une lettre du comte Alaric Blackwood, une invitation inattendue qui bouleversait sa vie. À dix-huit ans, elle était prête à embrasser de nouveaux défis, mais elle n’aurait jamais imaginé que l’opportunité se présenterait sous la forme d’un poste de domestique dans l’un des manoirs les plus célèbres de la région.

Gabriel Montgomery, le fidèle valet du comte, avait été le fil conducteur qui l’avait menée jusqu’ici. Sa réputation le précédait, et les murmures dans le village le dépeignaient comme un homme sage, témoin des événements tumultueux de la vie du comte. Mary se souvenait encore de la première fois qu’elle l’avait rencontré, un jour d’automne où elle était venue vendre des pommes dans le marché local. Son air serein et son regard pénétrant l’avaient fascinée, et elle s’était surprise à l’écouter parler des traditions du manoir, des fêtes grandioses et des histoires murmurées dans les couloirs sombres.

C’était alors qu’il lui avait glissé, avec une douceur rare, que le comte cherchait une aide supplémentaire pour gérer la maison. L’idée d’entrer dans le monde mystérieux du manoir l’avait immédiatement séduite. Elle avait osé poser des questions, intriguée par les secrets que pouvait renfermer une telle demeure. Gabriel, toujours avec ce sourire en coin, avait promis de parler de ses capacités au comte.

Et voilà que maintenant, quelques jours plus tard, Mary se tenait devant les grilles massives du manoir de Blackwood. Les grandes portes en bois sculpté, ornées de ferronneries délicates, s’ouvraient lentement, dévoilant un monde qui lui semblait à la fois magnifique et intimidant. À l’intérieur, les murs de pierre étaient recouverts de riches tentures et de portraits aux visages austères, témoins d’une lignée ancienne.

Elle emprunta le long couloir qui menait aux cuisines, son cœur s’accélérant à chaque pas. Les souvenirs de son enfance, de sa mère s’efforçant de nourrir une famille avec peu de moyens, ressurgirent. Elle avait toujours rêvé d’une vie plus grande, d’un lieu où elle pourrait laisser libre cours à son potentiel. Ce manoir représentait cela, une échappatoire à la monotonie de sa vie quotidienne.

Dans la cuisine, l’odeur du pain frais et du café emplit l’air. Elle fut accueillie par une cuisinière au visage rond qui lui jeta un coup d'œil curieux. Mary se présenta, et la femme, après avoir brièvement étudié son apparence, lui fit un signe de tête d’un air distrait. L’atmosphère était déjà chargée de travail, et elle se mit rapidement à aider, découvrant la cadence rapide de la vie au manoir.

Gabriel entra peu après, sa silhouette élancée et son allure calme apportant un certain apaisement dans cette ruche d’activité. Il la salua avec un léger sourire, et Mary sentit son cœur se détendre. C’était le lien qui l’avait amenée ici, et en le voyant, elle comprit qu’elle n’était pas seule dans cette aventure.

« Vous vous en sortez bien, Mary, » murmura-t-il, son ton rassurant au milieu du tumulte. « Je suis sûr que le comte appréciera votre travail acharné. » Son regard s’assombrit légèrement, comme s’il pesait une pensée secrète, mais il ne la partagea pas, respectant le silence qui l’entourait.

Au fil des heures, Mary se familiarisa avec son nouveau milieu. Chaque tâche, qu'il s'agisse de préparer les repas ou de ranger les ustensiles, était l'occasion pour elle de s'imprégner de l'atmosphère singulière du manoir. Les cris des enfants du comte, qui jouaient dans le jardin, résonnaient à travers les fenêtres, ajoutant une touche de vie à cet édifice chargé d’histoire.

Bien qu’elle n’ait pas encore rencontré Alaric Blackwood, Mary se sentait déjà connectée à cette maison. Elle s’émerveillait des détails minutieux, des fresques au plafond aux sculptures sur les meubles. Tout ici semblait raconter une histoire, et elle avait l’intime conviction que son propre récit était en train de s’entrelacer avec celui de Blackwood.