Peau de Louve [DARK ROMANCE]

La première chasse

La lune est haute quand je le vois se lever. Ses yeux d'or luisent dans l'obscurité de la grotte alors qu'il s'étire, ses muscles puissants roulant sous sa fourrure noire. L'heure de la chasse.

Sans réfléchir, je me redresse. Mes plaies sont à peine cicatrisées, mais une force nouvelle pulse dans mes veines. Il se retourne en m'entendant bouger, un grognement sourd montant de sa gorge - un avertissement. Je ne devrais pas le suivre. Je devrais rester là, dans la grotte, comme la créature faible et brisée qu'il a recueillie.

Mais je ne suis plus cette créature.

Je fais un pas. Son grognement s'intensifie. Je fais un autre pas. Mes pieds me font encore mal là où les clous m'ont transpercée, mais la nuit semble apaiser la douleur. Un troisième pas et je trébuche sur un os. En un instant, il est là, son flanc massif me soutenant, m'empêchant de tomber.

Je m'agrippe à sa fourrure épaisse, reprenant mon équilibre. Son odeur m'enveloppe - sang, musc, nuit. Il essaie de me pousser vers le fond de la grotte avec son museau, mais je résiste.

Nos regards se croisent dans l'obscurité. Je ne cèderai pas.

Un soupir qui ressemble presque à de l'exaspération lui échappe. Il se met en route, ralentissant délibérément son allure. Je le suis, boitant légèrement. L'obscurité ne me gêne plus autant qu'avant - mes yeux semblent s'adapter différemment aux ténèbres. Tous les quelques pas, il se retourne, ses yeux dorés brillant dans la nuit comme deux lunes miniatures.

La forêt nocturne vibre autour de nous. Il me guide à travers des sentiers invisibles, s'arrêtant parfois pour me laisser reprendre mon souffle. Je comprends qu'il adapte son rythme au mien, lui qui pourrait couvrir cette distance en quelques bonds.

Soudain, il se fige. Son corps entier se tend, ses oreilles pointées vers l'avant. Dans la clarté lunaire, je l'aperçois - un cerf qui s'abreuve à une source, ses bois projetant des ombres fantomatiques.

L'Alpha s'accroupit, se fondant dans les ténèbres. Je tente de l'imiter mais mon pied heurte une pierre. Le bruit, à peine audible pour moi, résonne comme un tonnerre dans la nuit silencieuse. Le cerf redresse la tête, aux aguets. J'essaie de me figer mais je perds l'équilibre, mes mains s'abattant dans les feuilles mortes avec un bruissement qui déchire le silence.

Le cerf s'évanouit dans la nuit comme un fantôme.

L'Alpha tourne son regard vers moi, et dans la lueur argentée, je jurerais voir une étincelle amusée dans ses yeux d'or. Je hausse les épaules, ma frustration masquée par les ombres. Il secoue sa tête massive comme s'il réalisait que faire de moi une chasseuse ne serait pas une mince affaire.

"Je ferai mieux la prochaine fois," je murmure. "C'est promis."

Il s'approche, me pousse doucement du museau comme pour me dire que ce n'est pas grave, puis repart en quête d'une nouvelle proie. Cette fois, je fais plus attention où je mets les pieds.

Je ne suis plus la fille qu'on destinait au sacrifice. Je ne suis plus la victime clouée à un arbre. Dans cette nuit qui m'appelle, je deviens autre chose. Quelque chose entre l'humain et la bête. Et je dois apprendre.