6. Seconde chance

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Pdv Shoto


Franchement, j'en étais presque à espérer que ce Kenta me batte à mort. J'en avais marre de tout ça, que ce soit les soucis avec ma famille ou la culpabilité que je ressens envers Eijiro, c'était devenu insupportable.


Alors qu'il n'a pas dit grand-chose de plus que toutes ces fois où il tentait de me convaincre de venir chez lui, aujourd'hui c'est différent.

Peut-être parce que je lui ai posé directement la question et qu'il m'a fait comprendre que tout ça n'avait pas, ou plus, d'importance pour lui.


J'ai vraiment eu cette impression qu'il avait, en quelques phrases, effacé un immense tableau sur lequel étaient écrites toutes ces bonnes raisons que j'avais de refuser son aide.

C'est décidé, il m'offre une chance de redevenir son ami et cette fois, j'ai bien l'intention d'en être digne.


En premier lieu, je dois mettre de côté mes sentiments, ce serait tellement mal venu après tout ce que j'ai fait de les lui déclarer.

Dans un second temps, il est hors de question que je squatte ici pendant des lustres sans rien faire en échange.


Il me sort de la rue, m'accueille chez lui et m'a fait comprendre que je pouvais rester, alors la moindre des choses, c'est de trouver comment me rendre utile.

Enfin là, l'urgence est de manger un truc avant de tomber dans les vapes.


Sous la douche et ensuite pendant que je désinfectais les plaies sur mon visage, j'ai senti ma tête tourner.

De toute façon, si je n'avale rien et qu'Eijiro s'en aperçoit en rentrant, je vais me faire engueuler.


En ouvrant le frigo, je trouve un bol de soba, du bouillon ainsi qu'un œuf dur. À mon avis, c'était son repas de ce soir. Je parie qu'il m'a dit de me servir dans le frigo, et non de me préparer quelque chose à manger, parce qu'il sait que j'adore ça.


C'est du Eijiro tout craché de se souvenir de ce genre de détail, même des années après. Je passe le tout au micro-ondes, je m'installe au bar et me jette dessus.

Ça fait du bien de manger, et surtout, c'est vraiment trop bon.


Malgré ce bon repas, j'ai encore des vertiges, alors je décide d'aller me coucher une fois la vaisselle faite.

Je suis certain que mon crâne n'a cogné nulle part, donc ce doit être les coups et le manque de sommeil.


*****


Je sens quelque chose de frais sur mon front et j'entends des pas s'éloigner.


Shoto : Eijiro ?


Eijiro : Pardon, je t'ai réveillé. Tu as de la fièvre, repose-toi. Je vais profiter de ma tournée auprès des commerçants pour te prendre des médicaments


Shoto : Merci


Je crois qu'il ne m'a pas fallu plus de quelques secondes pour me rendormir. Lorsque j'ai ouvert un œil, Eijiro était en train de préparer le dîner. Je me suis fait réprimander pour être sorti du lit.


Il avait préparé un repas consistant et bien chaud que lui avait conseillé la pharmacienne, une vraie mère poule.

D'ailleurs, quand il m'a ordonné de retourner au lit après le repas, je n'ai pas pu m'empêcher de lui répondre "oui maman".


Les jours suivants, il a passé plus de temps avec moi qu'à l'épicerie, la laissant sous la surveillance de l'étudiant qu'il embauche pendant les vacances.

Grâce à ses bons soins, je me suis vite remis, puis j'ai passé les deux dernières semaines des vacances scolaires entre repos et formation.


En effet, ça m'est apparu comme une évidence, je me suis demandé pourquoi je n'y avais pas pensé tout de suite.

Dès notre seconde conversation, nous avions abordé le sujet du temps qu'il passait à bosser, de sa fatigue et du fait qu'il n'avait pas les moyens d'embaucher quelqu'un de permanent.


Je lui ai proposé de l'aider à l'épicerie, mais aussi dans les tâches ménagères. Jusqu'ici, il n'avait que son dimanche après-midi de congé et il le consacrait principalement à son ménage.


Là, il va pouvoir se reposer et aussi, lorsque je serai suffisamment autonome, en profiter pour aller à la salle de sport deux fois par semaine, comme il rêve de le faire depuis quatre ans.


Eijiro : Je t'ai préparé un contrat


Shoto : Ce n'était pas la peine


Eijiro : Si, j'y tiens, ça permet de t'assurer pendant le travail et surtout, ça comptera comme expérience professionnelle. Je t'ai mis 250 000 ¥ par mois, si ça te va


Shoto : Tu dois déduire un loyer et la nourriture si tu me verses un salaire


Eijiro : Je ne me rends pas compte de combien ça fait


Shoto : Environ les deux tiers de ce que tu veux me donner


Eijiro : Tant que ça ?!?


Shoto : À la base, je ne comptais pas être payé, hors là, il me restera de quoi m'habiller et je pourrais même mettre un peu de côté. Comparé aux perspectives d'avenir que j'avais y'a encore quelques semaines, c'est inespéré


Eijiro : J'aimerais faire plus


Shoto : T'en fais déjà bien assez


Eijiro : Bon, je vais rajouter ça à ton contrat. Tu as un compte en banque ?


Shoto : Nan, enfin si, mais je ne veux pas l'utiliser, je vais en ouvrir un autre


Eijiro : Dans ce cas, j'en parlerai à Mina ce soir, son mari travaille dans la banque où j'ai tous mes comptes. Enfin, il va falloir que je lui parle de toi tout court dans un premier temps


Ça l'a stressé toute la journée et je sais bien pourquoi. Il sait qu'elle va lui dire qu'il fait une connerie, qu'encore une fois, il est "trop bon, trop con".

À sa place, connaissant notre passif au lycée, sachant qu'elle a fait partie de ceux qui ont dû le soutenir lorsque je me suis éloigné, je réagirais pareil.


Je pense qu'une fois qu'il lui aura parlé et qu'il sera parti faire la distribution dans la ruelle, j'en discuterais avec elle.

Je préfère qu'elle sache tout et qu'elle n'accable pas Eijiro pour son choix de m'aider.


Puis pour être franc, avoir au moins une personne qui sait ce qu'il s'est réellement passé au lycée, puis avec ma famille il y a quelques mois, ça me fera le plus grand bien.

Mina est quelqu'un de sanguin, mais elle est aussi incroyablement gentille, alors je sais qu'elle écoutera et qu'elle comprendra.

Trop bon, trop con [KiriTodo] [En cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant