dans ma tête, un séisme
il m’habite comme un ami,
me couvre, m’enroule de ses bras
je ne le repousse pas
je me sens pourrir un peu
mes joues virent au rouge, au cramoisi
même mon reflet ne me reconnaîtrait pas
je dors d’un sommeil agité par des rêves dont je ne me souviens pas
je crois qu’ils n’ont jamais existé
le séisme dans ma tête rugit et je lui réponds en pleurant
je pleure comme une cascade
je pleure et je mets le feu
je m’immole dans ma tête dans ce séisme qui me fracasse
je sens le feu je pue le feu je suis le feu et ça vous fait bien rire
bête de foire, bête sauvage, sale bête, on me garde derrière des barreaux
on me fait prison, me fait taire
et je rêve de la mer
je saute d’un pont pour rejoindre la mer
la sensation des vagues qui passent au dessus de ma tête, qui engloutissent tout mon corps, jusqu’à ma dernière respiration, cette sensation-là je la chéris
je la garde, je la plaque contre ma poitrine et seules les étreintes savent me l’éloigner
cette sensation de perdre mon souffle, cette possibilité même ne me fait plus peur
la puissance des vagues me trimballe partout
je ne ressemble plus à rien
je ne suis plus rien
j’appartiens à la mer, je me soumets à elle
je fais ce choix-là dès que je me jette dans la mer à plein corps
c’est une offrande que je fais, un sacrifice que je mène à bien
quand je suis dans la mer, le séisme dans ma tête ne veut plus rien dire
il se tait il cesse d’être à l'affût
parfois, je rêve que je dors dans les vagues
que ce sont elles qui me bercent qui me consolent
les vagues ou l’ampleur de tes bras
sur tes bras aussi, l’écume se brise, vient à moi
sur tes bras, le blanc du sel et de mes yeux
dans ma tête le séisme n’est pas mort
et parfois il se propage comme une traînée de poudre
je me sens m’écrouler je me vois vomir je me vois hurler
je me vois et je brise le miroirje brise le miroir
je brise le miroir
je brise le miroir
et c’est la mer qui en sort
la mer dans tes yeux la mer à l’aube de tes morts
dans l’attente de tes souvenirs
la mer et le soleil qui lui tombe dessus, qui se suicide sur elle
la mer le feu le miroir
je brise la mer
je brise tes yeux qui ne me regardent plus
j’ai des mots dans la tête, mon séisme est aussi une fourmilière
c’est partout
j’ai des mots et des couleurs sur le corps
et la mer comme bénédiction
si je ferme les yeux assez fort tu n’existes plus
si je les ouvres assez grand tu me donnes un baiser
peut-être que l’incendie dans tes yeux est le reflet du brasier de mon corps
si je ferme les yeux cette fois-ci demain tu seras là à m’attendre
sur le pas de la porte, un bouquet de fleurs à la main et une larme sur la joue
je te ferai entrer - je me suis promis, un jour de misère, de ne jamais laisser les inconnus dehors - et je fermerai les yeux sur l’arme que tu tiens en tremblant
cette arme un coup de feu et je ne saurai jamais si on voulait s’aimer
une arme le visage rouge les flammes et le sang
l’odeur du sang qui me pousse à vomir, à tout recracher, à dégueuler les mots par litres
les mots par tonne, par poignées comme les cheveux que tu t’arraches
le sang le sang le sang le sang
je vois ton sang par terre
je sais ton sang sur la peau, celle que je caresse, que je lèche, que je chéris
le sang et la porcelaine
je me fracasse par terre, je tombe de l’étagère et le séisme toujours
si seulement demain pouvait se taire
et est-ce que si je ferme les yeux demain n’existe pas ?
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si je ferme les yeux assez fort
Poetrypour m'endormir, je me murmure "savoir nager empêche la noyade. savoir nager empêche la noyade, hein. savoir nager empêche la noyade, je crois. savoir nager empêche la noyade ?"