Koen

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La villa était plongée dans un silence oppressant, seulement troublé par le bruit lointain des invités qui s'attardaient dans les salons. La journée avait été éprouvante. Après l'enterrement de Javier, Caleb avait disparu, accaparé par ses responsabilités. Moi, j'avais besoin d'air, mais je n'avais pas eu la force de sortir.

Je me trouvais sur la terrasse arrière, face au jardin plongé dans l'obscurité. Les lumières tamisées de la maison se reflétaient sur les larges baies vitrées. L'air nocturne était frais, mais agréable, contrastant avec l'atmosphère suffocante qui régnait à l'intérieur. Je resserrai légèrement mon manteau autour de mes épaules, mes pensées dérivant encore et encore vers les événements de la journée.

— T'as l'air perdue, dit une voix grave derrière moi.

Je me retournai brusquement. L'ombre se tenait là, appuyé nonchalamment contre l'encadrement de la porte. Une cigarette pendait au coin de ses lèvres, et la lueur vacillante du briquet qu'il tenait illumina un instant son visage. Ses yeux verts semblaient briller dans la pénombre, presque irréels, et son expression, comme toujours, était indéchiffrable.

— Tu ne devrais pas fumer ici, murmurai-je sans conviction, plus pour combler le silence que par réel reproche.

Il haussa un sourcil amusé avant de tirer une longue bouffée, soufflant la fumée en un nuage léger qui s'éparpilla dans l'air nocturne.

— Et pourquoi pas ?

Je n'avais pas de réponse. Peut-être parce que cette maison, malgré tout ce qu'elle représentait, me semblait presque sacrée ce soir. Mais rien en lui ne respectait les règles, et c'était peut-être ce qui me fascinait autant.

— Tu es toujours aussi mysterieux ? demandai-je, croisant les bras pour masquer mon trouble.

Il sourit, un sourire discret mais suffisant pour éveiller ma curiosité.

— Je pourrais te retourner la question, répondit-il en s'approchant légèrement.

— Moi ? Je suis un livre ouvert, rétorquai-je, levant les yeux vers lui.

— Si c'est vrai, alors c'est un livre que je n'ai pas encore appris à lire, murmura-t-il, sa voix grave effleurant l'air comme une caresse.

Mon souffle se coinça légèrement dans ma gorge. Sa proximité me déstabilisait, et pourtant, je ne bougeais pas. Il écrasa sa cigarette dans un cendrier posé sur une table basse, avant de glisser ses mains dans les poches de son pantalon, toujours avec cette nonchalance énervante.

— Comment tu t'appelles ? lâchai-je brusquement, brisant la tension.

Il sembla surpris, mais seulement une fraction de seconde.

— Tu ne le sais pas ? demanda-t-il en retour, une étincelle amusée dans son regard.

— Si je le savais, je ne demanderais pas, répliquai-je en haussant un sourcil.

Il se pencha légèrement vers moi, réduisant encore la distance entre nos corps. Mon cœur s'accéléra malgré moi.

— Koen, murmura-t-il enfin, son souffle chaud effleurant ma joue.

Le simple fait d'entendre son prénom me fit frissonner. Il le prononça avec une lenteur calculée, comme s'il voulait que je m'en souvienne à jamais.

L'ombre s'appelait Koen.

— Koen, répétai-je doucement, goûtant chaque syllabe comme un secret dévoilé.

Il recula légèrement, mais pas assez pour que je retrouve mon équilibre.

— Maintenant que tu sais, qu'est-ce que tu comptes en faire ? demanda-t-il, un sourire en coin.

Le masque de l'ombreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant