Kruh atteignit enfin les portes du château, ses jointures endolories par des mois de chevauchée. Elle avait rendu hommage à chaque village, à chaque âme disparue. Maintenant, elle était là, devant ce donjon sinistre qui l'avait hantée tant de nuits. Elle caressa tendrement la crinière de sa jument, une créature fidèle qui l'avait accompagnée dans cette quête désespérée. Puis, elle la ligota à un chêne robuste La laissant brouter l'herbe rase, son regard se perdant dans l'immensité des terres désolées qui s'étendaient à perte de vue. Le vent, chargé d'humidité, lui fouettait le visage, emportant avec lui les derniers vestiges de l'été.
Le château se dressait devant elle, une masse sombre et menaçante. Elle se souvenait de tout, des tortures infligées aux prisonniers, des cris de douleur qui résonnaient dans les nuits étoilées. Et pourtant, elle y allait, poussée par un espoir ténu, celui de retrouver sa sœur, Uary. Elle inspira profondément l'air frais du matin, l'odeur de terre humide et de bois brûlé lui rappelant les bûchers où tant de vies avaient péri.
En poussant les lourdes portes de bois, Une épaisse couche de poussière se souleva, chatouillant ses narines. L'odeur de renfermé et de moisissure la frappa. Le château était plongée dans une pénombre oppressante, seuls quelques rayons de soleil filtrant par les vitraux brisés venaient troubler l'obscurité. Elle s'attendait à être assaillie par une horde de soldats, prêts à la combattre jusqu'au dernier souffle. Mais le silence régnait. Une fine couche de poussière dansait dans les rayons de soleil qui pénétraient à travers les fenêtres brisées. Elle toussa, étouffant un cri.
Elle avança prudemment dans les couloirs, ses pas résonnant dans le silence. Les murs, autrefois tapissés de riches étoffes, étaient maintenant nus et dégradés. Des fissures serpentant sur la pierre témoignaient des outrages du temps. Elle passa devant des portes closes, imaginant les scènes de torture qui s'y étaient déroulées. Au début, elle progressait lentement, guettant le moindre bruit, scrutant chaque ombre. Mais au fil de ses pas, une étrange sensation d'inquiétude commença à grandir en elle. Où étaient-ils tous ? Les geôliers, les soldats, les prisonniers ? Un frisson parcourut son épine dorsale. Le silence était assourdissant, trop parfait. Elle accéléra le pas, le cœur battant la chamade.
Elle trouva les cellules. Elles étaient vides à l'exception de quelques ossements éparpillés, les murs maculés de sang séché, les barreaux rouillés. Elle les parcourut toutes, espérant contre toute espérance y trouver un signe de vie, un mot gravé dans le mur, un morceau de tissu... rien. Le désespoir commença à l'envahir. Où était Uary ? Était-elle morte ? Avait-elle souffert ? L'avait-elle appelée, sa voix se perdant dans les ténèbres de cette forteresse maudite ?
La respiration haletante, le château semblait s'étendre à l'infini, un labyrinthe sinistre où elle était seule et perdue. La boule d'angoisse qui avait commencé à grossir dans son ventre s'était transformée en une masse compacte, la paralysant presque.
Elle s'arrêta devant la dernière cellule, la plus sombre et la plus humide, les jambes tremblantes. Elle baissa la tête, fermant les yeux si fort qu'elle sentit une douleur sourde derrière ses paupières. Le bruit du vent qui sifflait à travers les ruines du château la ramena à la réalité. Elle ouvrit les yeux et regarda autour d'elle, perdue.
Elle s'agenouilla, passa ses doigts sur les pierres froides, essayant d'imaginer la douleur que sa sœur avaient endurée. Chaque cellule était un tombeau, un rappel brutal de la cruauté que le monde portait .Elle ferma les yeux, essayant de se concentrer, d'entendre un écho, un murmure... mais il n'y avait que le silence. Un cri déchirant s'échappa de sa gorge. Elle avait tout perdu. Sa sœur, son innocence, son espoir.
Ses yeux, embués de larmes, peinaient à distinguer les contours de la cellule. Elle était seule. Complètement seule. Le poids de la réalité s'abattit sur elle, lourd comme une enclume. Astra avait raison. Elle avait échoué. Misérablement échoué. Un rire amer lui échappa, un son rauque et désespéré qui résonna dans le silence de la pièce. Elle baissa la tête, ses cheveux, habituellement si soignés, tombaient en désordre sur son visage, la caressant, offrant une maigre consolation à son cœur brisé.
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Kruh and Uary
FantasyDans un royaume où les traditions et les attentes pèsent lourdement sur les épaules de chacun, deux sœurs, Kruh et Uary , se retrouvent au centre de cette aventure. Elles sont différentes, chacune à sa manière défiant les normes établies. Kruh , l'a...