VI - Ethan - Premiers Mots

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Samedi 16 Octobre 2010

Cher journal,

Tout d'abord, je tiens à te dire que je ne me suis toujours pas fais à l'idée d'écrire un journal. J'ai toujours cru que seules les filles le faisaient. Maintenant je comprends pourquoi elles passent tant de temps dessus, et surtout pourquoi elles s'obstinent à le cacher.

Il parait qu'il faut que tu deviennes mon meilleur ami. Que je te dise absolument tout. Seulement voilà, cette place est déjà prise. J'ai donc décidé de t'appeler Stephen. Crois-moi, ça rendra les choses plus simples. Enfin, c'est ce que me répète le Docteur Kent. Faisons les présentations : Docteur Kent est mon psychiatre. C'est lui qui s'est occupé de moi quand...

Je lève la tête de mon journal, pensif. Certes, je suis sensé tout lui avouer, comme s'il existait, respirait, pensait vraiment. Mais voudrais-je réellement révéler ce genre de choses à une personne que je viens de rencontrer ?

Peu importe après tout. Cela dit en passant, je l'ai vu ce matin. Une fois de plus, non avons eu une conversation mouvementée...

***

Quoi de plus agréable que de se lever à 6h35 pour pouvoir passer son samedi matin à l'hôpital, d'y arriver à l'heure et d'attendre patiemment un médecin qui lui arrivera en retard ? Me voilà alors peu confortablement installé sur une chaise pliable en métal. On a l'impression que le personnel vient de la sortir du congélateur, mais au moins ça a l'avantage de me garder éveillé.

Alors j'attends, encore et toujours. J'attends que mon psychiatre arrive. Je serai son premier patient de la journée. J'attends qu'il me demande de le suivre dans son bureau, qu'il me dise de m'installer, et qu'il me révèle le résultat des examens sanguins que je dois faire toute les deux semaines. Je n'ai pas besoin de lui pour les connaître. Je sais ce qu'il va me dire, je sais que ça le décevra et qu'une fois de plus il voudra que je reste ici. Mais il en est hors de questions. Pas après tout ce que j'ai accompli au cours de ces deux années de combats.

- Ethan ?

Ma mère me sort de mes pensées. Depuis que c'est arrivé, elle s'inquiète à chaque fois qu'elle me voit fixer le vide. Alors je lui souris pour lui faire comprendre que tout va bien. Après tout, elle et mon père ont tous deux fais une demande auprès de leurs employeurs pour qu'ils puissent m'accompagner à chaque consultation, même s'ils n'ont que pour seul droit de pouvoir rester dans la salle d'attente. Ce n'est pas plus mal, car je n'ai pas franchement envie de les voir dans ce bureau en train d'acquiescer à tout ce que dit, ou propose mon docteur. D'ailleurs le voilà, à 8h47, avec 17 minutes de retard, dans le costard cravate bleu marine que je pense voir à chacune de mes visites. Il croise alors mon regard et me fait signe de pénétrer dans son bureau. Je le vois dans ses yeux, les résultats sont mauvais. Je vais encore devoir me battre contre lui.

Je me lève donc, et sens la main de mon père se poser au bas de mon dos. Je traverse tête baissé la salle d'attente, en observant ce carrelage nacré commun à tous les hôpitaux, et ce n'est qu'une fois arrivé à quelques mètres de Kent que je me remet à lever la tête pour pouvoir le regarder dans les yeux. Puis je rentre dans ce bureau dans lequel j'aimerais, un jour, ne plus avoir à rentrer. Ses murs et son sol sont blancs, tandis que le bureau et les chaises sont noirs. Un contraste parfait qui amène souvent à vivre un moment imparfait. Je tire vers moi une de ces confortables chaises, et m'installe. Vient enfin le tour de Kent. Il ne tourna pas autour du pot.

- Je suis persuadé de ne pas avoir à te donner ces résultats, car tu as tout l'air de déjà les connaître – dit-il d'un ton qui pourrait glacer le sang du premier venu, mais pas d'une personne qui consulte deux fois par mois – Une question : pourquoi ? Pourquoi tiens-tu toujours à t'approcher des limites Ethan ?

My Dear Dark SideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant