Chapitre 18 -Arrestation-

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Le corps de celui qui fut ,quelques minutes auparavant, le roi de Wayton gisait lamentablement sur le sol humide et froid. On aurait pu croire qu'il était perdu en pleins songes si seulement une fine rivière de sang ne s'écoulait pas de sa bouche entrouverte et si une lame en or fin ne sortait pas sur le devant de sa poitrine.

Le vieil homme n'avait pas souffert. Il avait bien senti l'épée s'enfoncer dans son corps et transpercer son cœur mais la mort l'avait envoloppé si vite qu'il fut mort avant même de toucher terre.

Il n'eut pas non plus à subir cette douleur lancinante qui l'aurait assailli s'il avait réalisé de qui venait ce coup qui lui ôta la vie.

Tandis que le jour commençait à tomber, le char d'Apollon entamant sa longue course contre le Soleil, les derniers soldats de la ridicule armée de Petrus étaient vaincus.
Tout marchait selon ses plans.

-Assassin, gardes !

Louise se retourna vers la source de ce désagrément pour voir Ulrich la pointer d'un doigt accusateur.

Il lui sourit avant de se tourner vers son père, dont le dernier soupir était sorti quelques minutes auparavant. Il s'agenouilla à ses côtés et commença à prier.
C'est cet instant que choisit Aure pour venir auprès de son père et de son frère.

-Nous avons ga...

Son sourire disparut instantanément lorsqu'elle vit le corps sans vie du roi.
Elle se laissa tomber à ses côtés et éclata en sanglots jusqu'à ce que son regard se pose sur la lame d'or qui s'échappait de la poitrine de son père.
Elle la reconnut immédiatement et cessa de pleurer avant de se tourner vers Louise.

Ses yeux rougis par la colère et le chagrin débordaient de haine. Elle la fixa intensément, ses mots ne pouvant exprimer ce qu'elle ressentait à cet instant. Un amas de pensées et de sentiments l'assaillirent brutalement.
Elle ne pouvait pas y croire.
Louise brisa le silence, toujours anéantie par le geste d'Ulrich :

-Aure, ce n'est pas ce que tu crois...

Deux gardes arrivèrent finalement et empoignèrent Louise de chaque côté, suivant les ordres d'Ulrich, l'emmenant vers le château, loin de Aure.

Louise eut beau crier, Aure reporta son attention vers son père, l'abandonnant à son triste sort.

Après plus d'une heure de marche, Louise arriva devant les deux immenses portes de bois massif qui marquaient l'entrée du château. Elles s'ouvrirent lentement pour laisser entrer les gardes et les soldats qui n'avaient pas péri durant la bataille.

Louise et ses deux gardes traversèrent alors la cour avant de se diriger vers un minuscule bâtiment de pierre, gardé par quatre soldats. Il ne devait pas pouvoir abriter plus de cinq personnes.

Mais à sa grande surprise, la porte s'ouvrit non pas sur une pièce mais sur un escalier étroit en colimaçon. Ils descendirent les marchent humides et glissantes où un clapotis incessant se faisait entendre, formant çà et là des flaques d'eau relativement profondes.

Les marches débouchèrent sur un passage étroit et bas de plafond ou des cellules apparaissaient de part et d'autre du couloir.
Les gardes ouvrirent l'une d'elle avant de pousser la jeune femme à l'intérieur et de refermer la grille derrière elle, l'abandonnant seule face à ses réflexions et son chagrin.

Pendant ce temps, Aure suivait la procession qui menait le corps de son père jusqu'à la chapelle du château.
Elle s'y rendait chaque matin après le déjeuner.

La petite église aux murs de pierres blanches et grises était d'apparence plutôt sobre.
Une étroite porte de bois clair marquait l'entrée de la nef.
Des dizaines de rangées de bancs et de prie-dieu s'étalaient de part et d'autre de l'allée centrale, dans les bas-côtés.
Un autel était disposé dans le chœur de la chapelle.

Par opposition à l'apparence extérieure du bâtiment, l'intérieur était richement décoré, à l'image des trésors du royaume, à savoir l'or et le diamant.

La lumière colorée qui filtrait à travers les vitraux rendait l'atmosphère suffocante.
Aure ne s'était jamais sentie dans son élément dans la maison de Dieu.
Elle s'était toujours sentie scrutée de toute part par les visages accusateurs des personnages. C'était comme s'ils connaissaient son secret.

La jeune femme détourna le regard et reporta son attention vers le chœur de l'église où le corps de son père était disposé par quelques soldats.

Aure s'assit sur un prie-dieu et commença à prier pour l'âme de son pauvre père.
Pendant ce temps, on apporta un cercueil et plaça le roi à l'intérieur.

Elle vint avec Ulrich se positionner aux côtés du roi et commença à pleurer.
Ulrich feint la tristesse et vint entourer Aure de ses bras protecteurs.

-C'est injuste, sanglota Aure. Et je ne peux croire que Louise...

-Je l'ai vu de mes propres yeux, lui affirma Ulrich.

-Mais pourquoi aurait-elle fait une chose pareille ? Je ne comprend pas.

-Elle haïssait notre père, déclara simplement Ulrich. Elle pensait peut être que tu succèderais à notre père. Ou bien, elle voulait simplement trahir son père, qui était conseiller du roi.

-Mais ça ne tient pas debout, fit remarquer Aure.

-Je n'en sais rien. s'énerva son frère, tu n'as qu'à aller lui poser la question et puis, il est clair que ça n'aurait pas fonctionné.

Aure fronça les sourcils en signe d'incompréhension.

-Pourquoi dis-tu cela ?

-Tu ne succèderas en aucun cas à père, dit-il en la regardant droit dans ses yeux noisettes.

Elle s'écartait de lui et demanda :

-Que veux-tu dire ?

-Tu ne sais donc pas ? s'enquit-il, connaissant déjà la réponse à cette question.

-Savoir quoi ?

Ulrich se délectait de connaître une information de plus que sa sœur et prenait un malin plaisir à faire durer cet interrogatoire.

-Lorsque tu t'es enfuie ce matin, notre père à changé l'ordre de succession.

-Et alors ?

-Alors, il se trouve que tu n'en es plus. Il t'a retiré de la succession. Officiellement, tu ne fais plus partie de notre famille.

Ce fut un choc pour Aure. Elle était déchue de son trône. Ce qui, quelques heures plus tôt ne semblait nullement l'affecter, voire même la ravir, l'affligea.
En effet, désormais tout avait changé : Louise était devenue une meurtrière et une étrangère à ses yeux.

-Mais, dans mon infinie bonté je te permets de rester habiter au château. Je ne supporterais pas que ma propre sœur finisse dans la rue du port comme une vulgaire traînée.

Aure croisa le regard émeraude de son frère qui semblait se délecter de la situation. Un immense sourire fendît son visage. Avant qu'elle n'ait pu la retenir, une rage indicible s'empara d'elle.
La gifle partit et se répéta en écho dans toute l'église.

Aure Pourpre [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant