Chapitre vingt-deux

588 74 12
                                    

-Doucement... voilà. C'est bien, tu es très courageuse.

Quelqu'un m'aidait à me réveiller du mieux qu'il pouvait et il avait réussi. Sa voix était chaude, chaleureuse, réconfortante, amicale. Ma vision était floue, encore plus quand il agita sa petite lampe sur mes yeux.

-Ça va, ton corps réagit bien. Combien tu vois de doigts ?

-Je... vois pas très bien. C'est floue...

-Alors combien de formes ?

-D... deux.

-Oui c'est ça. Attends encore un peu et ta vision redeviendra normale. Je reviendrais te voir dans une demi-heure.

Je l'entendis s'éloigner puis fermer la porte. J'étais où moi ? Pas chez moi en tout cas mais cet endroit me disait quelque chose. C'était cette odeur qui me mettait sur la piste. L'hôpital. J'étais à l'hôpital. J'essayai tant bien que mal de régler ma vue mais je n'y arrivai pas, je dus alors attendre un peu plus de cinq minutes jusqu'à distinguer nettement l'endroit où je me trouvais. C'était ça, j'étais bien dans une chambre d'hôpital. Mais pourquoi j'y étais ? Je me redressai.

-Aaaiiie !

Une vive douleur me lança dans l'épaule droite. Je l'examinai. J'avais une grosse compresse soutenu par un bandage qui faisait le tour de mon épaule et la clavicule, passant en-dessous de mon bras. Pour maintenir l'immobilité, j'avais mon bras replié dans une sorte de drap qui était accroché à mon cou. J'ai encore joué au casse-cou ? Ah non. La compresse est rouge. J'ai du me cogner quelque part. Fin, c'est pas trop possible puisque pour saigner comme ça, faut y aller ! Mais qu'est-ce que j'ai fais alors ? J'entendis alors la porte s'ouvrir et quelqu'un aller dans la salle de bain, sûrement pour se laver les mains et se préparer à me soigner où je ne sais quoi. Oui, j'avais deviné que c'était un docteur. Je me souvenais d'avoir vu une masse blanche au-dessus de moi lorsque j'eus ouvert les yeux. Et quelqu'un qui prend soin de vous dans un hôpital, c'est pas une mémé dans le service des grands brûlés.

-Tu sais ce qui t'es arrivée ?

-Non... pas vraiment.

-Hm. En même temps, avec l'alcool de la veille qui restait dans ton sang encore hier, tu ne peux toujours pas rassembler correctement tes souvenirs.

Woooaaah, j'ai fais fort avant-hier !

-Tu rentrais tranquillement de tes courses quand quelqu'un a voulu te racketter mais, têtue comme tu es, tu ne lui as rien cédé. À part ta vie. Tu aurais pu mourir !

-Comment ça ?

La personne entra dans mon champ de vision.

-Il t'as tiré dessus.

Mon Dieu. C'est pas possible. Je ne parle pas de ce que j'ai subi mais plutôt ce que je vois. C'est... incroyable. Incroyable.

-J'ai eu peur. On a eu peur. Ce sont deux de mes amis qui t'ont vu te faire tirer dessus et t'ont ramené ici. J'ai pris ton dossier en main. J'en ai fais une affaire personnelle par la même occasion.

C'était bien ça les deux masses sombres que j'avais distingué quand j'étais à terre. C'était bien deux personnes qui tentaient de m'aider, et elles avaient réussi. Je dois les remercier plus tard. Pour l'instant, ce qui compte, c'est qui j'ai devant moi.

-On a réussi à extraire la balle assez rapidement de ton épaule et ensuite on t'as placé en phase de réveil. Tu ne donnais plus aucun signe de vie mais... on ne sait comment... un de mes amis a crié et ton cœur est reparti. Alors on t'as installé dans cette chambre. Pour attendre que tu te réveilles. Tu dors depuis plus de 17h.

Il s'était assis devant moi et me caressait doucement le visage en plongeant son regard dans le mien. Cette intensité dans ses yeux, je ne la connaissais que trop bien.

-Tu as faim ? Tu viens de te réveiller et il est bientôt 20h. Je suis de garde cette nuit donc je vais pouvoir rester avec toi autant que tu le veules ! Ou pas. Si ma présence te gêne, et je comprendrais tout à fait, je sortirais. Je... je vais te chercher quelque chose à manger.

Pourquoi il me gênerait ? Parce qu'il était médecin ? Non. Parce qu'on se connaît et qu'on a vécu pleins de choses mais aussi qu'on a arrêté de se voir. Brutalement. Du jour au lendemain. Il pense que je lui en veux mais... à qui la faute dans cette histoire ? Lui parce qu'il est parti ou moi parce que je n'ai rien vu ? Je claquai ma tête contre la tête de lit en soupirant. Il revint bientôt en poussant un chariot devant lui. Il pivota la table jusqu'à la mettre en face de moi, y déposa mon plateau, poussa le chariot dans l'entrée et s'assit près de moi. Puis il me sourit. Wow.

-Tu as l'air heureux.

-Je le suis plus qu'hier, en effet.

-Pourquoi ?

-Quand je dis hier, je parle aussi du passé.

Je détournai la tête. Où est-ce qu'il voulait en venir, putain ? Bon. Faut bien que je mange. Je me retournai vers mon plateau. C'était... Mon plat préféré. Des nouilles cuites à la poêle avec du poulet aromatisé au caramel. Comme dessert, j'avais une tarte aux pommes sous une petite cloche, sûrement parce qu'elle était chaude. Comme je l'aimais. Je me pinçai la lèvre inférieure.

-C'est toi qui a cuisiné tout ça ?

-Oui. Mange maintenant. Je reviens quand tu auras fini. Tu n'auras jusqu'à qu'à sonner sur cette télécommande qui est juste...

-Reste.

Il me fixa pendant un bon moment puis s'assit. Je pris la télécommande et alluma la télévision. Puis je commençai à manger. Je sentais son regard posé sur moi. C'était si agréable mais gênant à la fois. Agréable car cela faisait longtemps que je ne l'avais pas senti mais gênant car il y avait un blanc entre nous et alors que je mangeais, il se taisait. Je finis enfin de manger l'intégralité de mon plateau, il se leva pour aller chercher le chariot.

-Eh bien, tu avais faim !

-C'est surtout que ça me manquait.

Il s'arrêta.

-Tout de toi me manquait. C'est évident. Ta cuisine, ton odeur, ta personne... ton sourire.

Ma voix avait trahi mes sentiments. Je commençai à pleurer.

-Tu m'as manqué, SeokJin.

Au pied du murOù les histoires vivent. Découvrez maintenant