Paris

110 5 4
                                    

        

La journée avait commencé comme toute les autres. Je m'étais levée en retard comme chaque matin, avais avalé un bol de céréales en quatrième vitesse et m'étais inévitablement brûlée la langue en tentant de boire mon thé encore fumant. Je n'y accordais aucune importance, puisque la douleur était incapable de m'atteindre. À chaque fois que je me blessais, j'avais mal pendant quelques secondes, puis la sensation disparaissait avant même qu'elle devienne réellement désagréable. « C'est probablement lié à votre condition médicale » avaient conclu les spécialistes, sans qu'ils ne sachent pourquoi les blessures ne laissaient pas de traces visibles sur mon corps non plus.

Il fallait bien qu'il y ait un peu de positif dans ma misérable vie.

J'avais ensuite mis un jean, un haut à manches courtes et ma veste en cuir noire puis j'avais sautillé jusque vers la porte tout en essayant d'enfiler mes converses.

L'appartement était silencieux. Un mot sur la table du déjeuner m'avait rappelé que mon grand-père était déjà au musée et ma grand-mère en réunion de travail pour une association philanthropique quelconque. Tant mieux. J'appréciais le calme qui régnait et de ne pas être bousculée dès le réveil, particulièrement lorsque je me levais à 8h02 alors que les cours commençaient à 8h30.

J'adorais cet endroit. Notre appartement était situé au dernier étage d'un immeuble haussmannien de sept  étages. Le vestibule de l'entrée, laissait imaginer le luxe qui se cachait en arrière. La double porte centrale ouvrait sur un salon bibliothèque gigantesque avec au milieu, un canapé d'angle et une table basse, et tout autour, de grandes étagères remplies de milliers de livres. Le parquet, recouvert ici et là de tapis précieux, sentait le vieux bois ciré et craquait par endroit.

La porte située à droite du vestibule de l'entrée, donnait quant à elle sur un couloir qui desservait toutes les pièces de cette habitation grandiose.

Les couleurs de chacune des pièces avaient été choisies avec goût, même pour les deux chambres à coucher et le bureau qui se trouvaient au fond de l'appartement. Seuls les meubles de ma chambre pouvaient dénoter car je les avais choisi simples et fonctionnels. Mon bureau était une plaque de verre posée sur deux tréteaux en bois. Dessus se trouvaient mon ordinateur portable et une boite avec mes fournitures scolaires. La seule chose qui était accrochée sur mon mur était une étagère où je ne rangeais que mes lectures et manuels scolaires. Simplicité était mon mot d'ordre. Ce petit sanctuaire épuré était comme un pied de nez au chaos incontrôlable qui régnait dans ma tête.

Nous avions aussi un balcon qui faisait presque le tour entier de l'appartement et offrait un panorama incroyable sur la ville des Lumières. Il filait tout le long du salon puis tournait pour continuer devant la chambre de mes grands-parents ainsi que devant le bureau de mon grand-père. Ma chambre, ainsi que les autres pièces, étaient elles munies de fenêtres qui donnaient sur la cour intérieure de l'immeuble.

La troisième porte du vestibule de l'entrée, bien qu'elle ressemblait à s'y méprendre à celle de droite, donnait sur un débarras. Il m'arrivait encore de me faire avoir et de l'ouvrir par erreur.

Mon téléphone vibra dans la poche arrière de mon pantalon et me fit sursauter. Comme j'étais encore en train de me débattre avec ma chaussure gauche dans laquelle je n'arrivais pas à mettre mon pied, je perdis l'équilibre et m'étalai de tout mon long dans le couloir. Je me tortillai pour attraper le téléphone et finis par décrocher.

-            Bonjour chérie, c'est moi !

-            Gran... Cassandra, repris-je avant que ma grand-mère ne se lance dans un monologue interminable sur le pourquoi du comment il valait mieux que je l'appelle par son prénom. « tu comprends avec mon rôle auprès des associations caritatives, je ne peux pas me permettre de donner l'image de la grand-mère d'une jeune fille de dix-sept ans. »

NerriOù les histoires vivent. Découvrez maintenant