Epilogue

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Nous arrivons à la fin de ce dramatique récit et je suppose que ceux parmi vous qui auront eu la curiosité (et la patience) de le lire jusqu'ici se posent tous les mêmes questions :

Quelle était cette Bête ?

N'y en avait-il qu'une, au fait ?

Que s'est-il passé exactement ?

Autant de questions qui défraient la chronique depuis 250 ans et auxquelles nous n'aurons sans doute jamais les vraies réponses ou, en tout cas, de réponses dont l'absolue exactitude serait avérée.

L'affaire a donné lieu à une littérature et à une filmographie abondantes dont il faut se méfier car, chaque auteur ayant sa propre thèse, grande est la tentation de n'indiquer que les éléments accréditant celle-ci et d'occulter ou de déformer les autres faits.

Et encore, je ne parle par là que des ouvrages considérés comme « sérieux », c'est-à-dire ceux où l'auteur a fait un minimum de recherches, et non des romans où nombre d'éléments présentés comme véridiques ne sont que pure invention.

Voir pour un exemple d'affabulation sans fondement le film « Le pacte des loups » qui s'apparente nettement plus à un film de kung fu qu'à la véritable affaire de la Bête du Gévaudan...

Cependant, des travaux modernes scientifiques et zoologiques ont permis d'y voir plus clair, tout comme les remarquables recherches de passionnés (voir sur internet le site de Phil Barnson, très complet, et l'ouvrage d'Alain Bonet consultable librement : « La Bête du Gévaudan : chronologie et documentation raisonnées », travail titanesque considéré comme la Bible par les spécialistes ; voir également les travaux minutieux et très sérieux de Patrick Berthelot) qui ont sans aucun doute levé une petite partie du voile.

Mais il serait prétentieux de croire détenir l'entière vérité car, après avoir à peu près tout lu, relu, étudié, pesé, reconsidéré, réfléchi, une évidence s'impose : aucun scénario ne tient réellement la route si l'on veut être honnête, tous sont bancals.

Je ferai pour ma part les remarques suivantes :

- Si l'on ne peut exclure l'hypothèse que quelques meurtres mis sur le compte de la Bête aient été commis par des humains, les dizaines (voire centaines) de témoins sont unanimes : la Bête était un animal, et non un sadique déguisé en loup (thèse maintes fois soutenue) qui n'aurait d'ailleurs jamais pu se déplacer avec l'agilité, la rapidité et l'endurance reconnues à la Bête.

- Il s'agissait d'un canidé voisin du loup mais certainement pas d'un loup : encore une fois les témoins, habitués en ce temps là à voir des loups, ont toujours décrit la Bête comme ressemblant à un loup mais n'en étant pas un. Le comportement du loup, animal craintif envers l'homme et opportuniste, ne correspond en outre nullement à l'attitude de la Bête qui de toute évidence n'a jamais eu peur de ses proies même quand elles se défendaient mais au contraire paraissait comme imprégnée par l'homme. En tous cas, au vu du rapport Marin, l'animal tué par Chastel était un canidé mais pas un loup (voir, au-delà des constatations et mesures relatives à sa pure morphologie, les termes employés).

- Il ne s'agissait sans doute pas d'un chien : sa ressemblance avec le loup pourrait suggérer un chien de type berger allemand, malinois, etc, mais ces standards de chiens ne sont apparus que beaucoup plus tard (XIXème siècle) et aucune race de chien d'alors n'aurait pu produire de spécimen engendrant une telle confusion par les témoins.

- L'animal tué par Chastel suggère fortement un hybride de chien et de loup. Or sa description coïncide avec toutes les autres descriptions faites précédemment. Donc, s'il y a eu plusieurs Bêtes successives, elles se ressemblaient fortement et nous pouvons être en présence d'une portée entière d'hybrides. On notera toutefois de légères différences, comme l'absence de raie noire sur le dos de la Bête de Chastel alors que la Bête « initiale » est toujours décrite avec cette raie noire.

La Bête du Gévaudan, une histoire vraieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant