Chapitre IV

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- Merde...

J'arrachai la feuille de mon petit carnet, posé en équilibre sur mes genoux, et la chiffonai entre mes doigts. Un bruit de papier froissé accompagna mon mouvement alors que je faisais une petite boule avec. Je l'ai enfouie dans mon sac, déjà rempli d'une dizaine de ces boulettes. Puis, sur une nouvelle page de mon carnet à croquis, j'essayai à nouveau de le dessiner. Je n'avais jamais été aussi déterminer à faire le portait de quelqu'un... Et je n'avais jamais été aussi mauvaise non plus. Presque comme si ma main, qui pourtant était habille et experte, avait perdue toute sa dextéritée et était autant capable de dessiner que le serait la main d'un enfant de cinq ans.

Je me suis mordue la lèvre, me concentrant, et tentai de tracer les contours de son visage. Encore une fois, je ratai. Je pris une grande inspiration, tentant de me calmer, puis fermai les paupières. Il fallait que je me souviennes de lui, de toutes ses caractéristiques faciales. Je l'avais rencontrer la veille et vu durant à peine quelques minutes, mais pourtant, son visage ne cessait de me tourmenter. Alors pourquoi est-ce que j'étais incapable de le dessiner ? Frustrée, j'ouvris mes paupières, refermai mon carnet et l'enfoui, avec mon crayon, dans le fond de mon sac. J'abandonnais. À quoi bon ? Il était trop difficile à dessiner. Ou alors j'étais incapable de me concentrer.

Je suis restée étendue là, un moment, sur le bord de la plage. C'était une journée chaude, et les rayons du soleil plombaient sur les vagues, juste avant qu'elles ne se brisent sur les falaises. Je m'étais installée un peu en retrait, sur une grande roche noire, assez haute pour que les vagues ne puissent m'atteindre. Je contemplai, pensive, la mer. Bien évidement, mon esprit ne cessait de me ramener vers lui. Et dire que je ne lui avais même pas demander son nom... Maintenant, je n'avais aucune chance de le revoir. 

Un petit sourire se traça sur mes lèvres à son souvenir... Il était d'une maladresse charmante, et d'une beauté à couper le souffle. Le genre de personnes qui ne passent pas innaperçues. Pourtant, j'avais l'impression qu'il était différent des autres. Peut-être à son sourire timide, ou alors à ses yeux bleu glacier, mais ce que je savais était qu'il avait un petit quelque chose de spécial, d'authentique.

Je suis restée encore quelques minutes sur ma roche, à contempler l'immensité qui s'étendait devant moi, puis je me suis finalement redressée. Je pris mon sac en bendoulière et l'accrochai à mon épaule, puis je fis mon chemin vers l'auberge.

Le vent puissant de la côte avait tout ébouriffé mes cheveux noirs, et quand je suis entrée par la porte arrière de notre maison, des mèches de ma chevelure retombaient mollement devant mes yeux. Je lançai mon sac dans un coin du portique, puis passai rapidement une main dans mes cheveux, les replaçant du mieux que je le pu. Je me suis ensuite débarassée de mes Toms, qui furent eux aussi lancés dans un coin de l'entrée, puis me suis dirigée vers la cuisine. 

Alors que je me remplissais un grand verre d'eau fraîche, Le craquement d'une latte de plancher dans le couloir attira mon attention. Je vis alors ma mère entrer dans la cuisine, les bras chargés d'un panier remplis de serviettes blanches. La pile de tissus formait une tour dangereusement haute, qui vacillait bien au dessus de sa tête.

- Elysabeth, dit ma mère, peux-tu m'aider ?

Je déposai mon verre rempli d'eau sur le comptoir et vint à son secours, tendant mes bras pour qu'elle me donne le panier. Le transfert fut difficile, et la tour de serviettes se balança de gauche à droite, menaçant de tomber.

- Pourrais-tu distribuer les serviettes dans les chambres occupées de l'auberge ? Tu me renderais service.

J'hochai la tête. Elle me souria du mieux qu'elle le pu, puis je tournai les talons, mes bras tenant fermement le panier en osier. Maman faisait de grands efforts pour avoir l'air plus joyeuse, pour faire comme si notre vie était redevennue normale... Mais je savais qu'au fond, elle souffrait encore énormément de la mort de papa. Nous étions toutes affectées. 

A Drop In The OceanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant