~PARADOXES DE LA MORT~

~Chap. IX~

               Nous étions lundi, la journée la plus remplie de mon emploi du temps scolaire. L'hiver était arrivé de façon inattendue dès le week-end, s'infiltrant d'abord dans les rues, puis dans les maisons, et enfin dans les corps chauds de chacun. J'étais terriblement fatiguée; c'était toujours le cas lors des débuts de cette saison, et je suivais pourtant les cours assidûment en essayant de garder le rythme, malgré l'ennui constant qu'ils m'inspiraient.

Il y avait une autre raison à ma fatigue; je ne voyais quasiment jamais le garçon appelé Adrian, et mon sens de l'observation était pourtant sans cesse éveillé. J'en étais arrivée à la conclusion qu'il ne venait pas souvent au lycée, à mon grand désavantage.

Je regardais par la fenêtre les premières plaques de givre sur les pare-brises, et je me demandai ce qu'il pouvait bien faire de ses journées. Quelques-uns de ses amis étaient dans ma classe, c'étaient des personnes sympathiques mais sans plus, qui appréciaient beaucoup leur ami, apparemment souvent absent. Ils ne s'inquiétaient pas vraiment de ces heures de sèche qu'il accumulait chaque semaine; il avait toujours eu l'habitude de faire ça selon eux.

Mais ce lundi n'était pas comme les autres: aujourd'hui il était censé venir en cours, au moins pour la matinée. Il les avait prévenus par message, car ils avaient prévu d'aller tôt à leur entraînement de volley le matin même. C'était l'occasion parfaite, alors je faisais en sorte de passer le plus souvent devant l'entrée, pour guetter les allées et venues et espérer tomber sur lui. Mes amies me trouvaient sûrement étrange mais cela m'importait, je ne pensais qu'à une seule chose: le voir. J'étais impatiente d'entamer mes recherches, et il fallait pour cela que je sache où il disparaissait secrètement chaque jour.

Émile m'avait dit que le lycée avait souvent une ambiance très énergique à cette période de l'année. Il semblait que l'hiver était la saison favorite du coin, car il y arrivait toujours toutes sortes de festivités et d'évènements, bien plus qu'en été dans les autres grandes villes. Le monde grouillait donc dans les couloirs, les discussions fusaient et du personnel en grand nombre installait des décorations de Noël ainsi qu'un immense sapin dans le hall. Le club de musique sortait de l'amphithéâtre en chantonnant un air de jazz, bientôt prêt pour le grand concert prochain.

"Alors, alors, vous avez vu?"

Je me retournai et regardais Emygaël qui revenait de la répétition et qui nous parlait avec excitation.

"Ouii! Ducky est revenu! On n'avait pas entendu parler de lui depuis un bout de temps, c'est tellement génial!"

"Ça va être chaud en ville." commenta Anna.

"C'est parfait pour l'hiver qui arrive!" blagua Stéphanie.

Je me rapprochai un peu plus du groupe par curiosité, m'incrustant entre Emygaël et Anna.

"Qu'est-ce qu'il a fait cette fois-ci?" demandai-je.

"Tu n'es pas allée sur le site internet de la ville? C'est la base! Bon c'est juste des rumeurs, mais il paraît qu'il a encore mit le bordel dans un restau parce que le serveur lui plaisait pas." rigola Emygaël. " Il est énorme quand même! Même s'ils sont assez effrayants, sans lui et les autres la ville serait tellement ennuyeuse!"