Prologue

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Sous les acclamations du public, l'homme cinquantenaire levait la main en signe de reconnaissance. Son sourire étiré laissait apparaitre quelques dents, et quelques traits de vieillissement sur son visage. Il faisait attention à bien saluer tout le monde en pivotant légèrement à droite, puis à gauche. Il s'approcha du micro après avoir incliné la tête et sous un silence respectueux, il commença son discours.

"- Je vous salue aujourd'hui, mon cher peuple. Vous ne pouvez pas savoir quelle joie me procure le fait que vous m'ayez choisi pour vous guider. Habitants du pays X, vos vies vont changer. Comme je vous l'ai promis, le système va changer. On ne peut plus vivre dans un pays noyé dans la crise alors qu'on peut s'en sortir, certes avec des sacrifices... Mais je vous certifie d'employer tous les moyens afin de vous sortir de la misère!"

J'éteignis la télé en soupirant. La seule émission diffusée dans tout le pays était celle qui montre le discours du défunt président Georges Domson. Élu en 2062, il avait fait des "miracles". Il n'était plus question de séparer les riches des pauvres, mais de séparer les génies des idiots...

Ainsi sont nés les élites et les échecs. En 2064, la génération qui avait entre quatorze et vingt-cinq ans devaient passer des tests pour savoir à quelle place ils se situaient. Une période bien difficile qui s'était arrêtée en 2080 après une manifestations de parents déchirés car leurs enfants n'étaient pas toujours du même côté. Une seule génération avait donc passé le test. Leurs enfants étaient placés par défaut dans le rang respectif de leur parents. Comme si l'intelligence était une faculté génétiquement transmissible. C'est pour cette raison que la descendance est un problème à présent. Certaines personnes ne méritent pas leur place ou méritent mieux que ça.

Malgré cela, quatre ans après son élection, le pays X sortit de la crise. Tout le monde se donnait. Tout le monde travaillait. Personne ne connaissait le chômage, personne ne connaissait la pauvreté. Mais ça, c'était avant la mort de George Domson qui s'était toujours opposé à la maltraitance des échecs. Son successeur les avait appauvris, et les avait rendus minables aux yeux de tous. Thomas Crouguel est arrivé au pouvoir en 2085. Le travail des échecs fut alors mal rémunéré. Cette classe était devenue plus que honteuse. Le creux entre les deux rangs était plus marqué. Cette séparation allait même jusqu'à la séparation géographique. Il n'y avait plus de mixité.

Je soupirai pour la énième fois avant de m'étirer. Je relâchai la pression et me laissai tomber sur le canapé moelleux. J'entendis à peine la clé tourner dans la serrure.

- Maëlyss! Je suis rentré!
- Ah papa, bienvenu!

Les échecsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant