Les échecs

Chapitre 4

M A Ë L Y S S

Vêtue de mon uniforme scolaire, je me pointai devant le miroir. Mes cheveux bruns m'arrivaient juste au dessus de mon bassin. Mon père m'avait toujours conseillée de les laisser détacher. Même si ça me gênait, je les laissais comme ils étaient. Mon regard se posa sur le reflet de mon visage. Sous mes yeux bleus se trouvaient d'horribles cernes. Je grimaçai : je n'avais pas pu dormir avec ce qu'il s'était passé la veille. La tirade de Sam eut l'effet d'une claque sur moi. Il fallait absolument que le système change.

Je ne pris pas le temps de manger. Je me précipitai d'aller au lycée pour voir les résultats du dernier examen. J'étais sûre d'avoir réussi. Je courus dans les escaliers et arrivai enfin devant le tableau où tout le monde s'était rassemblé. Les visages se tournèrent vers moi, munis de sourires forcés. Ils me félicitaient à contre cœur. Je portai mon regard sur le classement avant de voir mon nom à côté du numéro un. Je sautai sur place. J'étais très contente.

- Bravo! s'écria Amélie Scalpers, une fille un peu plus grande que moi en taille.

Ses cheveux noirs furent propulsés en arrière avec un mouvement de tête très arrogant. Elle était à la quatrième place.

- Félicitations à toi aussi, répondis-je avec sincérité, contrairement à elle.

- Elle est encore première!! dit un jeune homme agacé.

- C'est pas étonnant, répliqua son ami.

- Elle est indétrônable cette fille!! renchérit une voix féminine que je connaissais parfaitement bien.

- Léa!!! hurlai-je avant de sauter dans ses bras.

- Je suis fière de toi ma chérie!!!

Je la sentais. Je sentais la sincérité dans ses paroles. J'étais soulagée d'enfin trouver une personne qui me soutenait réellement à travers ce monde d'hypocrites. Ils se pensaient d'ailleurs discrets derrière leur masque invisible. Elle caressa ma tête et tapotait mon dos avec son autre main.

- Moi je suis cinquième, grâce à toi!!!

- Oh Léa! Bravooo!!! Je suis plus contente pour toi que pour moi! Tu as augmenté de dix places. Ça se fête non!?

- Ouiii!!!

Elle me prit alors le bras et nous partîmes prendre nos affaires dans nos casiers. C'est à ce moment que monsieur décide d'arriver. Léa me serra le bras, perturbée par la venue du beau blond aux yeux bleus-gris, Alex Walker.

- Tu m'as encore battu Allison. Bravo!

- Je te remercie Walker, répondis-je souriante.

- Toi aussi Cambridge, tu as bien mérité ta cinquième place.

Elle piqua un fard, s'attendant à être ignorée comme d'habitude. Elle balbutia un "merci" presque inaudible. Il sourit et ouvrit son casier qui se trouvait à côté du mien.

- Je ne resterai pas à la deuxième place éternellement Allison. Attends toi à ce que je réagisse vite.

- Je t'attends depuis un moment déjà mon grand, répondis-je en me dressant devant lui. Mais ne t'inquiète pas. Je sais que tu tiendras ta promesse!

Il me parut alors gêné. Il prit son sac et partit à la vitesse grand V.

- Il est trop mignon! lâcha Léa qui n'en pouvait plus de rester droite devant lui.

Elle s'écroula au sol en soufflant bien fort. Je ne pus m'empêcher de rire. Elle était trop chou avec ses joues rosies. Je contemplais sa frange et ses couettes. Une coiffure que j'aurais aimé faire mais que mon père aurait défendu. J'étais tellement concentrée sur sa chevelure que je ne remarquai même pas qu'elle me dévisageait.

- Ça va?

- Oui t'inquiète.

Je serrai mes mains, gênée par l'ambiance qui s'était installée. Je ne pus m'empêcher de changer de sujet.

- Ah je ne t'ai pas dit. Je suis encore partie de l'autre côté.

- Et t'as trouvé quelque chose d'intéressant?

- Nop, mentis-je.

Je ne voulais pas parler de Sam. D'une certaine manière, je pensais que c'était mieux ainsi. Les raisons de notre rencontre pouvaient lui poser problème. Par contre, je voulais discuter d'un sujet qui me tirlupinait.

- Sur l'un d'eux, j'ai vu un code barre tatoué.

- C'est possible. Mon père m'a dit que c'était nécessaire pour le registre.

Je fronça les sourcils. Voilà un sujet bien intéressant. Je me devais d'en savoir plus.

- Quel registre?

La sonnerie retentit. Ce qui nous laissa pas le temps de continuer notre conversation.

- Je te dirai à l'heure de pause! déclara-t-elle en me faisant un clin d'oeil.

Je ne pus cacher ma déception. Elle me rassura en me promettant de ne pas oublier et me quitta. Vu qu'on n'était pas dans la même classe, on ne suivait pas les mêmes cours à part celui de sport. Notre séparation cette année m'avait attristée. Mais maintenant que la Toussaint arrivait à grand pas, j'avais fini par m'habituer à ce vide.

Je rentrai dans la salle de ma classe, la première B. Un silence de mort s'installa dès que je franchis le seuil de la porte. Ils me dévisageaient avec mépris. Mais leurs expressions furent remplacés par des sourires hypocrites. Seul Alex ne me regardait pas. Son visage était plongé dans un bouquin. L'unique placede libre était celle à côté de lui. Je me posai et sortis mes affaires.

- Ne fais pas attention à eux Maëlyss, murmura Alex. Ils n'en valent pas la peine.

- Je sais mais c'est plus fort que moi... C'est rare que tu m'appelles par mon prénom.

Il esquissa un sourire radieux.

- J'avoue.

Le professeur vint en s'excusant pour son retard. Elle me félicita au passage pour ma première place. Ce qui provoqua quelques réflexions désagréables au fond de la classe. J'avais beau garder une allure fière pourtant, j'avais envie de me cacher sous terre.
Le cours commença juste après. Le sujet me semblait passionnant. Il traitait l'histoire des échecs. Les étapes qui les avaient menaient à une vie détestable et misérable me donnaient des frissons.

- Le travail donné aux échecs était tout à fait honorable. Ils étaient un pilier pour la sécurité et le bon fonctionnement du pays X. Les élites ont souvent tendance à l'oublier mais les autres ont contribué à des postes qui ont maintenus notre pays dans une paix sereine. Avec l'arrivée de notre président actuel, les élites assurent tous les rôles, donc les échecs ne peuvent plus aider. Ils vivent désormais dans la misère et ne peuvent survivre que grâce à leur bétail...