Chapitre 5

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Je sanglotais de peur, de rage, de fatigue, d'incompréhension. Je posai mes mains sur ma tête, tentant de me calmer, en vain.
Tout me revenait en tête, comme une sorte de générique de film de toutes les étranges choses qui me gâchaient la vie depuis quelques temps.
Tout avait commencé le jour de la rentrée où j'avais été renversée dans les couloirs. Puis vinrent les cauchemars, les sons effrayants qui semblaient m'encercler, cette impression de danger constant, ces maux de crânes répétitifs, mon incapacité totale à dormir, mes lentilles qui explosaient soudainement dans mes yeux, mes iris qui scintillaient...
Je ne pouvais plus raisonner. Tout m'était confus, je ne supportais plus ne pas avoir les idées claires.
Des idées paranoïaques me traversaient sans cesse l'esprit. Etais-je possédée ? Ou quelque chose de la sorte ?

Je m'effondrai une fois de plus, toujours affalée contre le meuble de la salle de bain.
Relevant doucement la tête, j'aperçu mon téléphone que j'avais posé quelques minutes plus tôt sur une des étagères non loin de moi.
Je décidai de l'attraper, ce que je fis sans difficulté, et, la main hésitante, commença à composer le numéro de téléphone d'Alice que je connaissais par coeur.
Je portai l'appareil à l'oreille et attendai assez impatiemment que mon amie décroche.
Au bout de la troisième sonnerie, une voix enjouée répondit :
-« Hey ! Qu'y a-t-il ? »
J'avalai ma salive et répondis d'une voix hésitante :
-« Alice... Tu pourrais revenir chez moi s'il te plaît ?... Je... Juste viens, je t'en prie... »
Mon amie ne posa pas plus de questions et balbutia, le ton intrigué ;
-« Heu je... Ok, pas de soucis j'arrive. »
J'appuyai donc sur la fonction tactile permettant de mettre fin à notre conversation.
Je reposai mon téléphone près de moi, sur le tapis et resserrai avec mes bras l'emprise que j'avais autours de mes jambes.
J'appuyai mon menton sur mes genoux et fermai les paupières.
Exténuée, j'étais sur le point de m'endormir mais me battais pour rester éveillée.

Quelque temps plus tard, le bruit de la sonnette me fit sursauter.
Je descendis du premier étage sans me presser et accueillais mon amie.
Elle avait l'air soucieuse, lorsqu'elle me fixa et fit un bond en arrière.
Je restais le visage neutre, ennuyée par cette situation. Avant qu'elle ne puisse me dire quelque chose, je pris la parole.
-« Oui oui, je sais, mes yeux, j'ai vu. »
Elle avait l'air très surprise.
-«C'est quoi ça ? C'est quoi ce violet fluorescent ? »
J'expirai, et m'asseyai sur un siège proche de moi.
-« Je ne sais pas, je ne sais plus. J'en ai tellement marre. J'ai l'impression de devenir folle, littéralement. Ces cauchemars, ces bruits, aujourd'hui les lentilles qui explosent et mes yeux.... Oui en réalité, lorsque tu es repartie tout à l'heure, j'ai [...] » je lui racontais toute l'histoire.

Lorsque j'eus fini, Alice se tenait toujours debout face à moi, les bras croisés et l'air inquiet.
-« Nina... dit-elle en soupirant. Je savais que tu faisais des cauchemars, mais là... Pourquoi tu ne m'en avais pas parlé auparavant ? Et... attends.... Fit-elle, marquant une pause. Qu'est-ce que tu me racontes ? Tes lentilles ont explosées ? »
Elle n'osait pas me regarder dans les yeux, je voyais bien son gène face à mon physique de monstre.

-« Oui, je... sanglotai-je. Je ne sais plus, j'ai vraiment l'impression que quelqu'un cherche à me nuire. Ce n'est pas possible autrement... Viens voir. »
Sur ces paroles, je me levai de ma chaise et rejoignis la salle de bain, mon amie me suivait.

-« Regarde.. » fis je en lui tendant les morceaux brûlés.
Elle écarquilla des yeux.
-« Ce sont tes lentilles ? C'est toi qui as fait ça ? »
-« Justement, non ! C'est ce que j'essaye de te faire comprendre ! »
-« Tu as raison, quelqu'un a du y déposer de l'acide... dit-elle en examinant les restes de lentilles brûlées et faisant allusion à mes hypothèses citées auparavant.
On va trouver celui qui te veut du mal, tu vas voir ce qui se passera pour lui ! » ajouta t-elle pour me faire rire.
Je lui adressai un petit sourire.
-« En attendant, fis-je, je suis terrifiée. »
-« Attends, dit-elle les yeux brillants signifiant une idée géniale, je te parie que dès ce soir on pourra trouver ton harceleur! »
Je fronçai les sourcils d'un signe d'incompréhension.
-« Mais bien sûr, réfléchis ! Premièrement, c'est forcément quelqu'un du lycée, ta vie se déroule principalement là bas.
Ensuite, s'il est assez bien informé pour connaître ton adresse et venir claquer les portes de ta maison, continuai-t-elle en baissant la voix,il tentera de te faire perdre la tête ce soir lors du bal, et on pourra le prendre la main dans le sac ! »
-« Heu, non, rétorquai-je, peu enthousiaste. Alice ! Déjà, nous avançons des idées dans le vide, sans preuves, et même si tu avais raison, tu ne voudrais pas contacter la police ? »
- « Comme tu le dis toi même, on a aucunes preuves de ce que l'on avance ici ! C'est pour cela qu'on va le découvrir par nous mêmes ! » dit-elle avec une expression presque machiavélique.

Je haussais les yeux au ciel, signe de ma défaite.
-« Oui ! S'exclama la jeune fille au teint brun. Il va voir de quel bois je me chauffe ! »

~Ellipse de quelques heures~

En entrant dans la voiture, je regardai vivement mon reflet dans le rétroviseur avant de m'installer sur un des sièges à l'arrière.
La vielle Jeep du père de mon amie émanait une odeur de bacon et de vieux papiers journaux mélangés, comme toujours.
-« Salut Fred ! » dis-je à l'homme que je connaissais depuis mon enfance.
Fred était le père de ma meilleure amie, et malheureusement, c'était son seul parent. La mère d'Alice était décédée il y avait déjà cinq ans de cela d'un cancer, laissant derrière elle une famille détruite qui ne semblait pas pouvoir faire leur deuil. Les deux petits frères jumeaux de mon amie ainsi que sa grande sœur furent dès lors élevés par seul leur père, et je donnais tout mon respect à Fred pour cela. Lorsque la mère d'Alice décéda, je perdais comme l'une de mes tantes, et du aider sa fille à ne pas saccager sa vie par le chagrin. Cette période fut très difficile pour nous deux, et j'avais toujours l'impression que mon amie songeait sans cesse à me remercier de l'avoir aidée.

Alice, assise à l'avant de la vieille voiture auprès de son père, se retourna vers moi et posa la tête contre le siège.

-« Tu es sûre que ça va ?... » lui demandai-je indirectement à propos de la couleur de mes yeux.
-« Mais oui, chuchota-t-elle, les gens penseront que ce n'est pas naturel et que cela fait partie de ta tenue ! Regarde mes yeux, ils ne sont pas plus originaux que les tiens pour une fois ! »
En effet, la jeune fille arborait une tenue élégante inspirée par le mythe des vampires. Elle portait comme moi une longue robe noire mais plus imposante, qui présentait un corset rouge. Ses lentilles de contacts rougeâtres ainsi que ses longs cheveux noirs lissés pour l'occasion la transformaient et l'embellissaient incroyablement à la fois.

-« Tout de même... Cela va être la première fois que je me dévoile involontairement au lycée... Même s'il n'y aucune chance pour que l'on se doute de quelque chose, je me sens anxieuse... » me plaignai-je.

Le père de mon amie chantonnait des vieilles chansons de Jazz, et ne semblait pas prêter attention à notre conversation.
Mon amie n'eut pas le temps de me répondre que la voiture s'arrêta violemment en face de l'entrée du lycée.
Une forte musique festive se faisait déjà entendre de l'extérieur et le brouhaha des adolescents signifiait le début de la soirée.
-« Terminus, tout le monde descend ! Bonne soirée les poupées ! déclara Fred. Je passerai vous rechercher tout à l'heure. »

Nous sortions du véhicule en essayant de ne pas abîmer nos robes, puis nous retournions presque en même temps pour remercier l'homme qui se grattait la barbe.
Ses yeux brillaient, il fixait Alice et semblait presque ému de voir sa fille si joliment apprêtée.
Celle-ci rendit ce pseudo compliment par un large sourire.

La voituré démarra, je me retournai vers mon amie.
-« Prête ? » demandai-je.
-« Prête ! » affirma t-elle en me prenant par le bras. Nous avancions d'un pas décidé vers l'établissement.

Avant de rentrer, j'aperçu dans un coin sombre un visage qui ne m'était pas inconnu. Je le dévisageai avant de reconnaître Ethan. Le garçon étrange et petit-ami d'Olivia, celui qui m'avait fait tombée le jour de la rentrée, avant que toutes mes visions paranormales commencèrent à me hanter. Il me fixa du regard avant de détourner la tête.
Il était souvent seul, et ne se faisait jamais remarquer. Bien que faisant parti des populaires, il restait en dehors des adolescents, et avait vraiment une allure particulière que je ne pourrai décrire. Il n'avait même pas fait l'effort de porter un costume.
Depuis la rentrée, j'avais l'impression que ce dernier m'esquivait.

Ma meilleure amie me fit sortir de mes pensées en me faisant passer l'énorme porche du lycée.

A l'intérieur de la salle, la soirée battait son plein. Les effets de lumière rendait un effet très réaliste sur la décoration que nous avions préparée dans l'après-midi, et tout le monde paraissait s'amusait.
Tous avaient respecté le thème de la soirée, et on pouvait définir quels étaient les parents les plus riches rien qu'en regardant certaines somptueuses robes portées.
La musique était envoûtante, l'ambiance électrique et je concluais que, par inadvertance, le lycée avait semblé créer une atmosphère de séduction à l'issu d'une ambiance familiale. Filles et garçons se frôlaient dangereusement, mais cela n'empêchait pas les autres de danser et s'amuser librement.

Je ne savais pas trop quoi commencer, et lançais un regard tel un petit chien perdu à mon amie.
C'est alors que s'interposa entre nous Alex, un garçon avec qui je partageais l'an passé un cours de technologie.
-« Heyyyy les filles ! Vous vous amusez bien ? J'vous propose un p'tit vers ? Recette secrète ! » dit-il très fort alors que la musique couvrait les voix.
-Je veux bien ! acceptais-je poliment. Je vois que tu n'as pas respecté le thème ? déclarai-je, amusée. Les cheveux mals coiffés, vêtu d'une chemisette hawaïenne ainsi que d'un pantalon clair, Alex était un de ces garçons un peu toujours beaucoup –voir trop- enjoués et assez épuisants.
Cependant, on ne pouvait pas lui en vouloir, il était trop gentil et naïf pour.
Il ria bruyamment et répondit :
-« Bah, quoi ? Je suis déguisé non ? Tant que l'on porte des habits différents du quotidien, j'appelle ça un déguisement ! »
Il partit, et je rapprochai de mon amie en avalant le liquide qu'il venait de me tendre.
J'avalai le tout en une gorgée, ce qui fut une sage décision, car le goût était tellement infecte que je n'aurais pas pu le finir en plusieurs fois. On pouvait sentir le mélange du jus de cerise et d'un alcool fort rendant la langue pâteuse.
J'observai mon amie, qui avait le même air de dégoût.
-«Beurk, ils ne sont vraiment pas doués en boisson ici... Bon, mission du soir rappelle toi, trouver ton harcelleur. »
-« Ou bien c'est juste moi qui suis folle et hantée depuis deux mois.»
Alice soupira d'exaspération et se retourna vers moi.
Elle se plaça face à moi et allait me rétorquer quelque chose lorsque qu'elle écarquilla les yeux.
A cet instant même, une amie à moi, Louisa, passa près de moi et cria :
-« Sympa ces lentilles, Nina ! »
Je lançais un regard de détresse à Alice.
-« Quoi ? Que se passe-t-il ? Qu'est-ce que j'ai ? »
-« Tes.. Tes yeux... Ils sont fluorescents dans le noir ! »
-« Quoi ! criai-je. Tu n'avais pas remarqué avant ?! »
-« Ben non ! C'est bizarre ! s'exclama-t-elle en se rapprochant de moi afin de m'examiner. Heureusement, personne ne semble se douter de quelque chose. »

Je me mordai les lèvres, paniquée.
-« Reste ici je reviens, je vais aux toilettes ! » déclarai-je rapidement avant de me ruer vers ces derniers.
Sur le chemin, je bousculais tout le monde et penchai la tête vers le sol.
Quand j'atteignis la pièce, je me dépêchai d'y entrer avant de refermer violemment la porte.
Surprise, je remarquai qu'il n'y avait personne. Pas une fille qui se remaquillait, s'arrangeait les cheveux, où bien prenait la pose pour se prendre en photo.
J'étais chanceuse. Inquiète, je pris place face à l'un des miroirs et me regardai avec horreur : la couleur de mes iris était encore plus brillante. C'était terriblement effrayant, et je ne savais plus quoi faire. J'avais envie d'appeler mes parents, et je sentais la panique qui m'envahissait. Mes yeux se remplissaient de larmes, et je décidai de fouiller ma pochette pour tenter d'y retrouver mon téléphone portable.

J'entendis la lourde porte s'ouvrir soudainement. Je relevai le visage enfouis et sûrement gonflé et découvris une jeune femme rousse aux lèvres pulpeuses et pincées.
La robe d'un rouge éclatant et les mains appuyées contre les hanches, Olivia s'avança.

-« Quelque chose ne va pas chérie ? » déclara-t-elle d'une voix glaciale et provocante.

La jeune femme fit une fausse mimique inquiète et souria faussement.

Elle s'approchait de moi, les talons qui claquaient contre le sol, le regard me défiant.

-« D'où sors-tu ce lambeau noir et ces lentilles lumineuses ? Regarde-toi ! Tu as l'air ridicule, comme toujours! »ajouta t-elle en appuyant chacun de ses mots, avant d' éclater de rire férocement.

Ses moqueries inutiles et puériles commencèrent à m'enflammer, je serrai les dents et lui fis face.

[NDA: Voilà pour ce 5e chapitre! J'espère qu'il vous a plu! Pour information, je m'efforcerai toujours de poster un à deux chapitre par semaine. 😊

xoxo]

Iris VioletsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant